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Voltaire

Voltaire

Titel: Voltaire
Autoren: André Maurois
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humain. « J'ai pour fils deux fous, disait-il, l'un en prose, l'autre en vers. » Un père pouvait alors obtenir du Gouvernement un ordre qui lui permît d'enfermer ou d'exiler ses enfants. M. Arouet se fit donner une de ces lettres de cachet familiales. Voltaire se cacha et, avec son habituelle activité, commença aussitôt mille démarches pour apaiser son père et pour enlever sa maîtresse.
    Il avait conçu l'idée admirable de mettre les Jésuites dans ses intérêts et de faire enlever Pimpette par les évêques français. «En effet, disait-il, Mademoiselle Dunoyer est protestante. Elle est retenue à La Haye, contre son gré, dans l'hérésie, par une mère cruelle. Elle ne demande qu'à se faire catholique pour m'épouser et, si on l'enlève, elle abjurera. » Un de ses professeurs de Louis-le-Grand, le Père Tournemine, qui avait un faible pour le petit Arouet, se chargea d' aller conter cette histoire au Père Letellier, autre Jésuite et confesseur du Roi. Il semblait que la folle entreprise dût réussir; l'Ambassadeur Chateauneuf la fit échouer en écrivant qu'elle exciterait la colère du Gouvernement hollandais. Il ne restait plus à Voltaire qu'à faire la paix avec sonpère. Il promit de reprendre l'étude du Droit et d'entrer chez un procureur. Il n'y resta pas longtemps.
    En 1715, Louis XIV mourut. Le règne avait fini tristement. Les dernières guerres n'avaient pas été favorables à la France. L'argent manquait. La querelle du jansénisme, après avoir paru s'apaiser, s'était soudain ranimée à propos d'un livre du Père Quesnel, que Rome avait d'abord jugé excellent, que l'on avait ensuite découvert être janséniste, et que l'on avait fait condamner par le Pape dans la bulle dite Unigenitus. De nouveau la France était coupée en deux partis religieux, et les appelants (qui refusaient d'accepter la bulle) emprisonnés par lettre de cachet. On accusait de ces persécutions le confesseur du Roi, Letellier, et le Roi lui-même. Enfin c'était un grand désordre.
    Pour toutes ces raisons, personne ne regretta le vieux souverain. Le jeune Roi, comme dit Saint Simon, n'en avait pas l'âge. Le duc d'Orléans, nouveau Régent, « n'était pas payé pour le pleurer ». Mme de Maintenon « était excédée du Roi; elle ne savait qu'en faire ni à quoi l'amuser ». Le duc du Maine et les autres bâtards espéraient la toute-puissance et montraient une joie barbare. La Cour et les ministres avaient l'impression d'être affranchis d'un joug insupportable. « Paris respirait dans l'espoir de quelque liberté et dans la joie de voir finir l'autorité de tant de gens qui en abusaient. » Le peuple, qui se jugeait accablé d'impôts, rendait grâces à Dieu, espérant à tort, comme il fait toujours, qu'un nouveau régime le guérirait de ses maux. Le jour des funérailles, on établit des guinguettes sur le chemin de Saint-Denis. Voltaire alla les voir et observa la foule, ivre de joie et de vin. Cela le fit penser.
    Dans ce premier moment de liberté, on crut pouvoir tout dire. Les pamphlets sur l'ancien règne furentinnombrables. Voltaire en écrivit; on lui en attribua qu'il n'avait pas écrits. Le nouveau Régent, Philippe d'Orléans, était un homme sans méchanceté. « Il aimait fort la liberté, dit Saint-Simon, et autant pour les autres que pour lui-même. Il me vantait un jour l'Angleterre comme un pays où il n'y a pas d'exil, ni de lettres de cachet. » Cela ne l'empêcha pas d'en signer une pour mettre à la Bastille le jeune Voltaire. Il l'y laissa plus d'un an. C'était une dure punition pour quelques méchants vers et qui dut éveiller des passions assez fortes et des réflexions utiles sur les formes de la justice dans l'esprit d'un jeune homme si vif, enfermé soudain entre quatre murs. On l'imagine marchant tout le jour, aiguisant des phrases dures et plaisantes, et rêvant à la constitution de l'Angleterre ou au bill d' Habeas corpus.
    A la Bastille, Voltaire travailla. Il voulait devenir le grand poète épique de la France. Dans sa prison il composa les premiers chants d'une Henriade, long poème sur Henri IV et beau prétexte à des plaidoyers contre l'intolérance :
    Je chante ce héros qui régna sur la France
    Et par droit de conquête, et par droit de naissance.

    Arma virumque cano... Cela commençait comme l' Enéide, ce qui était une qualité pour l' Enéide, mais non pour un poème écrit en 1726.
    Enfin, après dix-huit mois de détention, Voltaire put sortir de la
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