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De Gaulle Intime : Un Aide De Camp Raconte. Mémoires

De Gaulle Intime : Un Aide De Camp Raconte. Mémoires

Titel: De Gaulle Intime : Un Aide De Camp Raconte. Mémoires
Autoren: François Flohic
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l’égard de ses concitoyens quoi qu’ils aient pu faire. Et cela me ramène de nouveau à Pétain. Un jour, en Irlande, il évoque longuement le cas du Maréchal, comme s’il voulait me mettre à même de témoigner de ses sentiments à l’égard de celui qui fut, par trois fois, son chef. Il m’en a déjà parlé en 1967, après avoir lu l’ouvrage de Pierre Bourget, Un certain Philippe Pétain [3] .
    — Dans l’ensemble, l’auteur a assez bien vu la personnalité qu’il dépeint, à l’exception de deux traits qu’il n’a pas suffisamment mis en lumière, me dit-il. Le premier est l’énorme ambition de Pétain, et ceci dès avant 1914 ; ambition dans le bon sens du terme. Elle ne se manifestait pas par de l’arrivisme car il n’hésitait pas à porter des nasardes à ses supérieurs. Il avait d’ailleurs le sentiment justifié de son succès obligé car il se sentait, et de loin, le meilleur. Le second se rapporte à son apparence ; il se dégageait de sa personne une extraordinaire impression de dignité et même de majesté ; elle agissait et il en jouait comme d’un charme sur son entourage, en particulier sur les femmes auxquelles il ne manquait pas de porter attention.
    Il me rappelle ensuite sa position lorsque les partisans de Pétain firent campagne pour le transfert de ses restes au cimetière militaire à Douaumont au milieu de ses soldats. Il ne s’agissait pas, pour eux, de défendre la mémoire du Maréchal. Il s’agissait, pour eux, de s’opposer au Général en le mettant en difficulté, puisque après la mort de Pétain en 1951, ils n’avaient présenté aucune requête dans ce sens. Et de me préciser :
    — Cela ne pouvait se faire : seuls les morts au combat sont inhumés dans un cimetière militaire. Je n’avais donc pas à m’opposer à ce que ses restes soient transférés au cimetière de Douaumont. Voyez-vous, Flohic, Pétain est mort pour moi en 1925, quand il accepta de remplacer au pied levé le maréchal Lyautey – celui-ci n’avait pas été prévenu – comme résident général au Maroc. La République s’est mal conduite avec Lyautey. Elle le fit rentrer en France en paquebot. Les Anglais, eux, au passage de Gibraltar, firent défiler leur flotte en l’honneur de celui qui a commencé de tirer le Maroc du Moyen Âge.
    Charles de Gaulle ajoute :
    — C’est la sénilité qui s’est emparée de Pétain. Il considérait que tout lui était dû : son ambassade en Espagne, un siège à l’Académie française, etc. C’est la sénilité qui a gouverné son comportement à Vichy.
    Et encore une fois, il me dit :
    — Flohic, la vieillesse est un naufrage. À la Libération, je lui ai proposé de rester en Suisse pour éviter à la nation le pénible de son procès. Il ne l’a pas voulu. C’est à son honneur d’être rentré en France pour être jugé. Le verdict a été ce qu’il est. Si j’étais resté aux Affaires, je l’aurais élargi une fois les passions retombées et assigné à résidence dans sa propriété de Villeneuve-Loubet. Quoi qu’on ait pu dire de lui, c’était vraiment un monsieur.
    Sa mansuétude s’est également exprimée envers le général putschiste Challe. Il me dit :
    — Dans cette affaire, tout le monde est convaincu d’avoir raison. Moi aussi, j’ai désobéi en 1940, mais j’ai ramené la France à la table des vainqueurs. Ce pauvre Challe qui voulait conserver l’Algérie à la France !
    Sa « désobéissance » en juin 1940 peut, toutefois, être nuancée. Nommé le 5 juin secrétaire d’État à la Défense nationale et à la Guerre, dans le gouvernement de Paul Reynaud, de Gaulle, général de brigade à titre temporaire, échappe à la stricte hiérarchie militaire. D’ailleurs, en tant que ministre, ne commande-t-il pas aux généraux des armées ? En demandant, dans son appel du 18 Juin, de poursuivre le combat, il ne fait qu’exercer une prérogative de l’homme politique, sinon de l’homme d’État. C’est la carence des dirigeants d’alors qui l’amène à lancer son « Appel ».
    Mansuétude, encore, cette fois à propos de Darlan. J’avais noté dans ses Mémoires de guerre [4] , pour m’en étonner, ce qu’il écrit sur l’amiral Darlan. Celui-ci, vice-président du Conseil à Vichy, et ministre des Affaires étrangères, tout en gardant la Marine, est, à mon avis, le collaborateur qui se révélera, pour les Allemands, le plus indéfectible et, pour nous, le
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