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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur
Autoren: Michel Zévaco
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succomber aux dagues des gens du château, le pauvre chevalier fut sérieusement menacé de mourir de faim et de soif. Il n’osait pas recommencer l’aventure de Dammartin.
    – Je n’aurais, songeait-il, qu’à tomber sur une hôtesse qui refuserait la boucle de mon chapeau. Je deviendrai ainsi une dette ambulante, et toutes les jolies filles de ce charmant pays diraient de moi : C’est la statue équestre de la Dette !
    Il riait avec lui-même. Il trottait avec cette joie profonde qu’on a lorsqu’on se trouve tout à coup débarrassé d’une idée funèbre. C’est à peine s’il pensait au formidable danger qu’il venait de courir et à ceux, plus formidables encore qui l’attendaient dans l’avenir avec des ennemis comme Isabeau, Jean de Bourgogne, Bernard d’Armagnac, sans compter l’innombrable menu fretin.
    Sa joie était double :
    D’abord, il ne devait plus rien à la reine Isabeau puisque Roselys avait été sauvée par Valentine. Donc, il se sentirait les coudées franches pour défendre Odette contre la haine de cette reine.
    Ensuite, il savait maintenant que Roselys était vivante.
    Et il se tourmentait l’esprit pour deviner dans quel but Saïtano lui avait dit que Roselys était morte, et que la reine Isabeau, l’ayant arrachée à l’ignominie de l’exposition, n’avait pu la sauver de la mort…
    Il résolut d’éclaircir ce point étrange et d’aller chez Saïtano. Puis, bientôt, toutes ces pensées se fondirent en une seule qui faisait trembler son cœur comme les premières caresses du soleil levant font trembler une fleur : Roselys vivait ! La duchesse lui avait promis de lui dire où et sous quel nom elle vivait !… Bientôt, donc, il reverrait l’amie de son enfance…
    Tout à coup, il arrêta net son cheval. Il pâlit. Un trouble étrange emplit son regard de lumière et de franchise, comme ces nuages noirs qui soudain projettent une ombre sur l’azur de la mer. Il songeait à Roselys… et c’était Odette qu’il voyait !
    Clairement, avec une aveuglante et terrible évidence, il vit qu’il aimait Odette ! Il se l’affirma pour la première fois. Et ce fut avec une sorte d’angoisse que, tout bas, il se murmura :
    – Roselys ?… Odette ?…
    Il nous faut répéter ici que le chevalier de Passavant n’était pas de ces subtils personnages qui se posent à eux-mêmes des problèmes d’âme, des cas de conscience épineux. Le pauvre chevalier n’était pas de force à lire dans son cœur et à prendre une détermination sur un pareil sujet. Mais il fut profondément malheureux de sentir qu’il adorait encore Roselys et qu’il aimait Odette.
    Ce fut là-dessus qu’il se mit à ruminer, marchant au pas. Il atteignit enfin Paris vers la chute du jour, et, heureusement, une autre préoccupation vint alors le tirer des palabres plus ou moins philosophiques qu’il essayait de se tenir avec sa bonne foi ordinaire.
    En effet son estomac se mit à crier famine, et à crier si fort qu’il fallait bien l’entendre. Passavant songea à l’heure merveilleuse qu’il avait passée sur le plateau du Voliard, près du feu, dévorant le dîner que lui avait laissé dans les fontes la bonne hôtesse de Dammartin. Il arriva à l’auberge de la Truie Pendue, entra sans bruit dans la cour, plaça son cheval à l’écurie sans prévenir personne, et lui qui se fut coupé le poignet plutôt que de dérober une maille, se fit tranquillement voleur pour son cheval : il alla au coffre à avoine, et emplit la mangeoire de la bête affamée.
    – Si maître Le Poingre me voyait ! songeait-il en souriant.
    Il sortit sans avoir été remarqué. Pour rien au monde, il n’eût demandé à Thibaud une hospitalité qu’il ne pouvait payer. Il se mit à errer dans Paris.
    En somme, il se trouvait sans gîte – et il avait faim !
    Il faisait nuit. Une de ces nuits sombres et tristes : des rues submergées sous les brouillards : pas de lumières ; pas de passants.
    Où allait-il en cette soirée d’abattement, de faim, de tristesse ? Il ne sut pas. Cent fois, il fut sur le point de retourner à la Truie Pendue, et chaque fois il poursuivit son chemin, se donnant pour prétexte qu’il n’avait pas d’argent, et oubliant que, sans sou ni maille, il avait forcé le même Thibaud Le Poingre à lui ouvrir un crédit illimité.
    Il s’aperçut tout à coup qu’il se trouvait dans la Cité.
    Il se ressouvint alors du mensonge de Saïtano. Et il se dit qu’il
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