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Au Pays Des Bayous

Au Pays Des Bayous

Titel: Au Pays Des Bayous
Autoren: Maurice Denuzière
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Matsigamea, Akansa, Natchè, Koroa, qui sont les plus considérables nations qui y demeurent, avec qui nous avons fait alliance par nous ou gens de notre part, jusqu'à son embouchure dans la mer ou golfe de Mexique, environ les vingt-sept degrés d'élévation du pôle septentrional jusqu'à l'embouchure des Palmes, sur l'assurance que nous avons eue de toutes ces nations que nous sommes les premiers Européens qui aient descendu ou remonté ledit fleuve Colbert ;
    » Proteste contre tous ceux qui voudraient à l'avenir entreprendre de s'emparer de tous ou chacun desdits pays, peuples, terres ci-devant spécifiés, au préjudice du droit que Sa Majesté y acquiert, du consentement des susdites nations, de quoi, et de tout ce que besoin pourra être, prends à témoin ceux qui m'écoutent et en demande acte au notaire présent pour servir ce que de raison. »
    « Le père Membré entonna le Vexilla Regis , puis le Domine salvum fac regem , par où la cérémonie finit avec les cris de : “Vive le Roy” », précise l'officier ministériel dans son compte rendu. On ignore ce que dirent et firent les sachems qui n'avaient sans doute retenu du discours de Cavelier que les noms indiens des nations amies ou ennemies de la leur.
    Le notaire délivra aussitôt l'acte et le fit signer aux témoins, compagnons de Cavelier, qui, avant d'arriver à cette consécration de leurs efforts, avaient bravé, pendant des mois, tous les dangers que représentait pour une expédition la traversée nord-sud de ce qui constitue aujourd'hui les États-Unis.
    Ainsi, après Cavelier, apposèrent leur signature : Zénobe Membré, récollet missionnaire, Henry de Tonty, François de Boisrondet, Jean Bourdon, sieur d'Autray, Jacques Cauchois, Pierre You, Gilles Meneret, Jean Michel, chirurgien, Jean Masse (ou Mas), Jean de Lignon, Nicolas de La Salle et La Métairie, notaire.
    Certains de ces hommes seront aussi les témoins, cinq ans plus tard et à peu de distance du site inaugural, dans ce même delta sauvage, de la fin tragique de Robert Cavelier de La Salle.

    Catholique et normand
    L'homme qui, le 9 avril 1682, prend possession d'un territoire dont il a arbitrairement fixé les frontières est un Normand. D'abord un Normand. Surtout un Normand.
    Jusqu'à sa mort, Robert Cavelier de La Salle illustrera le riche tempérament, les fortes qualités – rusticité de mœurs, pugnacité, endurance, esprit d'entreprise – comme les défauts irritants légués par les lointains ancêtres vikings. Descendant de ces demi-barbares, qui arrachèrent des provinces à Charles le Simple et à Raoul de Bourgogne, pour s'en faire un royaume, le fils du drapier, grand bourgeois de Rouen, se comporte comme un Rollon. C'est au nom du roi de France qu'il annexe un pan du continent américain, mais il compte bien que cette colonie sera son domaine, son duché. Il y a un duc de Normandie chez Cavelier comme il y a un vice-roi d'Espagne chez Cortés. Louis XIV ne peut prendre ombrage d'une ambition qu'il a encouragée par lettres patentes du 12 mai 1678. Quant à Colbert, il ne suppute qu'un apport colonial offert par un aventurier de bonne éducation, respectueux du sceptre royal et pieux par-dessus le marché. La permission signée par le roi et délivrée au sieur de La Salle – il a été anobli le 13 mai 1675 « pour ses bonnes actions dans le pays du Canada » – autorise expressément le porteur « à travailler à la découverte de la partie occidentale de la Nouvelle-France, à y construire des forts… ». Tout cela, bien sûr, à ses dépens !
    Cette année-là, le Roi-Soleil a non seulement la goutte mais des dettes. Tandis que Cavelier pose symboliquement la première pierre d'une colonie qui fera une grande Amérique française du Canada au golfe du Mexique, le souverain est penché, avec ses architectes, sur les plans de Versailles. Il ne pense qu'à flanquer le château de deux ailes, ce qui coûte cher et donne beaucoup de souci aux responsables des finances royales. Mais cela, l'explorateur l'ignore. Le saurait-il qu'il considérerait sans doute que ce ne sont pas là ses affaires.
    Robert Cavelier a de la religion, de l'honneur et un sens inné de la grandeur. C'est un de ces ambitieux intrépides, d'autant plus accrochés à leur ambition que celle-ci les dépasse. Les gens de son acabit voient plus loin qu'une réussite de conquistador. La gloire suffit aux vaniteux, la fortune satisfait les cupides, la possession
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