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Crucifère

Crucifère

Titel: Crucifère
Autoren: David Camus
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lui sourit tendrement.
    « Merci », dit-elle en pleurant à chaudes larmes. « J’étais venue pour te sauver, te ramener à la vie, et c’est toi qui me sauves. »
    « Je serai toujours avec toi, pourvu que tu me gardes dans ton cœur. »
    « Tu ne me quitteras jamais. »
    Ils s’étreignirent une dernière fois – hélas trop brièvement. Déjà, les bras de Cassiopée commençaient à passer au travers de son père. Soudain, elle fut prise d’une violente quinte de toux et recracha de l’eau souillée de terre. Seuls les contours du visage de Morgennes lui apparaissaient encore. Ses lèvres, son nez, ses yeux, ses oreilles. Sa barbe et ses cheveux. Tout le reste s’effaçait.
    « Je t’aime », lui dit-elle.
    L’avait-il entendu ? Il avait presque entièrement disparu.
    « Papa ! »
    « Je t’aime, moi aussi. Je t’aimerai toujours… »
    Sur ces derniers mots, il se dissipa entièrement, ne laissant plus qu’une main, puis un doigt, tendu en direction d’elle ne savait quoi, et elle entendit, comme surgi du néant : « Va vers la croix. »
    Elle se retourna, et vit alors la coque de navire qu’elle avait aperçue en arrivant dans les marécages. Mais ce n’était pas qu’une simple coque de bateau, elle le comprenait maintenant.
    Cassiopée se trouvait au pied de l’Arche de Noé.
    La nef majestueuse, dont les flancs s’étaient au fil des ans fondus dans la végétation des marais, ressemblait à une colline, à un petit château. Elle se dressait au-dessus des arbres, dont le faîte ployait devant elle.
    Chose stupéfiante, une sorte de porte se devinait dans l’un de ses flancs. En l’examinant plus attentivement, Cassiopée se rendit compte qu’elle avait une forme de croix.
    — Mais que suis-je censée faire ?
    Tournant sur elle-même, comprenant seulement qu’elle était revenue à son point de départ – à la surface des marais, au beau milieu des marécages – elle appela :
    — Papa !
    Seul un profond silence lui répondit.
    Morgennes était parti.
    Alors elle s’en alla aussi. Elle était couverte de boue de la tête aux pieds, avait des algues dans les cheveux et de la vase dans le nez et la bouche. Elle toussa, se moucha aussi fort qu’elle put. Mais elle savait que, même dans six jours, même dans six ans, ses poumons garderaient encore la puanteur des végétaux en décomposition, mélangés à la terre.

64.
    « Et comme celui qui hors d’haleine, sorti de la mer au rivage, se retourne vers l’eau périlleuse et regarde, ainsi mon âme, qui fuyait encore, se retourna pour regarder le pas qui ne laissa jamais personne en vie. »
    ( DANTE , L’Enfer.)
    Cassiopée jeta un dernier coup d’œil à Simon. Il dormait – ou donnait l’impression de dormir – au milieu des marais, sa visière ébréchée laissant pénétrer un peu de vase dans son casque. « Dors bien, Simon le Petit, Simon le Peu », lui souhaita Cassiopée. « Fais de beaux rêves… Offre-toi une vie dans laquelle tu m’as épousée et fait de beaux enfants. Une vie où Morgennes t’admire, où ton père et tes frères te respectent. Une vie où tu pars reconquérir Jérusalem, Crucifère au poing. Dors bien profondément et, surtout, ne te réveille jamais… »
    Elle récupéra son armure, remit son casque et se dirigea à pas lents vers la sortie des marécages – et le pont de lianes.
    « Vais je y trouver les soldats verts ? » se demanda-t-elle. Quand elle émergea des marais, abandonnant ce qui pour elle était un autre monde, elle ne vit personne. Au bas du précipice, le Nil grondait comme à l’accoutumée, et le pont de lianes se balançait tranquillement dans le vent. Le jour commençait dans la quiétude d’un soleil éclatant. Il y avait un peu de brume, et les arbres luisaient, paisibles. Le ciel, sans un nuage, était d’un bleu immaculé, bienveillant.
    Cassiopée regarda de droite et de gauche, se demandant où son escorte était passée.
    C’est alors qu’elle repéra un rond dans l’herbe. Quelqu’un avait allumé un feu de camp, quelques jours plus tôt. « Quelques jours ? » Cassiopée s’approcha du foyer pour en inspecter les contours. Apparemment, deux ou trois personnes avaient longtemps campé ici. L’herbe portait encore les traces de leurs corps, et un trou creusé dans la terre avait servi à recueillir leurs excréments.
    « Je ne comprends pas. Qui a laissé ces traces ? Les soldats verts ? »
    Tout à coup, la nature
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