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La Sibylle De La Révolution

La Sibylle De La Révolution

Titel: La Sibylle De La Révolution
Autoren: Nicolas Bouchard
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voir le
couple aborder un des îlots rocheux sur lequel avait été construit une des
piles du pont. Il s’engagea sur l’ouvrage.
    Sans se soucier des barrières,
il se précipita à une vitesse fulgurante vers le premier poste de garde.
    Les trois hommes étaient
revenus. Plusieurs lanternes avaient été accrochées et, incrédules, ils virent
la silhouette cauchemardesque d’Abaddon courir vers eux.
    — Qu’est-ce que c’est que cette
diablerie ?
    — Hé, arrêtez !
    Mais le monstre continua sa
course, inéluctablement. Son maître lui avait donné un ordre et rien ne
comptait plus maintenant que de lui obéir.
    Ils prirent leurs armes à peu
près en même temps et, au moment où il arrivait à l’entrée du poste de garde,
firent feu. La triple détonation roula comme un coup de tonnerre sur les rives
de la Marne. Sénart, qui soutenait comme il le pouvait la pauvre
Marie-Adélaïde, leva la tête : on se battait au-dessus d’eux. Les gardes
du pont baissèrent leurs armes. La fumée empêchait d’y voir. Soudain, alors
qu’une âcre odeur de poudre noire rendait la respiration difficile, la créature
jaillit des brumes. Le premier eut à peine le temps de crier : un bras
d’une force insensée le frappa en plein visage. Les deux autres entendirent un
craquement sinistre, déjà l’homme s’écroulait sans un cri, la nuque brisée, les
yeux encore grands ouverts de surprise. Le deuxième prit le sabre qu’il portait
au côté et tenta un coup maladroit. La lame effleura la cage thoracique de leur
assaillant. Celui-ci sauta sur lui, le jeta à terre et, comme pris d’une fureur
démente, entreprit de lui arracher la tête.
    Le troisième reculait en
tremblant. Son fusil déchargé était inutile, aussi le jeta-t-il à terre et prit
son pistolet. Lorsqu’il visa, le spectacle qu’il aperçut à la lueur des
chandelles lui glaça le sang. Le monstre hurlant au visage de cadavre écorché
et aux immenses yeux sans paupières venait de briser le cou de son compagnon.
Mais sa mort ne sembla pas lui suffire. Il tourna la tête de sa victime en un
angle impossible et la secoua dans tous les sens. Du sang se mit à jaillir.
Avec horreur, le garde vit la tête se désolidariser du reste du corps.
Finalement, le monstre la brandit comme un trophée, toujours hurlant. Il fixa
le regard de son compagnon, horrifié et déjà vitreux. Une partie de la colonne
vertébrale dégoulinait de sang. Il poussa lui-même un cri et visa.
    Un nouveau coup de feu retentit.
Un instant, il ne vit plus rien mais presque immédiatement, un choc d’une
brutalité inouïe le projeta en arrière.
    — Au secours !
    Mais il était trop tard.
Au-dessus, un regard de fauve, une mâchoire apparente comme celle d’un
squelette, se penchait sur lui. La bête beugla encore et ses cris assourdirent
ses propres appels. Il se rendit compte que la chose était en train de lui arracher
un bras. D’abord les tendons cédèrent alors qu’une douleur insensée lui
traversait l’épaule. Puis ce fut l’os qui craqua avec un bruit sourd.
    Rendu fou par la douleur, alors
que lentement le monstre continuait à tirer, tirer, il ne put que
supplier : « Pitié, pitié ! »
    Mais Abaddon, la cinquième
trompette, l’ange de l’abîme, celui qu’on nommait l’Exterminateur ne connaissait
pas la pitié.
    L’homme appela la mort de tous
ses vœux mais elle fut longue à venir.
    Les deux jeunes gens avaient
entendu les coups de feu, les hurlements. Lorsque, enfin, ils mirent pied sur
l’autre berge, la Sibylle claquait des dents et tremblait de manière
convulsive.
    — Tu… tu crois qu’ils l’ont
arrêté ?
    — Je ne crois pas, répondit-il
en essayant de la réchauffer. Vite, nous ne sommes pas à l’abri ici !
    — Mais… où alors ?
    — À Paris !
    Et ils reprirent leur course.
Ils empruntèrent le même chemin qu’à l’aller. Les jardins de Bercy, les chemins
de halage. Marie-Adélaïde courait bien mal, alourdie par sa robe trempée et Sénart
la soutenait autant qu’il le pouvait.
    — Laisse-moi, murmura-t-elle.
Je ne mourrai pas aujourd’hui, je le sais, mais toi…
    — Pas question que je te laisse
entre les mains de cette chose.
    Et ils continuèrent. Abaddon
était là, derrière. Il suivait leur trace comme un chien flaire une piste.
« Nous ne tiendrons pas longtemps notre avance, se dit-il. Elle est
fatiguée, et moi je vais bientôt avoir un point de côté. Le chemin de ronde, où
est le chemin
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