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La Femme Celte

La Femme Celte

Titel: La Femme Celte
Autoren: Jean Markale
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comme une dégénérescence
rationalisante d’un élément magico-religieux qui touche la vie intérieure des
êtres et les oblige psychologiquement . La
légende primitive est plutôt dans la version de Thomas, même si celui-ci mêle
au mythe des considérations courtoises.
    [359] Dans les triades galloises, il est question de deux Essyllt (nom gallois d’Yseult : d’ailleurs la
graphie française Yseult semble provenir de la
graphie galloise, car le Y gallois se prononce comme E ou EU, sans qu’on puisse
dire qu’Essyllt est la forme originelle du nom de l’héroïne). La première est
qualifiée Essyllt Fyngwen (mutation de Myngwen ), c’est-à-dire « à la crinière blanche
(ou blonde) ». Comme on en fait l’amante de Drystan (nom gallois de Tristan qui se réfère au modèle picte Drustanos ), c’est donc elle qui est Yseult la
Blonde. Mais il y en a une deuxième, Essyllt Vinwen (mutation de Minwen ), c’est-à-dire « aux
Lèvres Blanches ». Il est probable que par suite d’une mauvaise traduction
(le cas est assez fréquent, ainsi Caradoc Brief-bras ,
« aux bras courts » provient de Brechvras ,
« aux grands bras » !), Essyllt Vinwen est devenue Yseult aux
Blanches Mains, Min s’étant prononcé comme main et wen ayant
été normalement traduit par blanche . Ces
considérations sur le nom des deux Yseult prouverait, sinon une origine de la
légende au Pays de Galles, du moins une étape galloise de son évolution.
    [360] Un détail de la version de Thomas se réfère exactement à l’archétype
irlandais, l’histoire de Diarmaid et Grainné. Lorsque Diarmaid s’est enfui avec
Grainné, il n’a fait qu’obéir à l’obligation magique que celle-ci avait jetée
sur lui, mais il n’a pas consommé son union avec elle. Or Grainné, un jour,
marche à côté de Diarmaid sur un terrain bourbeux et son pied fait jaillir de
l’eau entre ses cuisses. Elle s’écrie : « Éclaboussure lumineuse, tu
es plus hardie que Diarmaid ! » ( Revue celtique , XXXIII, 46. Cf. J. M., L’Épopée celtique d’Irlande , p. 160). Dans le roman de
Thomas, Yseult aux Blanches mains se promène aux côtés de son frère Kaherdin et
une éclaboussure lui jaillit entre les cuisses. Yseult se met à rire et
explique à son frère : « cette eau qui m’éclaboussa les jambes monta
plus haut que ne fit jamais main d’homme, ni que Tristan jamais n’exigea »
( Tristan de Thomas , trad. Herbomez et
Beaurieux, p. 71). Ainsi Kaherdin apprend-il que le mariage de sa sœur n’a
jamais été consommé. Sur les raisons de cette non-consommation, Thomas s’étend
avec complaisance en faisant appel à toute une psychologie compliquée. Mais
quelques réflexions sont significatives : « La passion de Tristan
pour la reine éteint son ardeur envers la jeune fille, paralyse sa volonté et
rend la nature impuissante… Ce n’est pas que Tristan ne soit fort disposé à
caresser sa jeune femme, mais un autre amour le retient ( Ibid. ,
p. 62) ». C’est donc un cas d’impuissance psychologique, une inhibition .
    [361] Les retours de Tristan vers Yseult la
Blonde deviennent une nécessité vitale pour lui, et pour ce faire il est prêt à
braver le monde entier. Ce n’est pas tellement le caractère de fatalité qui est mis en évidence ici, comme on le
dit trop souvent, mais le caractère d’ obligation magique. Comme Yseult représente le Soleil (et ce symbolisme est prouvé par le
nom de son archétype Grainné, nom qui vient de l’irlandais grein , soleil), Tristan a besoin de reprendre des
forces au contact d’Yseult. C’est une question de vie ou de mort. On pense au
poème Délie , de Maurice Scève, poète du XVI e  siècle (« Comme des rais du soleil gracieux
/ se paissent fleurs durant la primevère, / je me recrée aux rayons de ses
yeux ») ou encore à Agrippa d’Aubiné (« À l’éclair violent de ta face
divine, / n’étant qu’homme mortel, ta céleste beauté / me fit goûter la mort,
la mort et la ruine / pour de nouveau venir à l’immortalité… / J’ai vécu de
nectar, j’ai sucé l’ambroisie, / savourant le plus doux de la divinité »).
    [362] Cette anecdote, dont la beauté poétique est remarquable, ne se trouve
pas dans les versions commune ou courtoise, mais seulement dans le poème
épisodique La Folie Tristan (manuscrit d’Oxford).
On y retrouve le symbolisme solaire d’Yseult. Mais le thème de la
« chambre de cristal » est celtique.
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