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Le Roman des Rois

Le Roman des Rois

Titel: Le Roman des Rois
Autoren: Max Gallo
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leurs remords et de leur impuissance, et juré que Louis VII le Jeune n’avait donné aucun ordre de cette sorte à ses gens d’armes.

    Mais qui peut retenir un chien enragé ? Or les hommes de guerre ont la bave aux lèvres.
    Mais alors, pourquoi le Seigneur laisse-t-Il Satan guider la peur des hommes ?
    J’ai retrouvé cette question angoissée sous la plume de Bernard de Clairvaux. Il écrit à Louis VII – j’ai copie de sa lettre :
    « La clameur des pauvres, et le gémissement des prisonniers, et le sang des tués montent jusqu’aux oreilles du Père des orphelins et du Protecteur des veuves… Ne faites pas de vains efforts pour trouver dans le comte Thibaud une excuse à vos péchés… Vous n’acceptez pas ces propos de paix, vous ne tenez pas vos promesses, vous refusez les sages conseils… Je vous le dis, révolté devant les excès que vous ne cessez de renouveler quotidiennement, je commence à me repentir de la folie qui m’a poussé à vous être favorable durant votre jeunesse, et suis décidé désormais, selon mes faibles moyens, à ne plus agir que pour la vérité… Vous êtes le complice de ceux qui tuent les hommes, qui incendient les maisons, qui détruisent les églises, qui chassent les pauvres, qui volent et qui pillent… »
    3.
    La voix de Bernard de Clairvaux a traversé le temps. Comme une flèche divine, elle perce les années écoulées, et les accusations qu’elle porte contre le roi Louis VII m’atteignent aussi, puisque les hommes de ma lignée étaient aux côtés du roi à Vitry-en-Perthois et dans tous ces villages de Champagne réduits en cendres.
    Les églises n’étaient plus dressées vers le ciel, mais formaient des amas de pierres noircies.
    Si bien qu’en cette année 1145, le fief du comte Thibaud était un corps lacéré saignant par mille plaies.
    Alors Martin et Eudes de Thorenc, et aussi Suger, abbé de Saint-Denis, ont supplié le roi d’écouter la voix de Bernard de Clairvaux et de mettre fin à cette guerre.
    Et le roi Louis VII et le comte Thibaud de Champagne ont prié, agenouillés épaule contre épaule, dans l’abbatiale de Saint-Denis illuminée par tant de cierges qu’il semblait que la nef était emplie d’étoiles scintillantes.
    La foule des croyants misérables, enchantée par la splendeur de l’abbaye, chantait avec une ferveur émerveillée.
    Et la paix fut conclue.

    Les hommes ont-ils besoin de la haine et de la souffrance pour trouver le chemin de l’amour et de la fraternité ?
    Peut-être était-ce pour cela que Dieu, un temps, les abandonnait à Satan ?
    Et comme si Dieu avait voulu distinguer Bernard de Clairvaux, Bernard Paganelli, un moine de son ordre, devenu abbé de l’une des filles de Clairvaux, l’abbaye Saint-Vincent-et-Sainte-Anastase, à Rome, fut élu pape sous le nom d’Eugène III.

    Peu après, le royaume de France a été parcouru par des chevaliers qui arrivaient de Terre sainte. Parmi eux, beaucoup appartenaient à l’ordre du Temple, et Martin de Thorenc les accueillit, écouta leurs plaintes angoissées.
    Les villes franques, disaient-ils, étaient assiégées par une nuée d’Infidèles ; Édesse était tombée entre leurs mains, Antioche et Jérusalem menacées. Le tombeau du Christ allait être à nouveau souillé.
    Les chevaliers du Temple s’étaient arrêtés à Rome, avaient averti Eugène III des périls qui menaçaient la Terre sainte, et le souverain pontife s’apprêtait à lancer un appel à la croisade.

    J’ai devant moi, sur mon écritoire, les exhortations du pape et celles de ses messagers, puis les appels de Louis VII afin que se réunisse à Bourges une assemblée des Grands du royaume de France, ses vassaux.
    Je sais qu’elle s’est réunie, que Louis VII y a fait serment de prendre la tête d’une armée qui partirait en croisade afin de desserrer le licol qui étranglait les chrétiens de Terre sainte.
    Mais je ne vois, prêts à suivre le roi, que mes aïeux Martin et Eudes de Thorenc.
    Les autres vassaux de Louis VII se sont enfuis : couards, habiles, jouisseurs, prudents, ils préféraient leurs draps de soie, leurs épouses ou leurs concubines, plutôt que les vents de sable de Terre sainte et les flèches des Infidèles.
    Il fallait vaincre cette couardise, cet esprit de jouissance. Au mois de mars 1146, Bernard de Clairvaux a obéi à Eugène III et a commencé à prêcher la croisade, appelant tous les fidèles à se rendre à Vézelay, cette
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