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Catherine et le temps d'aimer

Catherine et le temps d'aimer

Titel: Catherine et le temps d'aimer
Autoren: Juliette Benzoni
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voisin.
    — Pourquoi se fâche-t-il ? demanda-t-elle. Lui avez- vous dit quelque chose de désagréable ?
    Josse éclata de rire, fit un clin d'œil à la jeune femme et remonta allègrement sa besace sur son épaule.
    — Si vous voulez être bien avec l'excellent Colin, chuchota-t-il, évitez surtout de lui parler des femmes en général et de la sienne en particulier.
    — Pourquoi donc ?
    Parce que c'est la plus affreuse harpie que le Diable ait jamais jetée sur la terre et que, si notre digne ami, qui n'a rien d'un chevalier errant ni d'un paladin, s'est jeté dans les aventures du pèlerinage, c'est uniquement pour lui échapper. Il a tout : santé, fortune, respectabilité.
    Malheureusement, il a aussi dame Aubierge et, pour vivre loin d'elle, je le crois capable d'aller jusque chez le Soudan d'Egypte ! Je suis sûr qu'entre les fers de l'esclave et son fauteuil de la rue des Haudriettes il préférerait les fers !
    — C'est à ce point ? s'écria Catherine effarée. Est-ce qu'elle le dispute tellement ?
    — Pis encore ! fit Josse d'un ton tragique. Elle le bat comme plâtre
    !
    Cela dit et comme, en tête, Gerbert Bohat entamait un cantique pour rythmer la marche, Josse se mit à fredonner une chanson à boire qui avait le mérite d'être infiniment plus guillerette.

    On fit en deux jours la difficile route qui, par la vallée du Lot et les étroites gorges du Dourdou, menait d'Aubrac à la sainte cité de Conques. Vingt grandes lieues coupées seulement par une brève nuit à Espalion, dans l'ancienne commanderie des chevaliers du Temple où d'autres moines-soldats, les hospitaliers de Saint- Jean de Jérusalem, firent de leur mieux pour réconforter les pèlerins. Gerbert Bohat semblait possédé d'une sorte de rage et ne voulait entendre ni les plaintes ni les soupirs de sa troupe.
    Pour Catherine, ces deux jours avaient été une espèce d'enfer. Son pied blessé la faisait cruellement souffrir, mais elle avait, toujours aussi obstinément, refusé de monter à cheval. Il lui semblait que, si elle n'accomplissait pas, comme les plus démunis des pèlerins, ce voyage en forme de pénitence, Dieu ne se laisserait pas fléchir. Et ses souffrances, elle les offrait pour Arnaud, pour que le Seigneur lui accordât la guérison et lui permît, à elle-même, de le retrouver. Pour ce bonheur-là, elle eût marché avec joie sur des charbons ardents...
    Néanmoins, sans le secours d'un vieux chevalier de Saint-Jean qui, pris de pitié devant ces pieds menus,
    boursouflés d'ampoules et déjà sanglants, au moment du rituel lavement des pieds que les moines à genoux accomplissaient pour les pèlerins, l'avait soignée, Catherine eût été contrainte d'arrêter là son voyage ou de se faire transporter. Le moine-soldat avait enduit les pieds blessés d'un onguent fait de suif de chandelle, d'huile d'olive et d'esprit de vin qui avait fait merveille.
    — C'est une vieille recette de cavalier, avait-il confié à la jeune femme en souriant. Les jeunes de nos ordres militaires, qui ont encore la peau des cuisses et le séant trop tendre pour les longues chevauchées, en font grande consommation.
    Il lui en avait même remis un peu, dans un petit pot, et le remède s'était révélé souverain. Malgré tout, quand le petit village, accroché avec son énorme abbaye aux pentes de l'étroit val d'Ouche, était apparu dans le soir, Catherine était au bord de l'évanouissement. Elle n'avait eu qu'un regard indifférent pour l'admirable basilique devant laquelle ses compagnons étaient tombés à genoux d'un même élan.
    — Vous êtes à bout de souffle ! avait maugréé Ermengarde. Aussi, n'essayez pas de suivre les autres à l'abbaye !... qui d'ailleurs est comble. Il y a ici, à ce que l'on m'a assuré, une bonne auberge, et j'ai l'intention de m'y rendre.

    Catherine avait hésité, craignant les paroles méprisantes de Gerbert, mais le chef des pèlerins s'était contenté de hausser les épaules.
    — Logez-vous où vous pourrez ! L'abbaye est déjà pleine et je ne sais trop où je vais mener ma troupe. Chacun s'arrangera comme il pourra, d'une grange ou de l'hospitalité d'un villageois. Faites donc à votre gré. Mais n'oubliez pas la messe solennelle, la procession que nous ferons ensuite et les différents offices.
    — À quelle heure partirons-nous donc ? demanda Catherine inquiète.
    — Après-demain seulement ! Vous ne semblez pas vous douter que c'est ici l'un des hauts lieux de la Foi, ma sœur.
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