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Terribles tsarines

Terribles tsarines

Titel: Terribles tsarines
Autoren: Henri Troyat
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en uniforme holsteinois et se proclame l'émule de Frédéric II alors qu'il est l'héritier du trône de Russie, il se sent moralement appelé à défendre la grande-duchesse contre les entreprises démentielles de son mari. Bien qu'épuisée par la maladie, l'âge, les soucis politiques et les excès de nourriture et de boisson, la tsarine se tient au courant, avec une réprobation mêlée d'envie, des nouvelles incartades de sa bru. Elle l'approuve, car, à son avis, le grand-duc Pierre mérite cent fois d'être trompé parsa femme, lui qui trompe la Russie avec la Prusse. Mais elle redoute qu'en brusquant le cours des événements Catherine n'empêche la réalisation de son vœu le plus cher : le transfert pacifique du pouvoir, par-dessus la tête de Pierre, à son fils, le petit Paul, assisté d'un conseil de régence. Certes, Élisabeth pourrait, dès à présent, proclamer ce changement dans l'ordre dynastique. Cependant, une telle initiative se traduirait immanquablement par un règlement de comptes entre factions rivales, par des révoltes à l'intérieur de la famille et peut-être dans la rue. Ne vaut-il pas mieux laisser les choses en l'état, provisoirement ? Rien ne presse ; Sa Majesté a la tête solide ; elle peut vivre quelques années encore ; le pays a besoin d'elle ; ses sujets ne comprendraient pas qu'elle se désintéressât soudain des affaires courantes pour s'occuper de sa succession.
    Comme pour l'encourager dans le maintien du statu quo, la « Conférence », ce conseil politique suprême créé à son initiative, envisage une marche combinée des armées alliées sur Berlin. Cependant, le feld-maréchal Pierre Saltykov étant malade, le général Fermor hésite devant une action de cette envergure. Alors, payant d'audace, le général russe Totleben lance un corps expéditionnaire en direction de la capitale prussienne, surprend l'ennemi, pénètre dans la ville et en obtient la reddition. Bien que ce « raid » ait été trop rapide et trop mal exploité pour entraîner la capitulation de Frédéric II sur l'ensemble du territoire, le roi est suffisamment ébranlé pour qu'on puisse envisager l'ouverture defructueuses négociations. Dans cette conjoncture, la France devrait, selon Élisabeth, donner l'exemple de la fermeté. Ivan Chouvalov en est tellement persuadé que sa maîtresse dit de lui, en riant, qu'il est plus français qu'un Français de souche : « Français à brûler ! Par ailleurs, elle croit savoir que Catherine ne se montre aimable avec le baron de Breteuil que dans la mesure où la politique de la France ne contredit pas trop celle de la Russie. Or Breteuil, obéissant à son commettant, le duc de Choiseul, a prévenu la tsarine que Louis XV lui serait reconnaissant si, exceptionnellement, elle consentait à sacrifier « ses intérêts particuliers à la cause commune ». Bref, il lui demande de se résigner à un compromis. Mais, malgré la maladie qui la confine dans sa chambre, Élisabeth refuse de lâcher prise avant d'être assurée qu'elle touchera son dû. Pour elle, en prolongeant la trêve, on fera le jeu de Frédéric II. Tel qu'elle le connaît, il profitera de la suspension des hostilités pour reconstituer son armée et repartir au combat avec une nouvelle chance de succès. La méfiance et la vindicte de l'impératrice s'étant brusquement réveillées, elle prend le mors aux dents. A demi mourante, elle veut que la Russie vive après elle et grâce à elle. Alors que, dans son ombre, renaissent en sourdine les rumeurs sur l'avenir de la monarchie, elle prépare, avec ses conseillers de la Conférence, un plan d'attaque en Silésie et en Saxe. Sur un dernier coup de tête, elle nomme commandant en chef Alexandre Boutourline,dont le principal titre à ce poste est d'avoir été jadis son amant.
    Au vrai, si le généralissime, désigné in extremis, est plein de bonnes intentions, il n'a ni l'autorité, ni la science militaire requises. Personne, parmi les proches d'Élisabeth, ne l'a pourtant mise en garde contre les risques d'un tel choix. Pour un Ivan Chouvalov, qui prêche toujours la guerre à outrance, combien de dignes conseillers de Sa Majesté manifestent d'étranges hésitations, d'inexplicables dérobades ! Peu à peu, Élisabeth constate qu'au palais même il y a deux politiques inconciliables, deux groupes de partisans qui s'affrontent à coups d'arguments, de ruses et de cachotteries. Les uns, se réclamant de Sa Majesté,
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