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La reine de Saba

La reine de Saba

Titel: La reine de Saba
Autoren: Halter,Marek
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j’aime.
    Les
servantes pouffèrent. Kirisha, émue, caressa la joue humide de l’enfant.
    — Tu
seras plus belle que moi quand tu seras grande.
    — Sûrement.
Si Almaqah le veut bien. Kirisha approuva d’un battement de cils.
    — Viens
dans le bain avec moi, ordonna brutalement Makéda.
    Kirisha
protesta. Sans grande conviction. La fille d’Akébo n’allait pas céder et son
rôle de gouvernante était aussi de lui obéir.
    Makéda ne
la quitta pas des yeux tandis qu’elle se mettait nue et entrait dans l’eau.
    Quand elle
s’y fut installée, les perles d’eau glissant sur sa poitrine sombre, Makéda
chantonna :
     
    Nous
avons une sœur petite, une fille du désert qui se réveille dans l’encens.
    Nous
avons une sœur petite, et sans seins, qu’allons-nous faire d’elle ?
     
    Kirisha
éclata de rire et l’éclaboussa.
    — Dis-moi
la vérité : d’où te viennent ces chansons ? Ce n’est pas possible que
tu inventes cela toute seule !
    — Et
pourquoi ?
    Le sérieux
de Makéda troubla Kirisha.
    — C’est
vrai, dit encore Makéda. Un jour, je serai aussi belle que toi. J’en suis sûre.
Pas plus belle. Mais pareille.
    — Plus
belle, je le sais.
    — Tu
ne dois pas croire que je dis ça parce que je suis jalouse. Sûrement pas. Je
t’aime. Après mon père, c’est toi que j’aime le plus.
    Kirisha
resta coite, les sourcils froncés, le sourire figé et incertain.
    Sans crier
gare, Makéda replongea dans la vasque. Cette fois, ce n’était pas pour faire la
morte. Sous l’eau, elle vint s’agripper à Kirisha. Elle resurgit à la surface
en l’enlaçant. Elle posa sa tête ruisselante sur la rondeur de l’épaule, lui
embrassa les joues, le cou et la poitrine avec une fougue violente et rieuse.
Kirisha entra dans le jeu et lui rendit ses baisers. Un instant leurs rires,
accompagnés des gloussements des servantes, résonnèrent contre les voûtes des
thermes tandis que l’eau inondait les dalles de la salle.
    Quand
elles se furent apaisées, se tenant toujours enlacées, Makéda murmura en
reprenant son souffle :
    — Ces
dernières nuits, ma mère est venue me visiter dans mon sommeil. Elle vient me
préparer pour la cérémonie du grand temple, après après-demain. Je dois y être
parfaite.
    Kirisha
approuva d’une caresse.
    — Tu
le seras. Et mon seigneur Akébo le sera aussi. Il tranchera la tête du taureau
d’un seul coup de lame.
    Elles se
turent, observant les servantes qui s’affairaient, préparant les huiles et les
linges propres. Peut-être imaginaient-elles la tête du taureau furieux qui
roulait dans la poussière de l’enceinte d’Almaqah.
    Makéda
brisa le silence.
    — Ma
mère était belle comme toi.
    Ce n’était
pas une question, cependant Kirisha la corrigea.
    — Plus
belle. Aucune autre femme n’a été aussi belle que la reine Bilqîs.
    — Non.
Belle exactement comme toi. Je le sais.
    — Et
comment le saurais-tu ?
    Kirisha
s’en voulut aussitôt de ces mots. C’était comme si elle avait dit :
« Toi qui ne l’as jamais vue, qui es née de son ventre mort ? »
D’une voix plus douce, posant ses lèvres sur la tempe de Makéda, elle
ajouta :
    — Toi
seule, sa fille, pourras être aussi belle qu’elle.
    — Tu
te trompes. Je sais comment elle est, puisque je la vois toutes les nuits
depuis une lune. Elle a la même peau blanche que toi, la peau des femmes du
Nord. Et je sais aussi qu’elle t’aime autant que je t’aime.
    Cette
fois, Kirisha préféra se taire. Makéda lui fit face.
    — Tu
n’as pas à être modeste, Kirisha. Et rien à craindre. Ma mère sait que tu vas
dans le lit de mon père et elle ne t’en veut pas.
    Il y eut
brusquement un grand silence dans la salle. On n’entendit plus que le clapotis
de l’eau sous la paume de Makéda. Elle reprit :
    — Moi
aussi, bien sûr, je le sais. Et depuis longtemps. Tu vois, ça ne m’empêche pas
de t’aimer. Même, si mon père voulait te prendre pour épouse, je serais très
contente.
    À nouveau
le silence se posa sur l’eau du bain. Le visage de Kirisha était tendu. Sa peau
nue se fripait et durcissait comme si le bain était soudain devenu glacé.
    — Mais
il ne le fera jamais, n’est-ce pas ? poursuivit Makéda.
    Il y avait
assez de tristesse dans sa voix pour que Kirisha admette sans détour :
    — Il
a promis qu’il n’aurait jamais d’autre épouse que Bilqîs.
    — Et
il est trop têtu pour ne pas accomplir une
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