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Claude, empereur malgré lui

Claude, empereur malgré lui

Titel: Claude, empereur malgré lui
Autoren: Robert Graves
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des sommes assez considérables en lui faisant promettre de se mieux conduire à l’avenir. Il arrivait à Hérode d’en rendre une partie. Il s’agissait en réalité de mon argent, et Hérode le savait, aussi venait-il ensuite me trouver pour me remercier avec effusion comme si je lui avais donné moi-même. Je laissai un jour entendre à ma mère qu’elle se montrait peut-être un peu trop libérale envers Hérode   ; mais elle se mit en fureur et déclara que si cet argent devait être gaspillé, elle préférait que ce soit avec panache par Hérode plutôt qu’aux dés par moi dans des tripots de bas étage avec des amis douteux. (J’avais dû dissimuler l’envoi d’une importante somme d’argent à mon frère Germanicus pour l’aider à pacifier les rives du Rhin où des mutineries avaient éclaté   ; il m’avait donc fallu prétendre l’avoir perdue au jeu.) Je me rappelle avoir une fois demandé à Hérode s’il ne lui arrivait pas de perdre patience en écoutant ma mère lui faire de longs discours sur la vertu romaine.
    —  J’admire énormément ta mère, Claude, me répondit-il, et n’oublie pas qu’au fond je suis encore un Édomite barbare   ; c’est donc pour moi un grand privilège de recevoir l’enseignement d’une matrone romaine de la plus haute lignée et d’une moralité irréprochable. En outre, elle parle le latin le plus pur que l’on puisse entendre à Rome. J’apprends davantage, grâce à ta mère, en un seul de ses sermons, sur la place correcte des phrases subordonnées et le choix exact des adjectifs que je n’en apprendrais en suivant toute une série de cours onéreux donnés par un grammairien professionnel.
    Ce gouverneur de Syrie, Flaccus, avait servi sous les ordres de mon père et en était ainsi venu à concevoir la plus grande admiration pour ma mère, qui l’accompagnait toujours au cours de ses campagnes. Après la mort de mon père, il proposa à ma mère de l’épouser, mais elle refusa, disant qu’en dépit de sa tendre et fidèle affection pour lui, elle se devait, par égard pour la mémoire de son glorieux époux de ne jamais se remarier. De plus, Flaccus était plus jeune qu’elle de plusieurs années et leur union aurait immanquablement suscité de désagréables commentaires. Ils échangèrent tous deux une très amicale correspondance durant de nombreuses années jusqu’à la mort de Flaccus, survenue quatre ans avant celle de ma mère. Hérode, au courant de cette correspondance, s’attira les faveurs de Flaccus en faisant de nombreuses allusions à la noblesse d’âme de ma mère, à sa beauté et à sa générosité. Flaccus lui-même n’était pas un parangon de vertu   : il était célèbre à Rome pour avoir une fois, défié par Tibère lors d’un banquet, vidé avec lui coupe sur coupe durant toute une journée et deux nuits entières de beuverie ininterrompue. Par courtoisie envers son empereur, il laissa Tibère lamper la dernière coupe à l’aube du deuxième jour et emporter ainsi la victoire   ; mais Tibère était manifestement épuisé et Flaccus, d’après les témoins, aurait pu continuer encore pendant une heure ou deux au moins. Hérode et Flaccus s’entendaient donc très bien. Par malheur, le plus jeune frère d’Hérode, Aristobule, se trouvait également en Syrie et ces deux-là étaient en mauvais termes   ; Hérode avait un jour obtenu de lui quelque argent, qu’il s’était engagé à investir pour lui dans une aventureuse expédition commerciale vers l’Inde, après quoi il lui avait affirmé que les bateaux avaient coulé par le fond. Mais il s’avéra par la suite que les bateaux non seulement n’avaient pas coulé, mais qu’encore ils n’avaient jamais pris la mer. Aristobule se plaignit à Flaccus de cette escroquerie, mais Flaccus affirma à Aristobule qu’il accusait à tort son frère de malhonnêteté et que lui-même ne désirait pas prendre parti dans ce différend ni même jouer le rôle de juge. Aristobule, néanmoins, surveillait étroitement Hérode, le sachant sur la paille et se doutant qu’il réussirait à se procurer de l’argent par quelque subterfuge   ; il le ferait alors chanter pour le forcer à lui rembourser ce qu’il lui devait.
    Un an plus tard environ, survint une querelle de frontière entre Sidon et Damas   ; et les Damascènes, sachant combien Flaccus dépendait des conseils d’Hérode pour arbitrer les litiges de cet ordre –  en raison de la
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