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Sir Nigel

Sir Nigel

Titel: Sir Nigel
Autoren: Arthur Conan Doyle
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tours et les larges douves
n’avaient pu retenir le noir fossoyeur qui les avait emportés. Les
lois perdirent de leur force, faute d’un bras résolu pour les
appliquer, et, une fois affaiblies, ne purent jamais reprendre leur
vigueur. Le laboureur refusa désormais d’être un esclave. Le serf
se mit à secouer ses fers. Il y avait beaucoup à faire, et il
restait peu d’hommes. Il fallait donc que les rares survivants
fussent des personnes libres d’agir, de fixer leurs prix et de
travailler où et pour qui elles voulaient. La mort noire, et rien
d’autre, ouvrit la voie au soulèvement qui devait, trente ans plus
tard, faire du paysan anglais le paysan le plus libre de toute
l’Europe.
    Mais trop peu de gens étaient suffisamment
perspicaces pour prévoir le bien qui allait naître de ce mal. À ce
moment-là, la misère et la ruine frappaient chaque famille. Bétail
crevé, récoltes pourries, terres incultes, toutes les sources de
richesses avaient disparu dans le même temps. Les riches
s’appauvrirent : mais les pauvres, et surtout ceux qui
l’étaient en portant sur les épaules le fardeau de la noblesse, se
trouvèrent dans une situation précaire. À travers toute
l’Angleterre, la petite noblesse fut ruinée, car ses membres
n’avaient d’autre occupation que la guerre et tiraient leur revenu
du travail des autres. Dans plus d’un manoir il y eut de durs
moments, et surtout au manoir de Tilford qui avait été durant de
nombreuses générations le foyer de la famille Loring.
    Il fut un temps où les Loring avaient gouverné
toute la région entre les North Downs, cette chaîne de collines
crayeuses du Hampshire et du Surrey, et les lacs de Frensham, un
temps où leur sombre château, se dressant au-dessus des vertes
pâtures bordant la rivière Wey, avait été la plus puissante
forteresse entre la seigneurie de Guildford à l’est et celle de
Winchester à l’ouest. Mais la guerre des Barons avait éclaté, au
cours de laquelle le roi s’était servi de ses sujets saxons comme
d’un fouet pour flageller les barons normands, et le château de
Loring, à l’instar de beaucoup d’autres, avait été détruit de fond
en comble. Dès lors, les Loring, leur domaine considérablement
réduit, vivaient dans ce qui avait été le douaire, avec de quoi
subvenir à leurs besoins mais privés de toute splendeur.
    Puis avait eu lieu le procès avec l’abbaye de
Waverley, lorsque les cisterciens avaient réclamé leurs terres les
plus riches et les droits féodaux sur le reste. L’action intentée
avait duré des années et, au bout du compte, les gens d’Église et
les robins s’étaient partagé tout ce que le domaine comptait encore
de richesses. Il restait cependant le vieux manoir, d’où à chaque
génération sortait un soldat pour maintenir haut le nom de la
famille et pour porter son écusson à roses de gueules sur champ
d’argent là où on l’avait toujours vu, c’est-à-dire au premier rang
de la bataille. Dans la petite chapelle où le père Matthew disait
la messe chaque matin se trouvaient douze statues de bronze qui
toutes représentaient des hommes de la maison de Loring. Deux
avaient les jambes croisées, pour avoir participé aux croisades.
Six avaient les pieds posés sur des lions parce qu’ils étaient
morts à la guerre. Quatre seulement étaient figurées avec un chien,
ce qui signifiait qu’ils étaient morts dans la paix.
    De cette famille célèbre mais doublement
ruinée par la loi et la peste, il ne restait plus, en l’an de grâce
1349, que deux membres en vie. C’étaient Lady Ermyntrude Loring et
son petit-fils Nigel. L’époux de Lady Ermyntrude était tombé devant
les hallebardiers écossais à Stirling, et son fils Eustace, le père
de Nigel, avait trouvé une mort glorieuse, neuf ans avant le début
de ce récit, sur la poupe d’une galère normande au combat naval de
Sluys. La vieille femme solitaire, aussi fière et ombrageuse que le
faucon enfermé dans sa chambre, ne faisait preuve de douceur
qu’envers le jeune garçon qu’elle avait élevé. Toute la dose de
tendresse et d’amour de sa nature féminine, si bien dissimulée aux
yeux d’autrui que personne ne pouvait même en supposer l’existence,
ne s’épanchait que sur lui. Elle était incapable de supporter qu’il
s’éloignât d’elle, et lui, avec ce respect pour l’autorité que
l’âge lui commandait, ne serait pas parti sans sa bénédiction ni
son consentement.
    C’est
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