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Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite
Autoren: Elena Arseneva
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aussi d’avoir su élaborer toute une réflexion sur les parfums, ainsi que sur la nature même de nos sensations. L’école socratique cherchait non à parler de ce qu’elle savait, mais à savoir de quoi elle parlait. Après 430, date de la grande peste d’Athènes, sa philosophie des parfums et aromates prit deux directions différentes, l’une morale, l’autre scientifique ou naturaliste. Pour Socrate, le seul parfum qui compte, c’est celui de la vertu, et Platon reprend cette analyse critique dans ses dialogues et ses essais. La plupart des héritiers spirituels de Socrate se bornent eux aussi à souligner que les essences aromatiques n’ajoutent rien à la valeur d’un homme, mais que leur excès peut être dangereux comme n’importe quelle drogue. Aristote, en revanche, serait le premier à adopter une attitude scientifique face aux vapeurs en général et aux parfums en particulier. Jusqu’alors, en Égypte et au Proche-Orient, on recueillait les huiles essentielles de certains bois résineux par évaporation à travers un feutre ou une toison laineuse. Les expériences d’Aristote avec l’eau de mer, le vin et les huiles aromatiques le conduisent, entre autres, à distiller de l’eau potable et à obtenir de l’eau-de-vie et de l’alcool à partir du jus fermenté des fruits odorants. Fait capital pour l’histoire des parfums ! Les études et les considérations d’Aristote furent poursuivies par son disciple Théophraste, dont le savant Traité des odeurs reste un des principaux ouvrages sur les aromates de l’Antiquité, souvent cité et commenté par les Romains. Pourtant, ceux-ci commencèrent par négliger le savoir-faire grec pendant près de cinq cents ans : au temps de la République, ils ne s’intéressaient qu’aux techniques de la construction utile et rentable, à l’armement militaire et naval, à la mise en valeur du sol. Pour un vrai Romain, l’or et l’argent exhalent une odeur plus suave que tous les parfums du monde ! Avec la naissance de l’Empire, en 27 av. J.-C., un appétit de jouissance prodigieux pousse sénateurs, chevaliers et puissants affranchis à étaler le luxe le plus ostentatoire. Dans toutes les villes importantes de l’Italie, les herboristes, les droguistes et les parfumeurs deviennent des fournisseurs indispensables pour les banquets, les maisons de plaisir, les bains publics et privés, les théâtres, les pompes funèbres. C’est le triomphe du faste oriental sur l’austérité et la sobriété des mœurs républicaines. Pourtant, les Romains resteront dans l’histoire des parfums surtout comme ceux qui ont édifié des aqueducs et des thermes et apporté à la Ville par excellence l’eau courante et le savon...
    Pour revenir à la civilisation grecque, nombre de ses rites, mythes et symboles ont été nourris par cette merveilleuse invention : la déesse des amours odorantes et le dieu des aromates. Ils naissent tous deux à Chypre et au sein du monde syro-phénicien. Il est probable que, vers l’an 600 av. J.-C., la célèbre Sappho elle-même a célébré dans ses chansons les amours du jeune Phénicien Adonis (littéralement « mon seigneur ») et d’Aphrodite – Astarté, la déesse parfumée au « trône de lumière », tandis qu’elle enseignait la musique et la poésie aux jeunes femmes de Lesbos. Le mythe de la naissance et de la mort d’Adonis s’est ensuite élaboré tout au long du V e  siècle grâce à l’œuvre de plusieurs poètes grecs. Parallèlement, à Athènes, le culte conjoint d’Aphrodite et d’Adonis continuait à se développer, se manifestant à travers la célébration de fêtes de plus en plus bruyantes, sensuelles et extatiques : les Adonies. Les adoratrices du Seigneur oriental né des larmes amères de la myrrhe se composaient de courtisanes aussi bien que d’épouses légitimes des Athéniens, au grand dam de ces derniers, surtout lorsque la cité devait prendre des décisions importantes en matière militaire. « A-t-elle éclaté au grand jour la débauche de ces dames, avec cette fête d’Adonis célébrée sur les toits et que j’entendais un jour que j’étais à l’Assemblée ! s’exclame un personnage d’Aristophane. L’orateur proposait de faire voile pour la Sicile et sa femme dansait en disant : Hélas ! Hélas ! Adonis ! » ( Lysistrata , v. 387-393).
    En ce qui concerne les aphrodisiaques dans l’Antiquité, il faut préciser que la même substance pouvait
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