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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977
Autoren: Michèle Cotta
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connaître sinon mon programme, du moins mes options fondamentales, et si j’entends m’appuyer sur tous les partis de gauche. »
    Il en fait immédiatement et en public le commentaire : « Je dis aux communistes, comme je le ferai à tous les partis sans exclusive, à tous ceux qui se reconnaissent dans la gauche, que le temps presse, qu’il faut se lancer dans la bataille contre le pouvoir personnel. »
    Et il redit au PC que, désormais, c’est à lui de décider s’il sera derrière Mitterrand ou pas.
    Pas content que la direction communiste, à qui ces options fondamentales avaient été communiquées depuis la veille, l’ait laissé patauger sans donner sa réponse.

    22 septembre
    Conversation d’une heure Mendès-Mitterrand : rien ne filtre.

    1 er  octobre
    Quel drôle de type, ce Guy Mollet ! Quel besoin avait-il et à quoi cela correspond-il d’accorder cette interview à Paris-Presse  ? C’est un vendredi. Guy Mollet me reçoit dans son bureau de la cité Malesherbes, qu’il me fait visiter avant notre conversation. J’ai le temps de m’asseoir lorsque le téléphone sonne.
    Il dit : « Oui, bien sûr, j’ai donné une interview. Comment ça, pas intégralement ? »
    Il se lève, ouvre la porte de son secrétariat, fouille dans un tiroir, revient avec des feuillets bleus. « C’est mon interview, explique-t-il. Il paraît que Paris-Presse ne l’a pas publiée intégralement. »
    Il demande qu’on lui apporte le journal. Ce qui est fait. Il compare les feuillets avec le texte de Paris-Presse  : « Non, dit-il, ils sont corrects, ils n’ont rien enlevé. Évidemment, le chapeau m’est très hostile. »
    Il me tend le journal, et je lis avec effarement ce texte que je ne connaissais pas. Mais il trouve que je ne vais pas assez vite dans ma lecture. Il me reprend Paris-Presse et me lit lui-même les passages les plus importants : « Je souhaite, écrit-il, que M. Pinay soit candidat, parce que c’est la meilleure façon de mettre en ballottage le candidat gaulliste. »
    Je n’en crois pas mes yeux :
    « Mais cela va être interprété comme un lâchage de François Mitterrand !
    – Ça n’a rien à voir ! Je ne dis rien contre François Mitterrand. Au contraire, je répète que nous ne lâcherons pas le candidat de la gauche. C’est bien le candidat de la gauche, non ?
    – Mais on va crier à la manœuvre, à votre manœuvre ?
    – Ne m’énervez pas ! me réplique-t-il. De toute façon, chaque fois que je dis ou fais quelque chose, on prétend que c’est une manœuvre. Je prends le pari que Mitterrand ne trouvera rien à redire à cette interview. Il n’y aura que Jean-Jacques Servan-Schreiber pour faire des histoires ! »
    En sortant je suis perplexe : qu’a-t-il voulu faire ? Torpiller Mitterrand, ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier, se faire bien voir de Pinay ?
    Revenue à L’Express , je m’aperçois que mes interrogations sont partagées par tout le service politique.
    Pourtant, sur deux points au moins, Guy Mollet a bien vu les choses.
    Georges Dayan me raconte dans la soirée qu’il a pu joindre Mitterrand à Cannes, et que celui-ci a apaisé d’une phrase l’ébullition de la petite équipe mitterrandienne restée à Paris : « Calmez-vous, leur a-t-il dit. En un sens, ça m’arrange. Je voudrais bien qu’on puisse me démontrer maintenant que je suis l’homme de Guy Mollet et l’otage des partis ! »
    Et, de Cannes, il fait dans la soirée une déclaration sur Europe où il déclare en substance qu’il souhaite lui-même beaucoup de candidats à droite pour diviser les voix.

    Quant à J-J S-S, conformément à ce que m’a prédit Mollet, il fonce dans la brèche ouverte : « Guy Mollet joue la carte Pinay ! » – c’est le titre de L’Express du lundi suivant. Il ne m’écoute pas quand je lui dis que ce n’est pas tout à fait ce qu’a voulu faire Guy Mollet : « C’est ce qu’il a fait ! » me répond-il, bourru.
    Tout de même, cette interview de Guy Mollet m’a sidérée. Prendre le risque qu’on puisse dire que, tout compte fait, il préfère Pinay ! À moins, évidemment – ce que je pense un moment –, qu’il ait concocté cette déclaration avec Mitterrand dans le but de diviser la droite. Mais je ne crois pas les deux hommes assez proches l’un de l’autre pour élaborer ensemble un coup tordu de ce genre. Alors ?
    Et si Guy Mollet avait tout simplement voulu rappeler
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