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Suite italienne

Suite italienne

Titel: Suite italienne
Autoren: Juliette Benzoni
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qu’il espérât la tiare pour lui-même, le temps n’en était pas encore venu, mais il entendait que le symbole du suprême pontificat ne s’en allât pas coiffer une tête qui lui serait hostile.
    À nouveau, sa magie personnelle joua. L’élu, cette fois, était l’un de ses amis, ce Pietro Barbo, cardinal de Venise, qui l’avait aidé à faire fuir son frère Pedro-Luis. Barbo avait quarante-huit ans, il était riche, aimable et beau… si beau même qu’il fallut se pendre à sa simarre pour l’empêcher de prendre comme nouveau prénom celui de Formosus, beau en latin. Ramené à une plus juste conception des choses, le nouveau pape se contenta de celui de Paul et entreprit de payer ses dettes.
    Cette fois, Borgia fut royalement récompensé : la grande abbaye bénédictine de Subiaco, qu’il se dépêcha de fortifier puissamment et de timbrer du taureau familial, et le riche évêché d’Albano, en sus bien entendu de ses titres et dignités précédents. Et ce fut Borgia qui, de sa main brune, posa sur la tête du beau pape la couronne de saint Grégoire le Grand.
    Le pontificat de Paul II, s’il fut agréable pour ses amis, n’allait pas laisser de grandes traces. Le pape aimait mener joyeuse vie, dépensait largement et, sous son règne, le Vatican prit peu à peu les allures d’un lieu de festivités continuelles, malgré l’agitation endémique de Rome qui, toujours partagée entre Orsini et Colonna, ne savait pas ce que c’était qu’une nuit tranquille, sans bagarres et sans meurtres.
    Borgia en profita pour s’établir plus commodément dans la cité. Il avait acheté, entre le château Saint-Ange et la place d’Espagne, le groupe de bâtiments qui composaient l’ancienne Monnaie, la Zecca, et converti le tout en un magnifique palais, fastueusement décoré et bourré de tous les trésors qu’il accumulait au fil des jours.
    Ce fut là que pénétra, un soir de 1470, une litière hermétiquement close, crottée jusqu’aux rideaux et escortée, comme un trésor, d’une troupe armée jusqu’aux dents.
    Cette litière venait de Mantoue et elle apportait à Rodrigue la belle Vannozza, qu’à travers toutes ses aventures féminines, il n’avait pas réussi à oublier.
    Tant que Pie II avait vécu, il n’avait pas osé la faire chercher mais, avec Barbo comme pape, il savait n’avoir plus rien à craindre : le nouveau pontife était prêt à lui passer les plus incroyables folies. Or c’en était une que faire venir à Rome, chez lui, et pour en faire sa maîtresse, une femme mariée.
    Car Vannozza, à présent, était mariée. Elle avait épousé un certain Domenico de Arignano, personnage falot et de naturel accommodant, qui ne voyait aucun inconvénient à laisser, moyennant finances naturellement, sa femme et le séduisant cardinal Borgia assouvir ensemble leur mutuelle passion. Il s’était donc décidé à effectuer un voyage d’agrément à Venise, tandis que sa belle épouse gagnerait Rome, Rome où il la rejoindrait plus tard, lorsque son fastueux amant l’y aurait installée de façon convenable.
    Depuis le jour de leur première rencontre, Vannozza était devenue plus splendide encore. Et lorsque, enfin, il la tint entre ses bras dans la douceur d’une nuit de printemps, Rodrigue connut un bonheur, une plénitude, auprès desquels pâlissaient ses autres aventures. Vannozza était tout ce qu’il aimait : chair douce et somptueuse, caractère tendre et joyeux, ardeur égale à la sienne dans les jeux de l’amour, goût de la beauté et de la vie facile. Enfin elle l’aimait, d’une passion éblouie qui faisait d’elle la plus affectueuse, la plus consentante des esclaves. Et Borgia le fauve impétueux, Borgia le débauché, Borgia le calculateur, Borgia le politique, Borgia qui se voulait semblable au taureau son emblème, Borgia sut pour la première fois de sa vie ce que c’était que la tendresse pour une femme qui n’était pas sa mère.
    — D’autres m’ont donné des enfants, lui dit-il. Mais c’est de toi, Vannozza mia, de toi que j’en veux avoir, car ceux-là, je crois… oui, je crois que je les aimerai !
    Il n’allait pas tarder à être exaucé…

II
Le trône de Pierre
    Toutes les tempêtes de la Méditerranée semblaient s’être donné rendez-vous devant la flotte papale. L’ouragan s’était levé, brutal, imprévisible, dès que l’on eut doublé le cap Corse. À présent, il se ruait avec férocité sur les navires, comme
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