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La grande guerre chimique : 1914-1918

La grande guerre chimique : 1914-1918

Titel: La grande guerre chimique : 1914-1918
Autoren: Olivier Lepick
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d’un
conflit mais, dans le cas de la Grande Guerre, ces innovations furent, pendant
la durée même des hostilités, l’un des enjeux majeurs de la guerre. L’évolution,
au cours des hostilités, de la dimension chimique revêt une grande valeur
heuristique témoignant aujourd’hui encore de la véritable guerre scientifique à
laquelle les belligérants se livrèrent entre 1915 et 1918. Il est probable.
que, mieux utilisés, notamment en avril 1915 et en juillet 1917, les
gaz auraient pu infléchir le cours de la guerre. Il apparaît que les
belligérants, et particulièrement les militaires allemands puisque ces derniers
ont détenu, à au moins deux reprises, une initiative chimique décisive, ont
négligé le rôle de la surprise dans la tactique de la guerre chimique.
Cependant, nous l’avons également constaté, l’échec ne fut pas seulement
tactique, il fut également scientifique.
    Étrangement, au moment de l’armistice, les stratèges des
armées belligérantes restaient convaincus que les armes chimiques offraient des
perspectives intéressantes. « Si on pouvait obtenir la surprise et la
concentration requises sur des objectifs appropriés, les gaz pouvaient offrir
de brillantes opportunités » [807] ,
écrivait le brigadier Hartley en 1919. Paradoxalement, et alors que l’arme
chimique n’avait pas permis de succès tactiques réellement décisifs, elle
apparaissait néanmoins, au même titre que l’avion, le char ou le sous-marin,
comme une arme du futur… Quelques années après la fin de la guerre, le
Committee on Chemical Warfare Organisation (The Holland Committe), institué en
Grande-Bretagne pour tirer les enseignements de la guerre chimique, notait dans
les conclusions de son rapport : « Dans la mesure où jamais une arme
efficace ne fut abandonnée par des nations luttant pour leur survie, la
commission ne se fait aucune illusion sur le fait que les gaz seront sans aucun
doute utilisés dans les futurs conflits. » De fait, ni la France, ni la
Grande-Bretagne, ni même l’Allemagne, n’abandonnèrent les recherches chimiques
militaires.
    On ne dispose pas de données qui permettent d’évaluer l’impact
psychologique de l’arme chimique pendant la Grande Guerre. Certains auteurs se
sont essayés à cet exercice mais d’une manière, me semble-t-il, peu concluante.
Nous l’avons déjà évoqué, les combats de la Première Guerre mondiale
occasionnèrent un grand nombre de pathologies aussi hétérogènes qu’inédites,
dites neuropsychologiques, qui laissaient les hommes les plus gravement
atteints dans des états parfois végétatifs déroutants, comme brisés
psychologiquement par la guerre, incapables de supporter le bruit le plus
faible. Ces pathologies étaient causées principalement par les bombardements
massifs et les combats prolongés. Il est difficile d’évaluer la part du stress
occasionnée par les gaz dans l’occurrence de ces blessures certes moins
sanglantes et moins spectaculaires que les traumatismes « classiques »,
mais souvent indélébiles. De fait, les armes chimiques possédaient un pouvoir d’usure
psychologique exceptionnel. En au moins cinq occasions, des attaques chimiques
provoquèrent des paniques généralisées de grande envergure au cours desquelles
des unités entières abandonnèrent leur poste de combat pour se ruer en masse
vers les arrières. Ce facteur est particulièrement frappant au regard des
conditions pourtant extraordinairement difficiles et même infernales auxquelles
les combattants de la Grande Guerre étaient soumis (bombardements incessants,
froid, soif, fatigue) et auxquelles ils résistaient avec un courage et une
abnégation qui semblent aujourd’hui stupéfiants. Seuls les gaz parvinrent à
provoquer des phénomènes de panique d’une telle ampleur. Il y a là une
spécificité et une dimension qu’il convient de ne pas occulter lorsqu’il s’agit
de dresser le bilan militaire de l’utilisation des gaz au cours de la Première
Guerre mondiale.
    En définitive, il est difficile de cerner ce que fut
véritablement l’arme chimique sur les champs éventrés de la Grande Guerre au
travers de graphes ou de bilans chiffrés, par ailleurs fort utiles. Comme on l’évoquait
dans l’introduction, l’arme chimique n’est assurément pas une arme comme les
autres. Un médecin militaire britannique qui avait servi pendant la Grande
Guerre notait, plus de vingt années après la guerre : « C’est
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