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Lettres - Tome I

Lettres - Tome I

Titel: Lettres - Tome I
Autoren: Pline le Jeune
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un compatriote, il n’hésite pas à dépenser trois cent mille sesterces ; là, il annule par égard pour une orpheline les dettes de son père ; il assure l’existence de sa nourrice par le don d’un petit domaine, ou il complète la dot et le trousseau d’une jeune mariée, fille d’un autre ami ; il débourse cinq cent mille sesterces pour une fondation alimentaire ; il orne à ses frais sa chère ville de Côme d’une statue, d’une chaire d’enseignement, et fonde une bibliothèque ; il érige un temple à Tifernium Tiberinum, en répare un autre dans sa propriété ; il aide le poète Martial, toujours besogneux, à retourner dans son Espagne natale, et joint toujours à ses libéralités une extrême délicatesse. « Ne craignez pas, écrit-il à l’une de ses protégées, que ce cadeau ne soit onéreux pour moi. Ma fortune est modeste, la charge que j’occupe m’oblige à une représentation coûteuse, les revenus de mes propriétés sont souvent amoindris et peu sûrs ; mais ce qui manque de ce côté est compensé par l’économie qui me permet d’être généreux. » Cette générosité faillit même une fois mettre ses jours en danger, quand il fournit au philosophe Artémidore, proscrit par Domitien, l’argent nécessaire à son voyage. Sa bonté d’âme se manifestait en faveur de ses esclaves et de ses affranchis ; il traite les premiers avec toute l’humanité possible, et pleure leur mort en se défendant de n’y voir qu’une perte d’argent ; il envoie son fidèle Zosime, après un crachement de sang, faire une cure en Égypte, puis à Fréjus ; il a une semblable sollicitude pour son lecteur Eucolpius, malade. Certes, c’est par lui-même que nous connaissons ces divers traits de bonté ; mais il serait fort injuste de trouver dans la façon dont il les mentionne la moindre ostentation. C’est ainsi que les qualités du cœur étaient inséparables chez Pline de celles de l’esprit. Plein d’affectueuse attention pour sa chère Calpurnia, il eût été, sans nul doute, bon père de famille, si, malgré trois mariages, son mauvais destin ne l’eût privé de postérité.
    En toute occasion sa bienveillance se manifeste. D’humeur sans cesse égale, inaccessible à l’envie, il ne témoigne de quelque amertume que lorsqu’il s’agit d’un vil intrigant, comme Régulus, ancien délateur et captateur d’héritages, ou du puissant favori de Claude, l’affranchi Pallas, indigne des honneurs que l’on a rendus à sa mémoire. Il est toujours prêt à admirer ce qui est beau, ce qui est bien. Il garde une religieuse vénération pour sa mère, pour son oncle illustre, et pour les grandes figures de l’âge précédent, qu’il a connues. Il recommande la probité littéraire : « Méritons que nos descendants tiennent compte de nous par notre travail, notre soin, et notre respect de la postérité. » Il pratique la tolérance envers ses semblables dont les goûts peuvent différer des siens : « Soyons donc tolérants pour les plaisirs d’autrui, afin qu’on le soit pour les nôtres. »
    Est-ce à dire que cet homme à qui pouvait à juste titre s’appliquer la belle définition de l’orateur, vir bonus dicendi peritus, n’ait eu aucun défaut ? À vrai dire, il se montre souvent crédule et trop peu détaché des superstitions de son temps, quand il discute sérieusement de l’interprétation de certains songes, ou de phénomènes comme l’apparition de revenants, ou qu’il expose après d’autres, la merveilleuse histoire de l’enfant et du dauphin ; il flatte aisément ses amis pour leurs productions littéraires, mais avec quelle familiarité gracieuse ; encore ne faut-il voir souvent qu’urbanité et politesse dans les éloges dont il charge parfois des œuvres médiocres ; il montre enfin, et c’est là son plus gros défaut, une vanité d’auteur à peine atténuée çà et là par une apparente modestie. Il se compare à Démosthène et à Cicéron, il s’applaudit candidement d’être lu à Lyon, il se complaît à reproduire des vers où un ami dit de lui : « Pline, à lui tout seul, vaut pour moi tous les anciens » ; il vante la rapidité et la facilité avec laquelle il écrit ses vers, et le succès que font à son livre des grecs malins qui ont pour amour de lui appris le latin, afin de le chanter en l’accompagnant sur la cithare ou sur la lyre… On peut sourire au passage, mais convient-il de reprocher à un
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