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Les sorciers du ciel

Les sorciers du ciel

Titel: Les sorciers du ciel
Autoren: Christian Bernadac
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auxquels on dénie parfois toute valeur humaine. D’autres aux mains propres et au col immaculé se font saluer « cher maître », se pavoisent de rosettes et s’encadrent de publicité. Eux resteront comme ouvriers, inconnus même de leur femme et de leurs gosses, de leurs amis, parce qu’ils ne sont virtuoses que de la matière, comme si ce travail ne conférait pas une noblesse, comme s’il n’était pas, lui aussi, création et parfois œuvre de génie.
     
    Il faut avoir vécu cela pour comprendre que Dieu s’est fait charpentier.

Annexe V
    Défendre l’homme (258)
     
    Au moment où nous commençons à penser, déjà, au 25 e  anniversaire de la libération des camps, essayons ensemble aujourd’hui d’abord de nous rappeler, de nous rappeler non pas le détail des faits, des événements que nous avons vécus, mais plus profondément comment nous sommes devenus plus hommes au cœur même de cette entreprise de déshumanisation que le régime nazi voulait nous faire subir.
    Rappelle-toi…
    Il me semble tout d’abord qu’au-delà des particularismes, nous avons tous été amenés à découvrir l’homme. Était-il blond, était-il brun   ? Avait-il des cheveux blancs   ?
    Il était rasé.
    Dans la vie courante, était-il un officier   ? Portait-il un uniforme quel qu’il soit   ? Était-il un intellectuel   ? un ouvrier   ?
    On l’avait mis nu, puis vêtu d’un pyjama rayé.
    Ce qui, dans la vie courante, classait, étiquetait, semblait justifier les honneurs ou les considérations, tout cela avait disparu et l’on en était arrivé à ne pouvoir découvrir que l’homme avec une intelligence, un cœur, une générosité, un idéal, et c’était souvent indépendant de sa situation sociale antérieure.
    Les frontières elles-mêmes avaient sauté   : 19 nationalités dans ce camp de Buchenwald, des hommes de toute l’Europe, qu’ils soient de l’Est ou de l’Ouest   ; qu’ils aient sur leur triangle rouge un F, un D, un R, un I, que sais-je encore   ; chacun était pour l’autre un frère de misère, un compagnon de lutte.
    J’ai découvert dans cette ambiance internationale une richesse, une valeur qui font que, maintenant encore, je me sens un peu à l’étroit lorsque je ne me retrouve qu’avec des Français. Nous avons ainsi découvert que ce qui fait la valeur des hommes, ce n’est rien de ce qui est visible, c’est la qualité profonde de son être. Nous avons découvert qu’au-delà des frontières, il y a des valeurs communes qui peuvent rassembler des hommes et je peux dire que le chrétien que je suis a expérimenté pour la première fois dans sa vie, douloureusement mais concrètement, ce qu’est l’universalité, la catholicité.
    Or, 25 ans après, qu’avons-nous fait de ces valeurs essentielles, que sont-elles devenues dans le monde d’aujourd’hui   ?
    J’ai, comme beaucoup sans doute, la tentation de classer à nouveau les hommes   : ceux qui pensent comme moi et ceux qui ne pensent pas comme moi. C’est si facile et rassurant, peut-être, l’effort de sympathie, de compréhension, cette tentation de l’âge, de la fatigue et de l’égoïsme humain qui pousse à fermer sa porte, ses volets, à tirer les rideaux et finalement à fermer son esprit et son cœur. Et puis, tant d’autres problèmes travaillent le monde d’aujourd’hui que ce soit la Grèce, le Vietnam, le Biafra. Cette poussée de nationalisme un peu partout dans le monde, ces inscriptions racistes, antisémites qui fleurissent à nouveau dans le métro. Ce fait divers   : dans un accident de circulation, trois Portugais sont morts et tout le monde, les témoins, la police, puis la justice disant, unanimes au chauffeur du camion   : « Mais pourquoi vous en faites-vous tant, ce ne sont que trois Portugais. »
    Et puis derrière tout cela, les pays riches et les pays pauvres, ceux qui s’enrichissent toujours plus et ceux qui s’appauvrissent toujours plus.
    Alors   ?
    Alors, il y a le risque de se faire critiquer parce que, prendre position sur le Vietnam, le Biafra, tous ces points chauds du globe d’aujourd’hui, ce serait faire de la politique. Mais je ne peux pas ne pas penser que derrière ces problèmes et ces conflits, il y a des hommes, des femmes, des enfants comme il y a 25 ans   ; et si nous ne sommes pas aujourd’hui dans un point chaud, la fidélité à ce que nous avons vécu nous impose de ne pas nous asseoir tranquillement au coin du feu et de
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