Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
[Napoléon 1] Le chant du départ

[Napoléon 1] Le chant du départ

Titel: [Napoléon 1] Le chant du départ
Autoren: Max Gallo
Vom Netzwerk:
arrête cet homme, qu’on le mette en prison. »
    Il marche de long en large. Cette journée, il le sentait, serait incertaine. On pousse la porte. Que veulent ces généraux députés Jourdan et Augereau, qu’on dit de sympathie jacobine ?
    Viennent-ils déjà rôder comme des charognards, parce qu’ils croient que je vais reculer devant l’opposition parlementaire ?
    Ils proposent un compromis, une action de concert avec eux. Ils assurent que Bernadotte dispose d’hommes dans les faubourgs, qu’il peut déclencher un mouvement sans-culotte.
    Si je n’agis pas, je perds.
    Napoléon écarte Augereau.
    — Le vin est tiré, dit-il. Il faut le boire. Tiens-toi tranquille.
    Il quitte cette pièce où il étouffe. Il ne se laissera pas entraver par ces manoeuvres, ni enliser dans ces discours d’avocats.
    Il entre dans la galerie d’Apollon. Les Anciens ont suspendu leur séance. Ils forment une masse compacte, rouge et bleu. Napoléon voudrait avancer, mais il ne peut accéder à l’estrade.
    Il doit agir, c’est-à-dire parler.
    — Représentants du peuple, commence-t-il, vous n’êtes point dans des circonstances ordinaires, vous êtes sur un volcan…
    Les députés murmurent déjà. Il est mal à l’aise. Il n’aime pas se justifier.
     
    Ces hommes-là, auxquels il dit : « Je vous le jure, la patrie n’a pas de plus zélé défenseur que moi ; je me dévoue tout entier pour faire exécuter vos ordres », qui sont-ils ? Qu’ont-ils fait pour qu’il soit ainsi contraint d’obtenir leur accord ?
    — Et la Constitution ? hurle l’un d’eux.
    Il se redresse.
    — La Constitution ? Vous sied-il de l’invoquer ? Et peut-elle être encore une garantie pour le peuple français ? La Constitution ? Elle est invoquée par toutes les factions et elle a été violée par toutes ; elle est méprisée par toutes.
    Il a rugi. Il reprend son souffle. L’un des députés qui lui est proche propose l’impression de son discours. Mais d’autres voix demandent des explications. Il doit encore parler des périls qui se lèvent en Vendée, des royalistes qui menacent Nantes, Saint-Brieuc, Le Mans.
    Il martèle :
    — Je ne suis d’aucune coterie, parce que je ne suis que du grand parti du peuple français.
    Mais il sent que ses paroles ne portent pas. Ces hommes-là, drapés dans leur robe bleue, le front barré par leur toque rouge, le torse enveloppé dans leur manteau blanc, le ventre serré dans leur ceinture rouge, ne peuvent être convaincus.
    Il se tourne vers l’entrée de la salle.
    — Vous, grenadiers, dit-il, dont j’aperçois les bonnets, vous, braves soldats dont j’aperçois les baïonnettes…
    Les députés se lèvent, menacent, grondent. Ce sont pourtant les Anciens, ceux qui lui sont le plus favorables !
    Il les regarde. Ils sont hostiles. Il ne pourra jamais les séduire dès lors qu’ils sont cette meute rassemblée. Et il se laisse aller, les mots surgissent qu’il ne contrôle plus, qui balaient toute habileté, toute prudence.
    — Si quelque orateur payé par l’étranger parlait de me mettre hors la loi, lance-t-il, que la foudre de la guerre l’écrase à l’instant, j’en appellerai à vous, braves soldats, mes braves compagnons d’armes…
    Les députés hurlent.
    — Souvenez-vous, crie-t-il, que je marche accompagné du dieu de la Victoire et du dieu de la Fortune…
    Il entend Bourrienne qui murmure :
    — Sortez, général, vous ne savez plus ce que vous dites.
    Mais que dire d’autre à ces avocats-là qui ne veulent pas entendre !
    — Je vous invite à prendre des mesures salutaires que l’urgence des dangers commande impérieusement, poursuit-il. Vous trouverez toujours mon bras pour faire exécuter vos résolutions.
     
    Il traverse la galerie d’Apollon. Il marche d’un pas rapide. Il écarte ceux qui, comme Bourrienne, lui recommandent la prudence, lui déconseillent de se rendre devant l’assemblée des Cinq-Cents, où la majorité des députés lui est hostile. Ne comprennent-ils pas qu’il vaut mieux se battre mal que ne pas se battre ? Il est persuadé qu’il n’obtiendra rien de ces députés par la modération. Sieyès, près de lui, ne dit rien. Dans l’escalier qui conduit à l’Orangerie, l’écrivain Arnault, qui arrive de Paris, l’interpelle : il vient de quitter Fouché.
    — Fouché vous répond de Paris, général, mais c’est à vous, dit-il, de répondre de Saint-Cloud. Il est d’avis qu’il faut
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher