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L'affaire du pourpoint

L'affaire du pourpoint

Titel: L'affaire du pourpoint
Autoren: Fiona Buckley
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sous la pluie, Cecil disposait d’une pièce pour son propre usage dans chacun de ces lieux. Il trouvait cet arrangement commode, même à Whitehall, pourtant si proche de sa maison de Canon Row qu’il pouvait rentrer chaque soir chez lui retrouver Lady Mildred.
    C’est dans cette pièce de Whitehall que j’avais rencontré Alexander Bone, mais alors Cecil n’avait pu me parler librement et de telles visites ne pouvaient se répéter trop souvent. D’où cette invitation à Canon Row, mentionnée en public.
    Sans doute avait-il reçu un message d’Élisabeth concernant ma réticence, car il m’envoya une escorte pour s’assurer que je viendrais.
    — Paul Fenn, pour vous servir, dame Blanchard, me dit le jeune homme qui s’était présenté à l’entrée la plus proche et m’avait fait aviser qu’il m’attendait.
    Il avait environ dix-huit ans et il était beau, avec des dents splendides, excepté deux de devant qui se chevauchaient un peu, et une moustache naissante. Il était habillé avec recherche, et ses épais cheveux blonds étaient coiffés d’un bonnet de velours bleu fringant, assorti à son manteau. Je reconnus vaguement en lui une récente addition au personnel de Cecil. Il se montrait attentif et courtois, avec cette déférence mêlée d’assurance que l’on trouve si souvent chez les jeunes gens de la noblesse. Je ne suis encore qu’un jouvenceau, semblaient dire ses manières, mais, un jour, je deviendrai secrétaire d’État.
    Je me mis donc en route pour Canon Row, accompagnée de Fenn, de Dale et de Brockley. Cela m’amusait un peu car, bien entendu, je n’avais pas songé un instant à me soustraire à mes engagements. Ce n’était qu’un artifice, et cinquante Paul Fenn n’y auraient rien changé.
    Après avoir quitté la reine, je m’étais sentie bouillir de rage pendant une heure, puis je m’étais rendu compte que cela ne changeait rien à ma décision. D’une manière ou d’une autre, je prendrais Meg et j’irais en France, sans permission ni laissez-passer. Cela était faisable ; la Tamise transportait nombre de vaisseaux dont le capitaine emmènerait n’importe qui n’importe où, moyennant finance. Brockley m’en trouverait un.
    Entre-temps, je devais feindre d’accepter les ordres de la reine, aussi pris-je le bras de ma jeune escorte et, tous les quatre, nous partîmes à pied pour Canon Row. Nous étions bien emmitouflés pour nous préserver du froid et de la pluie incessante ; les hommes portaient des bottes, Dale et moi marchions avec de lourdes socques pour protéger nos pieds de la boue. Sous mon manteau, j’étais parée d’une autre jupe de brocart crème, assortie cette fois à un damas vert pâle et une fraise bien blanche. Je n’avais pas le cœur à ce que j’allais faire, néanmoins je souhaitais en donner l’apparence.
    Par bonheur, la demeure des Cecil était bien chauffée. Fenn prit mon manteau aussi épais qu’une couverture ainsi que mes grosses chaussures, et patienta avec politesse pendant que Dale me donnait les souliers à la mode qu’elle avait apportés pour moi. Il indiqua à Brockley et à elle les quartiers des domestiques, puis, avec un sourire aimable qui me permit d’admirer à nouveau sa dentition, il me fit entrer dans la petite salle à manger où les Cecil dînaient lorsqu’ils étaient seuls ou ne recevaient qu’un ou deux convives.
    La pièce était accueillante. Une multitude de chandelles et un feu clair dans la cheminée repoussaient les rigueurs de février. La table était mise sur une nappe en fin damas blanc. Je n’étais pas venue là depuis quelque temps et remarquai que, depuis ma dernière visite, le décor s’était enrichi d’exquises tapisseries et d’un tapis d’Orient, dans des tons rose et azur. Cecil, venant à ma rencontre avec son épouse, me vit les admirer.
    — Nous nous sommes accordé quelques folies, il y a peu. J’espère que le résultat vous plaît. Bienvenue, Ursula. Venez vous asseoir.
    En privé, Cecil était d’un abord facile, et bien que la formidable intelligence de Lady Mildred, alliée à sa prédilection pour les robes noires austères, eût de quoi en intimider plus d’un, elle avait un cœur d’or. Tous deux m’avaient témoigné de la bonté, à mon arrivée à la cour, et plus tard ils en avaient montré à Meg. Je les aimais beaucoup, et je mesurai soudain combien la tromperie que je préparais leur paraîtrait une trahison. Le chagrin m’accabla, si
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