Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La complainte de l'ange noir

La complainte de l'ange noir

Titel: La complainte de l'ange noir
Autoren: Paul C. Doherty
Vom Netzwerk:
principal. Ils longèrent un couloir voûté, humant les effluves alléchants qui s’échappaient des cuisines proches, bourdonnantes d’activité, et qui ravivèrent leur fringale. Enfin ils pénétrèrent dans le solar {2} où les attendaient Sir Simon Gurney et son épouse Alice.
    Le vieux chevalier aux cheveux grisonnants, ancien compagnon d’armes d’Édouard I er , était assis près de l’âtre. Il se leva à leur entrée, un sourire de bienvenue aux lèvres, imité par sa femme, petite et mince, dont la joie éclairait le doux visage.
    — Hugh ! Hugh !
    Gurney emprisonna la main de Corbett dans les siennes en scrutant la physionomie sombre et tourmentée du magistrat. Il remarqua les quelques cheveux gris aux tempes et vit, autour de la bouche et des paupières tombantes, des rides qui n’existaient pas lors de leur dernière rencontre à Westminster.
    — Vous avez l’air fatigué, Hugh.
    — Ce fut une rude journée, Sir Simon. Froide et pénible. J’ai fait des voyages plus agréables.
    Corbett observa les traits burinés du chevalier, sa moustache et sa barbe bien taillées et ses sourcils blancs broussailleux au-dessus d’yeux qui avaient conservé la vivacité de la jeunesse.
    — Le roi regrette que vous ne soyez pas à ses côtés, reprit Corbett. Il vous salue, vous et Lady Alice, continua-t-il en se tournant vers la dame.
    Celle-ci, qui avait, au bas mot, vingt ans de moins que son époux, s’avança vers lui en tendant une main délicate. Corbett l’effleura des lèvres, mais ressentit quelque embarras lorsque la dame lui prit la main et la pressa un peu trop fort.
    — Vous n’avez pas changé, Hugh ! déclara-t-elle d’une voix profonde et légèrement voilée.
    Corbett surprit une lueur de malice dans ses yeux foncés. « Tout en elle est perfection », pensa-t-il en détaillant les charmes de Lady Alice : les lèvres pleines, la bouche généreuse, le petit nez au dessin délicat, les sourcils nettement épilés et l’abondante chevelure châtaine retenue, pour l’heure, par une guimpe vert et blanc.
    — Madame, vous aimez toujours à plaisanter, chuchota-t-il en espérant que Gurney ne s’en offenserait pas.
    Lady Alice se montrait, chaque fois, très prévenante à son égard, et lui que la présence de jolies femmes rendait généralement muet se sentait tiraillé entre l’embarras et le plaisir. Ranulf-atte-Newgate ne nourrissait guère ce genre de scrupules. Après que Gurney lui eut serré la main en lui décochant quelques insultes affectueuses, déclarant, par exemple, qu’il avait toujours la même gueule de pendard, le serviteur de Corbett tomba à genoux devant Lady Alice et lui embrassa si longuement la main que la dame, riant aux éclats, dut la lui retirer pour aller se rasseoir près de la cheminée.
    — Oui, rien ne change ! proféra sèchement Gurney. Vous, Corbett, avez gardé la timidité d’un enfant quand vous êtes en compagnie et toi, Ranulf, l’insolence d’un bateleur.
    Le chevalier plaça deux chaises entre la sienne et celle de son épouse.
    — Allez ! Ôtez vos capes !
    Il les tendit à un serviteur. Corbett et Ranulf défirent leurs baudriers et les suspendirent soigneusement à une cheville dans le mur.
    Puis ils s’installèrent confortablement près de l’âtre où se consumaient de grosses bûches et étendirent leurs longues jambes pour mieux profiter de la vive chaleur.
    On leur apporta du posset {3} dans des gobelets en étain entourés de linges blancs, car le vin, une fois épicé, avait été chauffé avec un bout de fer rougi. Corbett le sirota, savourant chaque goutte, pendant que son corps et ses jambes retrouvaient peu à peu leur souplesse. La chaleur l’engourdissait, mais il luttait contre le sommeil pour ne pas désobliger ses hôtes. Tandis que Ranulf exprimait son bien-être par de bruyants claquements de langue, le clerc promena son regard sur la salle qui s’assombrissait. Les tentures en laine ou en damas, pendues aux murs, le verre – coloré parfois – garnissant les fenêtres, les candélabres et leurs bougies de cire vierge – pas de chandelles de suif, ni de grossières lampes à huile ici –, tout respirait l’opulence. Corbett tâta le grain de sa chaise sculptée : du chêne ou de l’if, comme les autres sièges et les buffets. Quant au sol, il était recouvert de grands et de petits tapis en pure laine. Un page accourut pour lui ôter ses bottes. Corbett contempla le blason des
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher