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Catherine et le temps d'aimer

Catherine et le temps d'aimer

Titel: Catherine et le temps d'aimer
Autoren: Juliette Benzoni
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Personnellement, je ne me risquerais pas à le lui demander. Elle est... disons d'un caractère peu maniable ! C'est une très grande dame apparemment.
    — Vous n'avez pourtant pas l'air facile à impressionner, ma sœur, remarqua Catherine. Mais si cette dame vous fait peur, je me chargerai volontiers de la commission.
    — Ce n'est pas que j'en aie peur, fit sœur Léonarde. C'est que j'ai horreur des cris, notre Mère Supérieure aussi. Et Notre Seigneur a doué cette dame d'une voix terrifiante !
    Tout en parlant, le brancard, suivi de Catherine, avait franchi la petite porte basse qui donnait accès à la maison des dames hospitalières. Les quelques autres femmes du pèlerinage vinrent ensuite. On se retrouva dans une immense cuisine lourdement dallée de grandes pierres plates, où l'odeur de bois brûlé se mêlait à celle du lait aigre. Des chapelets d'oignons, des pièces de viandes fumées pendaient aux voûtes basses et noires. Des fromages séchaient sur des claies d'osier et, devant la gigantesque cheminée, deux sœurs converses, les manches retroussées, s'occupaient activement d'une grande marmite noire où cuisait une épaisse soupe aux choux.
    On déposa le brancard devant le feu et sœur Léonarde se pencha sur la malade.
    — Elle est bien pâle ! dit-elle. Je vais lui donner un cordial ; pendant ce temps, on lui préparera un lit...
    — Dites-moi où se trouve cette dame, fit Catherine qui tenait à son idée, je lui parlerai... Je suis, moi aussi, une noble dame.
    Sœur Léonarde, cette fois, ne put s'empêcher de rire.
    — Je le savais déjà ! fit-elle. Rien qu'à votre obstination. Je vais lui parler moi-même... mais je sais d'avance la réponse. Occupez-vous de cette malheureuse !
    L'hospitalière s'éloigna vers le fond de la pièce. Catherine commença par se pencher sur Gillette qui, peu à peu, reprenait connaissance, mais elle se ravisa et fit trois pas dans la direction suivie par sœur Léonarde. Elle hésitait à laisser Gillette quand l'une des femmes s'approcha d'elle.
    — Je vais veiller sur notre compagne, dit-elle. Allez donc vous occuper de ça.
    Catherine sourit en remerciement et se lança sur la trace de la religieuse. Elle l'aperçut devant elle, longeant un couloir glacial et humide au bout duquel elle frappa à une porte avant de disparaître.
    Apparemment, la dame à la jambe cassée avait en effet une voix vigoureuse car, lorsque Catherine s'arrêta à son tour devant la porte, elle l'entendit rugir.
    — J'ai besoin des soins de mes femmes, ma sœur ! Vous ne voudriez pas que je les envoie dans la salle, à l'autre bout du bâtiment
    ? Que diable, un lit est toujours un lit, qu'il se trouve dans une chambre ou dans une autre !
    Sœur Léonarde répondit quelque chose que Catherine n'entendit pas, peut-être parce qu'elle était occupée à se demander où elle avait déjà entendu cette voix qui lui paraissait tout à coup étrangement familière... et qui, maintenant, jurait fort convenablement.
    — Corbleu, ma sœur ! C'est pourtant clair : je garde mes chambres.
    Une impulsion dont elle ne fut pas maîtresse jeta Catherine en avant. Elle ouvrit la porte, entra dans la pièce, à vrai dire petite et basse, où un grand lit à rideaux déteints et une cheminée conique tenaient à peu près tout l'espace. Mais, le seuil franchi, elle se figea sur place, stupéfaite...

    Assise dans le lit, étayée par une foule d'oreillers, une grande et forte femme faisait face à sœur Léonarde qui, par comparaison avec l'imposante personne, n'avait plus la moindre apparence. Les épais cheveux blancs de la dame montraient encore quelques mèches rousses et son teint, avivé par la colère, était du plus beau rouge brique. Des couvertures s'empilaient sur elle. Une sorte de dalmatique rouge doublée de renard lui couvrait les épaules, mais une admirable main blanche, tendue vers la sœur en un geste de menace, sortait des larges manches.
    Le grincement de la porte, en s'ouvrant, avait détourné l'attention de la dame qui, devinant une silhouette féminine dans l'ombre du seuil, tourna vers elle sa fureur.
    — Ah ! çà, mais on entre chez moi comme dans un moulin ! Qui est celle-là ?
    Presque étranglée par l'émotion, partagée entre l'envie de rire et l'envie de pleurer, Catherine avança jusqu'à ce que le reflet des flammes l'enveloppât.
    — Ce n'est que moi, dame Ermengarde ! M'avez- vous donc oubliée ? La stupeur pétrifia instantanément sur place la
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