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L'Empire des Plantagenet

L'Empire des Plantagenet

Titel: L'Empire des Plantagenet
Autoren: Martin Aurell
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Nées de la fragmentation de l’Empire carolingien, ces entités régionales sont nombreuses à l’ouest de la France, façonnées selon des critères économiques, ethniques et culturels d’une certaine cohérence. Quoique dépendantes en théorie du roi, souverain recevant l’allégeance de ses feudataires, qui datent leurs chartes d’après l’année de son règne, elles jouissent dans la pratique d’une large autonomie. Elles opèrent des regroupements avec les principautés voisines : au milieu du XI e  siècle, l’union du Poitou et de la Gascogne ou la constitution du Grand Anjou coïncident avec la conquête du royaume d’Angleterre par le duc de Normandie. Ces rassemblements territoriaux formeront, un siècle plus tard, le cadre de l’Empire Plantagenêt. On pourrait avec quelque vraisemblance trouver une certaine homogénéité à ce vaste conglomérat de principautés, en particulier l’arc atlantique qu’il forme. En tout état de cause, les quatre gouvernants qui se sont succédé à la tête de l’Empire ont cru à sa raison d’être.
    Ceindre la couronne anglaise accorde-t-il un atout supplémentaire pour diriger tous ces territoires, y compris sur le continent ? Il est sûr que la royauté apporte un surplus de prestige et donc d’autorité, qui se matérialise dans les pouvoirs thaumaturges que lui attribue le sentiment collectif. En effet, le sacre célébré à Westminster fait d’eux les « oints du Seigneur », à l’encontre desquels toute révolte ou désobéissance est un acte d’autant plus grave qu’il est sacrilège. Pourtant, ce rite prestigieux, que l’Angevin partage avec le roi de France ou l’empereur romano-germanique, entraîne une lourde contrepartie. Elle l’oblige, d’une part, à jurer les libertés du clergé et du peuple, et elle le met, d’autre part, sur un plan symbolique, à la merci des évêques qui jouent le plus beau rôle pendant la cérémonie. Cette double dimension, contractuelle et théocratique, du couronnement ouvre ainsi le chemin vers la plaine de Runnymede, où Jean sans Terre est contraint d’apposer son sceau sur la Grande Charte, qui met fin à son despotisme. Sur le continent, la portée de ce sacre semble bien plus limitée. Il ne permet pas aux Angevins d’échapper à la soumission, formelle et rituelle, au roi de France, à l’empereur et au pape. Malgré tout, pour compenser cette subordination au Capétien, il donne un lustre supplémentaire aux cérémonies d’intronisation ducale. Un rituel de remise du cercle d’or, de l’épée, des éperons, de la lance et de l’étendard se déroule dans les cathédrales et basiliques normandes et aquitaines. Cet enjeu n’est pas négligeable, comme le prouve la tentative des moines de Saint-Denis, nécropole capétienne, de placer les ducalia d’Aquitaine dans leur trésor.
    En temps de paix, c’est sur d’autres terrains que les Plantagenêt poursuivent la guerre idéologique contre Louis VII et Philippe Auguste. En comparaison des autres monarchies occidentales, ils font preuve d’une précocité surprenante en matière de propagande. Ils se présentent en « roi sage » d’après les critères bibliques ou rhétoriques, mais encore plus en « roi scientifique », instruit d’une connaissance empirique et profane de la nature. En outre, le mécénat et le contrôle, bien documentés, des Plantagenêt sur l’écriture des chroniques de Wace et Benoît de Sainte-Maure traduisent leur volonté de manipuler la mémoire d’un passé même très lointain, qui plonge ses racines dans la nuit des temps de la légende troyenne : le lieu d’aboutissement logique de la « translation de l’empire et du savoir » est la Grande Bretagne, qui tire son nom de Brutus, arrière-petit-fils d’Enée. Si la filiation maternelle est prestigieuse entre héros antiques et rois ou ducs saints d’Angleterre et Normandie, l’ascendance paternelle est certes plus modeste. L’ancêtre fondateur de la maison d’Anjou au sens strict n’est autre que Tertulle, forestier de Charles le Chauve et combattant aguerri des Vikings, dont le fils Ingelgerius accomplit des exploits qui lui valent l’adoubement. De telles racines, davantage chevaleresques que nobiliaires, plairont à la petite noblesse, sensible à ces hauts faits d’armes dont la juste rétribution est l’ascension au sommet de la hiérarchie des pouvoirs. L’épopée familiale rapporte d’autres exploits accomplis
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