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Staline

Staline

Titel: Staline
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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lui permettre soit d’entrer
à l’école ou à l’usine, soit de différer un départ à l’armée. Pour Staline,
muet sur ce point, la raison reste obscure. Il a d’ailleurs indiqué des dates
différentes sans motif apparent. Ainsi, remplissant un questionnaire de police,
le 12 juillet 1912, il se donne 31 ans, ce qui le ferait naître
en 1881. Pourquoi choisit-il finalement 1879 ? Mystère. C’est la première
d’une longue série d’énigmes dans sa vie.
    Selon l’historien américain Adam Ulam, généralisant
abusivement la situation de Lénine, Trotsky, Zinoviev ou Kamenev, Staline sera,
parmi les dirigeants communistes, un des rares à pouvoir évoquer une enfance de
pauvreté et de privations. Mais en fait, les bolcheviks fils du peuple sont
légion. Drobnis, membre du Comité central, fils et neveu d’ouvriers
cordonniers, travaille comme apprenti dès l’âge de 10 ans ; le père
de Chliapnikov, membre du Comité central et commissaire du peuple, est tour à
tour meunier, manœuvre, charpentier et commis ; le père d’Andreiev, membre
du Bureau politique et secrétaire du Comité central, ouvrier du textile puis
concierge ; les parents de Dybenko, commissaire du peuple, et de Kalinine,
membre du Bureau politique et président de la République soviétique, sont des
paysans pauvres et les deux enfants travaillent aux champs dès l’âge de sept ou
huit ans ; Kossior, membre du Bureau politique et Premier secrétaire du PC
ukrainien, est le fils d’un ouvrier polonais ; Lozovski, président de l’Internationale
syndicale rouge, fils d’un instituteur juif misérable, dès l’âge de 8 ans
vend des allumettes, du tabac, des citrons dans les foires et les marchés. La
situation de Staline ne le distingue donc en rien de dizaines d’autres futurs
dirigeants. Ses origines ne donnent pas la clé de son destin.
    Il vient au monde, comme ses futurs compagnons et
adversaires, au moment où le régime tsariste traverse les premières convulsions
annonciatrices de son agonie. Le règne d’Alexandre II, commencé dans l’euphorie,
s’achève alors dans la désillusion et le désarroi. À la suite de l’abolition du
servage en 1861, les paysans, condamnés à payer pendant quarante-neuf ans le
remboursement des maigres terres qui leur ont été allouées et qu’ils jugeaient
déjà payées par leur sueur et celle de leurs ancêtres, leurs corvées et leurs
redevances, ploient sous un fardeau trop lourd. À la fin du règne d’Alexandre II,
la somme totale de leurs impôts est rarement couverte par le seul revenu de
leur terre ; selon les provinces, l’ensemble des charges du paysan
représente de 150 % à 280 % de ce revenu ; et même 500 %
dans la zone fertile des terres noires. En moyenne, sur un revenu annuel net de
sa terre estimé à 45 roubles, il devrait payer 22 roubles d’impôt
direct et 44 roubles d’impôt indirect. Il loue ses bras après avoir
travaillé sa terre, mais ne peut régler qu’une partie de sa dette. À la première
catastrophe climatique, la famine le guette.
    Bien qu’ils aient le sentiment d’être abusés, les paysans ne
manifestent encore leur aigreur et leur mécontentement que dans les
conversations de cabaret ; les propriétaires nobles sont pourtant
convaincus d’avoir été spoliés, les fonctionnaires ont, aux yeux des uns et des
autres, saboté la bonne réforme voulue par le tsar. Ils sont, de plus, victimes
de la corruption généralisée de l’administration que Catherine II
dénonçait, dès 1762, dans un oukase fameux : « La malhonnêteté a fait
de tels progrès qu’on pourrait à peine citer une administration ou un tribunal
qui n’en soient pas infectés. » Les efforts que déploient les tsars pour
enrayer ce fléau ne font que l’aggraver.
    La bureaucratie d’État règne sans contrôle sur une masse
sociale indifférenciée. L’artisanat campagnard, la bureaucratie d’État et le
milieu étriqué des marchands, pâle ersatz de la bourgeoisie qui a formé le
tiers état européen, n’offrent aucun support social et politique à une intelligentsia
en marge de la société. Les étudiants, sans présent ni avenir, sans débouché
social autre qu’une morne carrière de fonctionnaire dans la bureaucratie
servile et corrompue de l’État, sans perspective politique, fournissent les
plus gros contingents de révolutionnaires
    Cette intelligentsia en marge, dite populiste, voit dans le
paysan le révolutionnaire
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