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Romandie

Romandie

Titel: Romandie
Autoren: Maurice Denuzière
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Axel dans son cabinet de travail, pour lui
présenter les comptes du domaine et de la source minérale de Fontsalte-en-Forez
qu’il venait de recevoir. Comme Axel, par discrétion, refusait d’examiner ce
bilan, Blaise le prit par l’épaule.
    — Mon cher garçon, cette entreprise, comme tout ce qui
m’appartient, sera vôtre et vous devez vous y intéresser dès maintenant. Vous
voilà marié, sans doute bientôt père de famille. La source Fontsalte peut être
d’un profit accru, qui n’est pas à négliger. Nous aurons, certes, dans les
années à venir, à faire face à la concurrence d’autres sources situées, peut-être,
en des lieux plus attrayants que ma plaine forézienne mais, depuis que la gent
médicale fait des eaux minérales une panacée à de nombreux maux, les gens des
villes désirent tous boire l’eau des sources, amère ou pétillante ! Votre
projet de mettre l’eau de Fontsalte en bouteilles pour l’expédier aux
pharmaciens des villes, qui la vendraient comme remède naturel, ne me paraît
plus irréalisable. Le chemin de fer relie maintenant régulièrement la ville d’Andrézieux,
voisine de Fontsalte, à Saint-Etienne, grande cité industrielle. Nous pourrions
donc envoyer, chaque jour, de l’eau minérale aux officines stéphanoises. Et, pourquoi
pas, à celles de Lyon ?
    — La difficulté, que nous avons déjà évoquée ensemble, est
de trouver un système de mise en bouteilles et de bouchage hermétique qui ne
laisse pas fuir le gaz contenu dans l’eau sortant du griffon, observa Axel.
    — À nous de trouver l’artiste qui inventera le bouchon
hermétique. Pour la bouteille, la verrerie des frères Richarme, à Rive-de-Gier,
y pourvoira. Michel, Pierre et Pétrus fabriquent, depuis 1826, des flacons pour
les vignerons bourguignons. Ce qui est bon pour le meursault de Trévotte sera
bon pour l’eau de Fontsalte ! dit Blaise en riant.
    L’entretien fut interrompu par l’arrivée de Claude Ribeyre
de Béran accompagné de son épouse, Flora, la marraine d’Axel.
    Tandis que Flora disparaissait avec Charlotte et Élise, pour
parler chiffons ou cadeaux, les trois hommes se retrouvèrent autour de la
bouteille de saint-saphorin servie par Titus. Les Ribeyre revenaient de Paris
et Claude annonça à son ami le décès, passé inaperçu en Suisse, du cuisinier de
l’empereur, Marie-Antoine Carême, mort au commencement de l’année 1833.
    — C’était un fameux cuisinier, et sa façon d’accommoder
les truites au bleu, avec un simple beurre blanc, est restée inégalable, rappela
Ribeyre en guise d’oraison funèbre.
    — À propos de truites, sais-tu que le gouvernement de
Genève, plein d’égards pour la monarchie française, vient de renouer avec une
tradition établie au XV e  siècle
en envoyant à Louis-Philippe, à l’occasion de Noël, une truite royale de
trente-cinq livres [8] ,
dit Fontsalte.
    — Puisse-t-il s’étrangler avec une arête, ce roi des
barricades ! lança Ribeyre.
    Fontsalte pressa son ami de commenter la composition du
gouvernement du maréchal Soult, président du Conseil depuis octobre 1832.
    — Ah ! mon ami, parlons de Soult, opportuniste sans
dignité ! Comblé d’honneurs par l’empereur il l’a, souviens-t’en, deux
fois renié, avant et après les Cent-Jours, pour se mettre au service de Louis XVIII.
Rappelle-toi aussi que ce pilleur de châteaux et de monastères espagnols voulut,
un jour, se faire roi du Portugal !
    — Je me rappelle surtout qu’il se rallia, avec une
obséquiosité de valet affamé, à Louis XVIII après les adieux de
Fontainebleau, ce qui lui valut le portefeuille de la Guerre. Et je n’oublie
pas, non plus, son ignominieuse proclamation, quand il apprit le retour de
Napoléon de l’île d’Elbe, dit Fontsalte.
    — Moi non plus, je n’ai pas oublié. Il traitait l’empereur,
à qui il devait tout, d’usurpateur et d’aventurier, renchérit Ribeyre.
    — Et cependant, Napoléon, de retour de l’île d’Elbe, en
fit, pendant trois mois, le successeur de Berthier comme major général de l’armée,
constata Fontsalte, avec un peu d’amertume.
    — L’empereur connaissait les compétences du militaire, dont
il avait un urgent besoin, et méprisait les ambitions de l’opportuniste, qui
retourna sans gêne se prosterner devant le podagre Louis XVIII au
lendemain de Waterloo. C’est là, je crois, qu’il a touché le fond de l’abjection
quand, pour rentrer en grâce,
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