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La Cabale des Muses

La Cabale des Muses

Titel: La Cabale des Muses
Autoren: Gerard Hubert-Richou
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diligentée, monsieur, et vous en êtes chargé. Je vous dirai d’emblée que, si une personne dépourvue de stratégie militaire n’avait imaginé un dessein aussi… téméraire et inconséquent, notre capitaine et la plupart de nos camarades n’auraient pas succombé…
    Appâté par ce préambule, Géraud Lebayle s’interdit de demander qui était cet irresponsable, de façon à ne pas indisposer ni tarir les confidences car ce que le mousquetaire avait à dénoncer relevait, à la limite, du secret militaire… ou de la diffamation. Maupertuis respira un long moment à petites bouffées à cause de la souffrance engendrée par ses côtes brisées. Il poursuivit un ton plus bas :
    — À la pointe de la demi-lune, d’Aligny se heurta à une résistance inattendue de la part des Hollandais. D’ailleurs, une question élémentaire s’imposait alors à tous : comment ceux-ci étaient-ils parvenus si rapidement, et en un tel nombre, à cet endroit sans être remarqués par quiconque ?... Là-haut, les gardes français commençaient à battre en retraite, chahutés, bousculés par Farjeau. Avec monsieur d’Artagnan, passés par la gorge dans l’espoir de rallier la barrière, nous nous apprêtions à utiliser les tranchées de Vauban quand le duc de Monmouth et ses lifeguards nous rejoignirent.
    Maupertuis s’interrompit une nouvelle fois, arguant de ses difficultés respiratoires pour se concentrer encore un peu et sonder son interlocuteur. Était-il prudent de se confier sans retenue ? Ne subirait-il pas les conséquences de sa sincérité ? Géraud devina ce dilemme et rappela que la confiance du roi lui était acquise pour faire toute la lumière.
    — Vous avez compris, monsieur, attesta le militaire, que se situent à cet instant une décision cruciale et une… maladresse décisive qui ont déterminé toute la suite… Mais peut-être que dans l’urgence extrême… Nous étions déjà engagés dans la tranchée qui triplait la distance, sans nous exposer cependant aux tirs plongeants quand… quand l’impétueux jeune prince, pour gagner du temps, se présenta à la tête de ses Anglais avec la volonté de franchir à découvert l’espace menant tout droit à la demi-lune. Monsieur d’Artagnan lui cria que c’était une folie de s’offrir au feu de l’ennemi et le rappela. Monmouth n’entendit pas, ou ne voulut pas entendre raison. Notre capitaine insista, s’indigna. Le jeune homme s’entêta, prétextant être en mesure de surprendre l’adversaire. Monsieur d’Artagnan n’eut pas le cœur de laisser massacrer nos Français sans rien tenter. Il engagea donc ses mousquetaires sur la pente en ordonnant un feu nourri. C’était une aubaine pour les Hollandais de nous canarder de tous côtés car ils s’étaient emparés de positions confortables. Les mousquetades et les tirs de canons mitraillaient les combattants de part et d’autre. Nous ralliâmes l’escouade d’Aligny déjà éprouvée et poursuivîmes l’assaut de la demi-lune que, derrière monsieur de Saint-Léger, nous reprîmes après cinq heures d’un combat épouvantable. Hélas, monsieur d’Artagnan gisait face contre terre, sur la butte au-dessus de l’escarpe. Une balle de mousquet lui avait traversé la gorge.
    — Une balle de mousquet, vous en êtes certain ?
    — Je comprends votre surprise. Les Hollandais possèdent en effet des mousquets, prise de guerre ou d’autres manières, car c’est une arme fiable et efficace. Dans cette reconquête, nous avons perdu plus de cent hommes courageux qui ne reculèrent pas d’un pouce et dont certains se sacrifièrent pour tenter de rapporter, sous une intense grêle de plomb, la dépouille de notre chef vénéré. Je fus moi-même blessé vers la fin de l’assaut et ramené sur l’arrière.
    Géraud Lebayle remercia Maupertuis, l’assura de sa discrétion et de sa détermination, lui souhaita un prompt rétablissement puis, sur quelques précisions topographiques, quitta l’hôpital ayant presque doublé le temps qui lui avait été accordé.
    Direction la maudite demi-lune !
    Lebayle dévala le plateau de Saint-Pierre comme s’il avait les loups aux trousses, sous les regards des soldats au repos, suivant l’itinéraire emprunté par d’Aligny. Il reprit son souffle à l’endroit présumé de la rencontre entre d’Artagnan et Monmouth, sur le caractère et les motivations duquel il aurait aimé en connaître davantage. Quelque chose dans la conduite
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