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Au Fond Des Ténèbres

Au Fond Des Ténèbres

Titel: Au Fond Des Ténèbres
Autoren: Gitta Sereny
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procès ; le débat avait surtout porté sur l’affirmation de l’accusation selon laquelle il aurait participé avant l’Anschluss à la collecte en faveur des détenus nazis, ce qui aurait pesé lourd.
    Et qu’en était-il de ces versements que vous étiez supposé avoir fait au fonds de secours nazi ?
    « Eh bien, oui, j’avais versé. Au cours de la première semaine de mon transfert à la GID, le chef était venu un jour avec une jeune fille qu’il avait présentée à Werner et à moi comme quelqu’un qui quêtait pour les familles des prisonniers politiques. »
    Ludwig Werner, interrogé en 1968 en Autriche, peu de temps avant qu’il meure de mort naturelle, a été assez évasif sur le degré de son « amitié » avec Stangl et sur ce qu’il avait pu connaître de ses opinions et de ses actes. Lui-même, dit-il, avait été relevé de ses fonctions le 22 octobre 1939 et arrêté le 14 novembre sous l’inculpation d’avoir été un adversaire du parti nazi et d’avoir eu des relations financières avec un Juif qui avait été interné au camp de concentration de Sachsenhausen où il était resté jusqu’en avril 1941, date à laquelle sa famille et lui (on procédait ainsi avec les gens politiquement douteux) avaient été transférés d’office en Bohême. Il y travailla dans le civil jusqu’à sa mobilisation sur le front de l’Est en 1943. Il a été prisonnier de guerre en Russie de 1944 à 1948. Après quoi, il redevint officier de la CID à Leoben, Autriche, jusqu’à sa retraite en 1965. Il ne disait pas qu’il avait été un ami de Stangl mais il ne disait pas non plus qu’ils avaient été des ennemis. Il ne se rappelait pas avoir eu avec Stangl des conversations sur des sujets politiques. Il ne pouvait donc pas dire ce qu’avait été l’attitude de Stangl envers les nazis. « Tous tant que nous étions, cependant, dit-il, avions à l’époque, juste avant l’Anschluss, des sympathies pour le parti nazi. Je ne parle pas seulement des policiers qui assistaient à ces cours de formation, mais de la population en général.
    « Concernant le questionnaire, beaucoup de fonctionnaires, dit-il, ont forcé la note. Parce qu’on avait peur d’être limogé. » Oui, il se souvenait du Dr. Bruno Wille. « Il faisait partie d’un service juridique », dit-il laconiquement et il refusa d’en dire plus long. Quant au fonds d’aide, il ne pouvait dire si Stangl y avait versé. Il ne se rappelait même pas que ce fonds eût existé ; il était donc incapable de préciser s’il avait pour objet l’aide aux seuls détenus politiques nazis ou également aux détenus d’autres opinions.
    « Le jour où l’affaire a été réglée avec le Dr. Wille, poursuivit Stangl, je suis rentré chez moi terriblement soulagé, vous savez. Vous n’imaginez pas à quel point j’étais reconnaissant à Ludwig Werner d’avoir trouvé cette solution. En tout cas, à peine à la maison, j’ai tout raconté à ma femme : je croyais qu’elle serait aussi soulagée que moi. » Et soudain il se remit à pleurer, mais cette fois à gros sanglots, comme un homme qui se délivre d’une douleur longtemps contenue.
    Mais alors, qu’est-ce qu’elle a dit ?
    « Elle les haïssait, vous comprenez, reprit-il au bout d’un moment. Nous sommes catholiques bien sûr, et elle est très pieuse, l’a toujours été. Elle a été tellement fâchée, c’était terrible. « Tu m’as trahie pour ces cochons », m’a-t-elle dit, et je me suis rendu compte tout à coup qu’elle ne me croyait Pas. Elle croyait que j’avais été pour de bon un nazi illégal. Mon Dieu… » Il pleura un long moment.
    Avez-vous fini par la convaincre ?
    « Il m’a fallu du temps, beaucoup de temps. » Manifestement, il n’était pas sûr de l’avoir jamais convaincue.
    Il ne l’avait pas convaincue en effet. Le tribunal de Düsseldorf, trente ans après les événements, ne fut pas seul à mettre en doute les affirmations de Stangl sur sa non-appartenance au parti nazi illégal. Des mois après ma première rencontre avec Stangl, sa femme m’a répété au Brésil qu’elle ne l’avait pas cru elle-même.
    « Naturellement, je ne l’ai pas dit quand j’ai témoigné au procès. Ce n’était pas possible, dit-elle. Si mon mari ne vous avait pas parlé de ça lui-même, je ne l’aurais peut-être pas admis devant vous non plus. Mais puisqu’il vous en parlé – et dans ces termes – pour la
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