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Journal de Jules Renard de 1893-1898

Journal de Jules Renard de 1893-1898

Titel: Journal de Jules Renard de 1893-1898
Autoren: Jules Renard
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chat, mais je n'en suis pas bien sûr, tant la chose me parut sale et chiffonnée.
Pas de fumée sortant des toits, pas de claquement de portes.
Je vis un large noyer. Le vent le faisait bouger. Parfois deux ou trois feuilles, les autres restant muettes, chuchotaient entre elles, et, un moment, elles s'agitèrent toutes. Peut-être que ce noyer concentrait en lui seul la vie du hameau, que, seul, il sentait, que, seul, il était capable d'un sentiment de sourde terreur ou d'ennui.
S'il ne pense guère, il pense plus que les hommes.
Dur pour lui, dur pour les autres, parfois il s'échappait. Il suivait l'enterrement d'un inconnu pour avoir le droit de pleurer.
Il avait fait peindre, au fond de son tub, des herbes, des feuilles mortes, des branches cassées, pour se donner l'illusion de se baigner « dans l'onde pure d'un ruisseau. »
- J'éprouve cette impression sans pouvoir l'analyser.
    - Alors ne m'en parlez plus. Ce serait du remplissage. Traiter le même sujet jusqu'à ce qu'il donne une fortune.
Tu as l'air d'une poule qui dirait : « Tiens ! Je crois tout de même que j'ai pondu ! »
4 octobre.
Vous ne vous préoccupez que d'être sincère. Mais ne trouvez-vous pas un peu fausse et mensongère cette constante recherche de la sincérité ?
Si, à votre gré, je n'ai pas encore assez de talent, supposez que je sois mort, et tout à coup votre estime et mon talent seront au pair.
Il faut faire d'abord volontairement, avec plaisir, ce qu'on fait. Le résultat importe peu. On ne le prévoit pas, et on l'apprécie mal. Mais l'auteur s'est satisfait lui-même : c'est toujours ça.
5 octobre.
Il s'est toujours encombré d'inutiles amitiés.
7 octobre.
Dans les vélodromes de province, ils chronométraient les records avec leur pouls. On vendait un cheval : il monta jusqu'à 200 000 francs.
Quand on prononça ce chiffre fantastique, le cheval, comme pris de fierté, leva la tête.
9 octobre.
Schwob, de passage à Épinal, et en officier, fait appeler Descaves à la caserne.
    Et il le voit boutonnant sa veste, et inquiet, car, à cause de son livre et de sa dégradation, les sous-offs ne font que lui marcher sur les pieds. Et il gémit et s'écrie :
- Je me demande toujours en vertu de quel règlement on m'a dégradé. Et, aujourd'hui, je suis de piquet d'incendie, et on m'a nommé instructeur, de sorte que j'ai les inconvénients du grade sans en avoir les bénéfices.
- Et c'était bien amusant, me dit Schwob.
Dès son entrée, il donnait un coup de canne sec sur la tapisserie d'un fauteuil pour voir si les gens étaient propres et si la poussière n'allait pas s'envoler.
Verlaine appelle « corriger des épreuves », barrer des virgules, chercher les puces de sa copie.
10 octobre.
Hier soir, Schwob et moi, nous étions désespérés, et j'ai cru, un moment, que nous allions nous envoler par la fenêtre comme deux chauves-souris.
Nous ne pouvons faire ni du roman, ni du journalisme. Le succès que nous méritons, nous l'avons eu. Est-ce que nous allons recommencer éternellement de l'avoir ? Les éloges qui nous faisaient plaisir maintenant nous laissent froids.
On nous dirait « Voici de l'argent : retirez-vous trois ans quelque part pour écrire un chef-d'oeuvre, et vous êtes sûrs de l'écrire, si vous voulez » : nous ne le voudrions pas. Alors quoi ? Est-ce que nous piétinerons jusqu'à quatre-vingts ans ?
    Nos paroles nous donnaient une sorte de fièvre noire.
Schwob se leva et dit qu'il voulait s'en aller.
Il dit aussi que, ce qu'il y a de plus rare au monde, c'est la bonté.
- Cher directeur, dit-il, si vous hésitez encore à prendre ma copie, supposez un instant que je sois mort.
Schwob raconte :
- Un jour, Henri Monnier, invité à un enterrement, arrive en retard, entre dans la chambre du mort déserte, et, mettant ses gants, demande à un domestique : « Alors, il n'y a plus d'espoir ? »
Et cet autre mot :
Un homme qui suit un enterrement demande à un autre monsieur :
- « Savez-vous qui est mort ? »
- « Je ne sais pas. Je crois que c'est celui qui est dans la première voiture. »
Faire quelque chose avec le mot de Demerson me frappant sur l'épaule à minuit, après cinq jours d'absence illégale, au moment ou il allait être déclaré déserteur.
- Est-ce qu'on s'est aperçu de mon absence ?
D'Esparbès :
- Je suis fort moi ! J'ai des biceps, moi ! Je suis une brute, moi ! Je ne suis pas intelligent, moi ! Mais j'ai de l'instinct, moi, et, moi, sans le savoir, je fais tout de même de belles
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