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Faux frère

Faux frère

Titel: Faux frère
Autoren: Paul C. Doherty
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se voit si peu sur le noir ! Et puis, bien sûr, mon parfum. Bref, je surpris Lady Somerville examinant l’habit : elle me regarda et je me contentai de lui sourire.
    — Et le père Benedict ?
    — Je savais que Lady Somerville irait le voir, s’exclama-t-elle en crachant presque les mots. Car elle se serait vite fait remettre à sa place par Lady de Lacey.
    Une ombre amusée passa sur son visage.
    — Les événements se précipitèrent. Lady Somerville nourrissait quelques soupçons et s’en était ouverte au père Benedict. Il lui faudrait un certain temps pour le convaincre et j’avais déjà choisi Isabeau comme prochaine victime.
    Son regard se perdit dans le vague, elle semblait se parler à elle-même.
    — Lady Somerville devait disparaître ainsi que le père Benedict avant qu’il ne rassemble ses esprits et ne comprenne ce qui se passait. Le lendemain soir, je rendis visite à Isabeau. Je ne m’attendais pas à l’arrivée d’Agnès. Le reste...
    Elle haussa les épaules et mit sa main dans son habit comme pour se gratter.
    — C’est bon, murmura-t-elle en se levant. Mais brusquement elle brandit le poing. Corbett n’eut que le temps d’apercevoir l’éclair d’une fine dague d’acier. Dans sa précipitation, cependant, Lady Fitzwarren se montra maladroite : au lieu de le frapper d’estoc, directement, elle voulut lui lacérer le visage. Cade bondit et Lady Neville hurla, mais Corbett eut tôt fait d’agripper le poignet de la meurtrière et de le serrer jusqu’à ce que celle-ci, grimaçant de douleur, lâchât son arme. Ranulf s’élança et lui mit sans ménagement les bras derrière le dos. Puis il lui attacha habilement les pouces avec une cordelette qu’il tira de son aumônière. Lady Fitzwarren s’immobilisa, un sourire suffisant aux lèvres.
    — Vous êtes vraiment un fin renard, mon garçon ! souffla-t-elle. J’ai payé ces vauriens rubis sur l’ongle, mais ils s’y sont pris comme des empotés ! Ah, les hommes, quels maladroits !
    Elle céda soudain à une crise de fou rire. Ranulf la gifla.
    — Scélérat ! hurla-t-elle.
    Ranulf lui saisit l’épaule et lui susurra quelque chose à l’oreille. La vieille dame recula, livide de terreur.
    — Vous ne feriez pas cela ! protesta-t-elle d’une voix sifflante.
    — Oh que si ! rétorqua tranquillement Ranulf.
    Corbett, observant cette scène étrange, se gardait d’intervenir.
    Ranulf murmura derechef à l’oreille de Lady Fitzwarren.
    — Dans une taverne à l’enseigne du Coupe-Jarret à Southwark, répondit-elle. Wormwood, un ancien bourreau.
    Ranulf s’éloigna, satisfait. Corbett appela Cade d’un claquement de doigts.
    — Enfermez-la à la tour Blanche. Qu’elle y reste jusqu’à ce que le roi ait décidé de son sort.
    Il désigna Lady Neville, pétrifiée sur sa chaise, le visage blême, les yeux écarquillés, la bouche entrouverte.
    — Ranulf, raccompagne-la !
    Il se rassit pendant que Cade emmenait Lady Fitzwarren, passive à présent. Quant à Ranulf, il aida doucement Lady Neville à se lever, puis, sans un regard en arrière, il quitta la salle capitulaire, un bras protecteur passé autour des épaules de la jeune femme. Corbett vit la porte se refermer derrière eux et se carra sur son siège, les bras croisés sur la poitrine. Les yeux perdus dans le vague, il murmura : « C’est fini ! » L’était-ce vraiment ? Comme à la guerre, il restait les blessures et les victimes. Il rédigerait son rapport, y apposerait son sceau privé et passerait à d’autres affaires. Mais qu’adviendrait-il de Cade et de sa maîtresse Judith ? De Puddlicott et de son frère ? Du jeune Maltote ? Des moines de Westminster ? Des Dames de sainte Marthe ? Tous avaient souffert, d’une manière ou d’une autre. Il se leva péniblement en soupirant et se demanda ce que Ranulf avait bien pu chuchoter à l’oreille de Lady Fitzwarren.
    « Il change », se dit-il. La présence de Lady Neville ne faisait que souligner cette transformation : Ranulf montrait plus de prudence, plus de détermination dans son désir de prouver sa valeur, sans compter l’ambition qui lui dévorait le coeur et qu’avait perçue Corbett. « Voilà qui donne à réfléchir ! » Corbett eut un petit sourire en resserrant son baudrier. « Si Ranulf veut plus de pouvoir, il va devoir accepter les responsabilités qui vont avec. » Le sourire du clerc s’élargit : à Ranulf, venait-il de décider,
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