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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours
Autoren: Christophe Verneuil
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alla le voir tous les soirs à l'hôpital.
    Jacob vécut assez pour la voir obtenir son premier diplôme; il était maigre, avec le teint cireux, quand elle obtint son parchemin de docteur en médecine, mais il s'accrocha assez à la vie pour assister à ses six premiers mois d'internat. Trois nouvelles crises de pancréatite vinrent finalement à bout de lui et il mourut d'un cancer du pancréas peu avant que Ginger ne décide d'abandonner la recherche pour se consacrer à la chirurgie au Boston Memorial Hospital.
    Elle avait affronté cette période troublée comme tout ce que l'existence lui réservait et elle avait fini son internat avec des notes tout à fait excellentes et des recommandations plus impressionnantes encore.
    Elle retarda sa nomination en allant passer deux ans à l'université de Stanford, en Californie, pour y étudier exclusivement la pathologie cardio-vasculaire. Après un mois de vacances-le congé le plus long qu'elle e˚t jamais pris-, elle regagna Boston et prit contact avec le Dr George Hannaby, responsable du service de chirurgie au Memorial Hospital, renommé pour ses innovations révolutionnaires en matière de traitement des maladies cardio-vasculaires. Elle fut engagée pour deux ans. Les dix-huit premiers mois de son affectation se déroulèrent sans la moindre anicroche.
    Et puis, un mardi de novembre, elle se rendit à la charcuterie Bernstein pour y acheter quelques spécialités juives. quelque chose de terrible arriva alors.
    L'incident des gants noirs. Et c'est là que tout commença.
    Le mardi était son jour de repos. Les deux premiers mois qui suivirent son engagement au Memorial Hospital, elle alla même travailler pendant ses jours de congé parce qu'elle n'avait pas vraiment autre chose à faire. George Hannaby mit un terme à cette habitude dès qu'il en eut connaissance. Il lui dit que la pratique de la médecine était très épuisante et que tous les médecins avaient besoin de se reposer, même Ginger Weiss.
    Depuis, chaque mardi, elle dormait une heure de plus, prenait une douche et buvait deux tasses de café
    en lisant le journal, installée à la table de la cuisine devant la fenêtre donnant sur Mount Vernon Street.
    A dix heures, elle s'habillait, descendait jusqu'à la boutique de Bernstein, dans Charles Street, et achetait du pastrami, du pumpernickel, parfois de l'esturgeon fumé ou du fromage, en un mot toutes sortes de spécialités juives qu'elle rapportait chez elle et dégustait nonchalamment tout en lisant Agatha Christie, Mary Higgins Clark, John D. MacDonald ou, pourquoi pas, Robert Heinlein.
    Ce sinistre mardi de novembre commença pourtant très bien-le ciel était couvert, mais l'air frais avait quelque chose de revigorant-, et elle se retrouva dans la charcuterie Bernstein (bondée, comme d'habitude) à dix heures vingt et une. Ginger passa d'un comptoir à l'autre, inspectant les étagères chargées de boîtes de conserve, les vitrines réfrigérées pleines de charcuterie et de g‚teaux. La boutique faisait penser à une cocotte laissant échapper les parfums les plus suaves et les sons les plus joyeux: pain chaud et cannelle éclats de rire, ail et clous de girofle, conversations en anglais épicées de mots yiddish ou d'expressions branchées, amandes grillées et chou, café et cornichons, cliquetis des couverts. quand Ginger eut acheté tout ce qu'elle désirait, elle régla à la caisse, enfila ses gants bleus tricotés, prit son sac, passa devant les tables o˘
    une douzaine de personnes prenaient un petit déjeuner tardif et se dirigea vers la sortie.
    Elle tenait le sac à provisions sous son bras gauche et, de sa main libre, essayait de ranger son porte-monnaie dans le sac passé en bandoulière sur son épaule droite. Elle regardait son porte-monnaie quand elle arriva devant la porte. Un homme vêtu d'un manteau de tweed gris et d'une toque noire était entré au même instant, aussi distrait qu'elle. Ils se bousculè-rent. Une bouffée d'air frais arriva de l'extérieur et elle fit un pas en arrière. L'homme rattrapa de justesse le sac à provisions de Ginger et posa une main sur son bras.
    ´ Pardonnez-moi, dit-il. C'est ma faute.
    - Non, c'est la mienne.
    -Je rêvassais.
    - Et moi, je ne regardais pas devant .
    -«a va ? fit-il.
    - Très bien, je vous assure.
    Il lui rendit son sac à provisions.
    Elle le remercia, prit le sac et remarqua ses gants noirs. Ils étaient d'un luxe évident, taillés dans un cuir de belle qualité
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