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Montségur et l'enigme cathare

Montségur et l'enigme cathare

Titel: Montségur et l'enigme cathare
Autoren: Jean Markale
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pays de mon enfance, et qui se
réactualisait par l’étude de la littérature française du Moyen Âge. Nous avions
en effet un professeur de lettres, Jean Hani, lequel a, depuis ce temps, écrit
de remarquables ouvrages, qui était passionné par les romans de la Table Ronde
et par la poésie contemporaine. J’eus ainsi l’occasion de me familiariser avec
la légende de Tristan et Yseult, celle de Merlin, que je connaissais déjà en
partie, et celle de Perceval à la recherche du Saint-Graal. Mais parallèlement
à cette plongée dans le passé, il y eut aussi les poètes du XX e  siècle, et parmi eux Maurice Magre. Or Maurice
Magre, c’était non seulement la découverte d’une littérature contemporaine, mais
encore le Graal à Montségur.
    Bien sûr, je n’avais pas d’opinion. Le Graal était pour moi
aussi abstrait que la forteresse de Montségur : je m’étonnais cependant qu’un
terroir pyrénéen pût servir de cadre à une aventure que je ne pouvais pas
considérer autrement que bretonne. C’était la période noire de l’Occupation. La
radio, sous contrôle allemand, diffusait abondamment le Prélude et mort d’Isold de Wagner, ainsi que le
prélude de Parzival ou l’ Enchantement du Vendredi saint  : j’aimais cette
musique, et je l’aime encore, car elle me servait d’accompagnement lorsque j’imaginais
des scénarios sur les thèmes arthuriens. J’avais vu le film de Marcel Carné, Les Visiteurs du soir , qui m’avait enthousiasmé et
définitivement convaincu d’aller rôder au fin fond du Moyen Âge pour y
découvrir ce que les autres ne devaient pas avoir encore aperçu. Un peu plus tard,
je vis L’Éternel Retour de Jean Delannoy, où
le mythe de Tristan est si magnifiquement – et si justement – transposé par
Jean Cocteau. Le cinéma, la musique, la littérature médiévale, la poésie
contemporaine, cette alliance bizarre allait faire de moi ce que je suis devenu :
un chevalier sans âge à la recherche d’un Graal qui me fuit chaque fois que je
crois pouvoir l’atteindre, au détour d’un chemin, dans les sombres forêts que
mon imaginaire peuple d’êtres féeriques, de ces étranges femmes qui surgissent
des tertres pour indiquer aux voyageurs une direction qui peut-être n’est pas
la bonne.
    Dans tout cela, Montségur jouait le rôle d’un phare, mais d’un
phare que je n’avais nul besoin d’atteindre, puisque pour moi, le château du
Graal ne pouvait être ailleurs qu’en Bretagne, voire en Grande-Bretagne, puisque
je savais qu’il fallait chercher outre-Manche l’origine des romans arthuriens. Certes,
j’avais lu des commentaires sur la ressemblance entre le nom de Montségur et
celui de Montsalvage, où le roi blessé Anfortas attend l’arrivée de Parzival. J’étais
même allé vérifier dans le texte de Wolfram von Eschenbach, qui servit à Wagner
pour bâtir le livret de son drame lyrique, mais je ne voyais guère de rapport
entre Muntsalvasche (c’est le nom employé par Wolfram),
c’est-à-dire « Mont du Salut », et Montségur, c’est-à-dire le « Mont
Sûr ». Et quand je passais à Montsûrs, dans la Mayenne, je savais que ce
nom, comme celui du château ariégeois, provenait du même Mons Securus . D’ailleurs, dans les romans français, le
château du Graal, c’est Corbénic, et mon antigermanisme viscéral – à l’époque, c’était
plutôt bien – me faisait délibérément écarter Montsalvage de mon champ de
vision légendaire. Restait, bien entendu, Montségur.
    Mais en tant que citadelle albigeoise ,
le nom de « cathare » m’étant encore inconnu. Les Albigeois étaient
alors, dans mon esprit, des empêcheurs de tourner en rond, des gens dont les
idées étaient bizarres, qui croyaient en l’existence d’un dieu du mal opposé à
un dieu du bien. Je ne voyais en tout cas rien de commun entre ces hérétiques d’un
autre monde et les Celtes que je soupçonnais, déjà à cette époque, d’avoir de
fâcheuses tendances à l’hérésie. Mais ce ne pouvait être la même hérésie. Et si,
en lisant les poèmes des Troubadours, je me demandais quelle était cette Dame
mystérieuse, inaccessible et jamais vue qu’ils
chantaient avec tant d’amour, je n’imaginais pas une seule seconde que c’était
peut-être une image pour désigner à mots couverts l’Église des Croyants et des
Parfaits. De tendances profondément « monistes », et refusant
systématiquement l’opposition absolue entre le bien
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