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Carnac ou l'énigme de l'Atlantide

Carnac ou l'énigme de l'Atlantide

Titel: Carnac ou l'énigme de l'Atlantide
Autoren: Jean Markale
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de ce qui est. À Plouhinec, non
loin de Carnac, en un lieu où il y a aussi des alignements, on raconte qu’un
trésor est gardé par le Diable, sous un menhir. Or, certaines nuits, les
menhirs se déplacent et vont boire à la rivière : c’est le moment d’aller
déterrer le trésor. Mais, attention, le Diable rôde. Malheur à celui qui n’est
pas assez rapide : il sentira le froid de la pierre contre sa nuque, et ce
sera l’écrasement, l’écrasement vers le froid absolu, là où les antinomies s’effacent
parce que tout est figé dans la glace, dans un éternel immobile. L’enfer froid…
Carnac et sa masse imposante d’alignements incompréhensibles, c’est aussi cet ifern
yên. Et malédiction rouge à celui qui ne me croit pas…
    Tout cela montre que ma première vision des alignements de
Carnac ne fut guère déterminante au premier degré sur la recherche que je poursuivais
alors de moi-même. Ce n’est que beaucoup plus tard que, s’inscrivant dans une
méditation dépourvue de repères absolus, l’image mégalithique s’imposa comme un
fer de lance nécessaire pour comprendre la civilisation celtique et toutes ses
composantes. Ce fut d’abord la conjonction menhir, dolmen, cromlech et
cérémonies druidiques. À l’époque, je ne pouvais m’imaginer autrement un druide
que sous l’ombre d’un immense menhir, ou se haussant sur la table d’un dolmen
pour y sacrifier une victime plus ou moins consentante. J’avais lu Les
Martyrs de Chateaubriand, et l’épisode de Velléda, dans la brumeuse
Armorique, m’avait marqué. Et bien que je sache que tout ce texte n’est que pur
produit de l’imaginaire enfiévré du vicomte de Combourg, je ne peux m’empêcher
d’être ému, et saisi – au sens magique du terme – par la lecture de ces pages romantiques en dehors du temps et de l’espace, qui nourrissent et abreuvent les
quêteurs de vent. La connotation était évidente. Tout ce qui est préromain est
celte. Je me mis donc passionnément à la recherche des monuments druidiques. M. le Vicomte de Chateaubriand était mon guide. Il a bien failli m’égarer
dans des sentiers qui ne menaient nulle part, sinon dans l’univers fantomatique
des Lucile, des Atala, des Velléda et autres Pauline de Beaumont, ce qui, après
tout, n’eût point été désagréable, mais qui m’eût caché définitivement l’essence
même de ce que j’avais vaguement entrevu sans l’exprimer le premier jour de mon
contact avec les alignements de Carnac. Je parlais poésie en ce temps, et tout
était poésie du moment. Je pouvais délirer sur une image.
    Heureusement, j’eus bientôt un autre guide, un personnage
que je n’ai jamais connu mais dont les travaux et les écrits ont eu d’incroyables
répercussions sur ma propre démarche : Zacharie Le Rouzic, ce petit paysan
de Carnac, qui commença par être le « boy » de l’archéologue écossais Miln,
égaré on ne sait trop comment, dans les champs de menhirs de Carnac. Le Rouzic
s’était pris au jeu. Il avait continué plus avant les investigations de Miln. Il
connaissait le pays, ce qu’on racontait parfois le soir, au cours des veillées,
à propos des mégalithes. Il était allé très jeune sur le terrain. Il avait été
formé par un homme remarquable qui, si les moyens scientifiques de l’époque n’étaient
point encore satisfaisants, savait démêler le vrai du faux, l’imaginaire du
réel. À ces lectures, Carnac devint un tout autre paysage.
    Cela bouleversa singulièrement la vision de carte postale
que j’avais eue de cet amas prodigieux de pierres faméliques dressées vers le
ciel, dans l’attente d’une main de feu qui viendrait les couronner de vapeurs. En
septembre 1951, j’eus ainsi une autre approche, peut-être tout aussi imaginaire,
mais approfondie et marquée par les lents mouvements de l’univers.
    C’était l’époque où je parcourais la Bretagne en tous sens, à
pied, pour en connaître les chemins creux qui me semblaient receler encore
quelque chose de l’ancien temps, celui des cartes postales de mon enfance. Certaines
d’entre elles sont restées gravées dans ma mémoire : le géant d’Erdeven, énorme
menhir photographié isolé de tous les autres, mais avec un personnage en
costume breton pour donner l’échelle ; la rebouteuse du Pouldu, où l’on
voyait, au bord d’une fontaine assurément choisie pour son pittoresque, une
vieille femme en coiffe masser le poignet d’un patient qui
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