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Avec Eux...

Avec Eux...

Titel: Avec Eux...
Autoren: Dominique Cantien
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parfois, je sentais venir le moment où c’était trop. Trop de gens, trop de décisions, trop de diplomatie… Je me suis toujours arrangée pour avoir un bureau avec une porte supplémentaire, une sortie de secours en quelque sorte. Quand les rendez-vous s’enchaînaient d’une manière effrayante, qu’il était impensable et impossible de les faire tenir dans un agenda normal, hélico ou pas, il arrivait un moment où j’atteignais mon seuil de tolérance. Chaque personne qui entrait dans mon bureau était persuadée qu’elle tenait le projet du siècle. Mais moi, j’avais déjà écouté la description argumentée de cent autres projets du siècle depuis le matin même ! Au cœur de cette frénésie, de ce maelström, il arrive un moment où l’on n’imprime plus, et, effectivement, je n’imprimais plus ! Ça n’était pas une fatigue du corps comme on peut en éprouver quand on court le marathon de New York. J’avais une fatigue psychologique, un épuisement artistique, j’avais juste envie d’écouter de la musique pour me calmer, et surtout j’avais envie d’aller faire un tourdehors, de redevenir anonyme et transparente dans la rue parisienne, donc j’avais prévu cette petite porte de sortie dans mon bureau. Comme un couloir dérobé dans le grand château de TF1, qui me permettait de m’enfuir en toute discrétion…
    Alors il m’arrivait, et on va sans doute appeler cela aussi un caprice de star, mais je l’assume totalement a posteriori , d’appeler Sabrina, mon assistante :
    â€“ Je suis partie !
    â€“ Mais qu’est-ce que je vais faire, qu’est-ce que je vais leur dire ? me répondait-elle avec affolement.
    Au fil du temps, elle a dû puiser des trésors de gentillesse et de diplomatie pour excuser mes absences. Cela m’a valu parfois d’avoir la réputation d’une personne qui ne tient pas ses engagements… Peut-être que, à travers ces lignes, je rétablis un peu de vérité : je ne pouvais plus tout simplement recevoir tous ces gens. Je préférais m’éclipser. Petite lâcheté, certes, mais surtout nécessité de survie…
    Je l’encourageais à inventer ce qu’elle voulait, à partager ce qui était possible avec mes collaborateurs les plus proches et à remettre le reste au lendemain, car je ne pouvais plus faire face. Mes interlocuteurs risquaient tout bonnement d’être confrontés à une loque humaine et je ne pouvais pas décemment me présenter comme ça. Une fois cette précaution prise, je descendais les onze étages par l’escalier quasi dérobé. Étrangement, j’ai été installée au onzième étage à Montparnasse, et comme dans la tour de TF1, c’était mon chiffre et mon étage. Je dévalais les escaliers jusqu’au sous-sol pour ne pas être vue. Ces escaliers que je connaissais par cœur. Parfois même, je pleurais sur les marches. Je m’asseyais par terre, entre deux étages, dans cet univers de béton morne et silencieux, comme j’aurais pu tout aussi bien crier sous lemétro aérien, comme j’aurais voulu avoir une salle de boxe à proximité pour taper et cogner sur un punching-ball, pour me libérer, parce que je saturais.
    Personne ne s’est rendu compte du volume de travail que l’on m’a confié, parce qu’on savait que j’adorais cela. Peut-être ne me suis-je pas suffisamment entourée, c’est ma faute, mais ceci n’est pas un livre pour faire mon mea culpa . J’ai néanmoins vécu l’impensable en termes d’heures de travail et d’obligation de résultat à cette période, même si c’était dans la joie, la bonne humeur, avec en corollaire l’argent et les stars, et aussi l’excitation, évidemment. Je n’ai pas à me plaindre, je dis seulement que je n’étais qu’une fille. Je n’étais pas Superwoman. Les paroles de Pierre Lescure, lorsque je travaillais à Canal Plus, résonnent encore en moi : « Dominique, ne reste jamais longtemps enfermée dans ton bureau, respire, regarde autour de toi dans la rue, va dans les marchés, fais des choses normales, parce que tu ne vas pas tenir. Attention, tu ne
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