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L'inconnu de l'Élysée

L'inconnu de l'Élysée

Titel: L'inconnu de l'Élysée
Autoren: Pierre Péan
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tête, où les objets ne sont pas mis en valeur… »
    Le président de la République s'est évidemment beaucoup impliqué dans le choix du successeur de l'« homme à l'écharpe rouge ». Il a reconnu en Henri Loyrette, spécialiste du xix e , notamment de l'impressionnisme, un « homme de culture capable de changer les choses 10  ». Un homme qui pourra replacer « l'art parmi ses influences, dans son environnement humain, politique, social, scientifique », qui aime à dire que « l'artiste ne se comprend bien qu'entouré des siens : ses maîtres, relations, élèves, épigones ». Avant que Loyrette ne prenne la direction du grand navire, Chirac et lui ont évidemment « parlé ensemble des grands défis que le Louvre, avec d'ailleurs l'ensemble des musées français, devait dorénavant relever ».
    « C'est en fait une véritable révolution culturelle à laquelle nous assistons, a poursuivi Jacques Chirac dans le même discours-profession de foi. Cet engouement est plus qu'un effet de mode. Il est la conséquence d'une soif, d'une maturité du public, d'une société qui est devenue en quelque sorte une “société culturelle” tant la production, la diffusion, l'échange et la consommation de contenus culturels marquent aujourd'hui de leur empreinte les exigences individuelles de la vie sociale et aussi de l'économie. » Le chef de l'État souhaite que les musées rendent vie aux œuvres et à leurs auteurs. « Lamartine et, après lui, Cocteau ont dit leur lassitude des musées “cimetières des arts”. » Toujours cette même idée qui revient chez lui comme un leitmotiv : « L'art contre la mort ! Rendre vie aux œuvres, c'est aussi organiser la cohérence du parcours, la “profondeur” du parcours 11 . »
    Le Pavillon des Sessions n'était qu'une étape dans le projet global de Chirac et de Kerchache d'installer les arts premiers à Paris pour sous-tendre sa véritable obsession : la promotion du « dialogue des cultures » : « On vit dans un monde où on est toujours à deux doigts de se taper sur la gueule… Mieux on pourra dialoguer, plus on évitera les affontements inutiles !… », m'explique, prosaïque, le président de la République.
    Jacques Chirac a consacré beaucoup d'énergie à franchir tous les obstacles, notamment ceux dressés par une partie de la communauté scientifique, pour ériger le musée des Arts premiers. Il s'est ainsi « disputé comme chien et chat » avec Henry de Lumley avec qui il entretient par ailleurs d'excellents rapports. Mais l'opposant le plus virulent a été André Langaney, alors directeur du laboratoire d'anthropologie du musée de l'Homme, qui l'« injuriait directement ou indirectement chaque semaine ». Dans la rubrique « Débats » de Libé du 18 juin 1997, Langaney écrivit ainsi, entre autres gentillesses : « Aujourd'hui, un lobby de collectionneurs et antiquaires pousse un président discrédité à vouloir, par caprice princier, remplacer le musée de l'Homme et le populaire musée de la Marine par un musée d'art exotique, qualifié scandaleusement de “primitif” ou “premier” ! Ce projet raciste et aberrant vient de gens pour qui l'art s'évalue par le prix des “pièces” sur le marché ou par les stars de notre culture qui les ont volés ou possédés. En aucun cas par le projet des artistes ou le sens que leur culture donnait ou donne à leurs œuvres. Une grande cavalerie administrative détourne des crédits de l'État, toujours refusés au musée de l'Homme, vers une association 1901 créée pour le démanteler ! Le trésorier des prédateurs est le directeur responsable de l'institution au ministère et le président, l'inénarrable Friedman 12 , assureur racheté avant faillite et conseilleur en dissolution. Cet argent doit servir à payer un collectionneur 13 , autoproclamé conseiller “scientifique”, et ses comparses dont le projet est de virer la science du musée. »
    Jacques Chirac achève l'histoire du musée du quai Branly, conclue par l'inauguration officielle, le mardi 20 juin, en présence de Kofi Annan, mais surtout du vieil anthropologue Claude Lévi-Strauss, en disant : « Lumley a perdu, car moi j'avais Lévi-Strauss derrière moi. Je ne lui ai jamais rien demandé, mais il m'a soutenu dès le départ. » Et il ajoute presque en passant, encore une fois sans mâcher ses mots, qu'« on ne peut pas avoir une approche de l'art si on n'a pas une vision générale du
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