Le mouton noir

1762. Secrétaire d’État en France, c’est comme ministre de la Marine qu’il fut mêlé à l’Affaire du Canada.
    Corpron, Jean (1729-après 1765): Il est l’associé de Joseph-Pierre Cadet.
    Dolbec, Romain (1685-après 1754): Fournisseur de viande à Québec sous Hocquart et Bigot.
    Dupont, le sieur: Rapporteur de l’Affaire du Canada.
    Lévis, François-Gaston, duc et chevalier de (1719-1787): Commandant en second de l’armée française lors de la prise de Québec
    Maurin, François (1726-après 1765): aide-munitionnaire général des vivres.
    Montcalm, Louis-Joseph, marquis de (1712-1759): Commandant de l’armée française à la prise de Québec.
    Moreau, Jacques de la Vigerie: Procureur général pour l’Affaire du Canada.
    Pénissault, Louis: Associé et commis de Cadet.
    Querdisien Trémais, Charles-François Pichon (1724-1784): Commissaire de la Marine chargé de l’enquête dans l’Affaire du Canada.

Avant-propos
    Quand quelqu’un a le malheur de naître le dernier d’une famille, il y a de fortes probabilités qu’il voie disparaître un à un ceux qu’il aime. Ce fut le sort de Clément Perré, né à Verchères à la fin du xvii e siècle, au manoir de son père, Marcellin Perré.
    Son rang de cadet fit également qu’il connut à peine Renaud, Fanchon et Simon, les aînés de la famille. Renaud, parce qu’il quitta le manoir pour ne presque plus y revenir; Fanchon, parce qu’elle se maria et partit pour Montréal alors qu’il venait tout juste de naître; Simon, parce qu’il alla étudier à Québec au moment où lui, son cadet, avait à peine cinq ans. Il ne les vit tous les trois qu’occasionnellement par la suite au manoir de leur père.
    Des trois, c’est sa sœur Fanchon qu’il connut le mieux parce que, après la mort de son premier époux, elle vint résider pendant un temps au manoir et leur rendit fréquemment visite par la suite, ce qui fut l’occasion pour Clément de jouer avec ses cousins dont l’aîné avait à peu près son âge. Il garda d’elle le souvenir d’une femme douce et toujours souriante. Il eut beaucoup de peine quand il apprit qu’elle avait été emportée par les fièvres malignes. Sa mort déclencha une suite de décès, comme si sa disparition avait sonné le glas pour les plus vieilles personnes du manoir. Leur cuisinière Augustine mourut la première à la suite de Fanchon, puis leur serviteur Jimmio, que Clément aimait bien, sans doute en raison de son rang de cadet, et ensuite leur chère mère.
    Dix années plus tard, leur père les quittait à son tour. Il ne restait de la famille, à fouler encore le plancher des vaches, que sa sœur Marie et lui. Il est vrai que quand ces malheurs arrivèrent, Clément ne vivait plus au manoir qu’il avait quitté à l’âge de dix-huit ans pour se lancer tête première en quête de ce qu’il pensait être la vie idéale. Aux yeux des siens, et avec raison, il devint rapidement le mouton noir de la famille. Chaque famille a, paraît-il, le sien. Chez les Perré, ce fut lui.
    Ce jour où, l’esprit rempli d’idées toutes aussi farfelues les unes que les autres, il quitta le manoir, il était loin de se douter du tourbillon dans lequel la vie allait l’emporter. Son histoire vaut la peine d’être connue. Les lignes suivantes veulent faire la lumière sur ce que fut sa vie.

Première partie
L’ERRANCE
(1710-1726)

Chapitre 1
Clément
    Mené par Jimmio, le cheval Dagobert franchit lentement les portes du jardin et prit la route de Verchères. Le vieux serviteur ne semblait pas vouloir presser l’équipage, car quelque chose le tracassait. Il dit:
    â€” Monsieur Clément, avez-vous peine?
    â€” De quitter ces lieux? Un peu, bien entendu, mais n’est-ce pas notre lot à tous de devoir un jour nous éloigner du nid paternel pour voler de nos propres ailes?
    â€” Bien! Permettez à Jimmio demander, vous faire quoi?
    â€” Je l’ignore encore, mais je ne saurais, comme Renaud, courir aux Anglais ni, comme Simon, explorer des terres inconnues. Je ne suis guère habile de mes dix doigts, le coup de feu ne m’intéresse pas plus que