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L'oeil de Dieu

L'oeil de Dieu

Titel: L'oeil de Dieu
Autoren: C.L. Grace
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    Prologue
    Dimanche de Pâques,
quatorzième jour d’avril, 1471
    Richard Neville, comte de Warwick, sortit de sa tente pour sonder les ténèbres scellées de brouillard. Du camp montait le bruit de ses hommes qui s’armaient pour la bataille. Warwick vit la brume s’épaissir au Creux de l’Homme Mort, près du bois de Wrotham, et recouvrir la plaine de Barnet. Les petites couleuvrines seraient donc inefficaces. Dans le brouillard, son armure collait au toucher, tandis que les bannières de commandement pendaient mollement à leur hampe. Signe des événements à venir ? Warwick effleura la pierre précieuse qui pendait à son cou, un saphir étincelant. Il y abaissa les yeux, murmura une prière. Cette pierre avait pour nom l’OEil de Dieu, mais Dieu regardait-il son serviteur, présentement ? Dans le lointain, Édouard d’York et ses frères assoiffés de sang, Richard de Gloucester et George de Clarence, progressaient depuis Barnet pour l’obliger à se battre et l’anéantir.
    Warwick se raidit, refoulant la peur qui subitement le tenaillait. S’il sortait vainqueur, la route de Londres serait libre. Il rétablirait dans ses droits le saint roi Henri VI, ou, si les York l’avaient déjà assassiné, peut-être assoirait-il un autre roi sur le trône ? Une trompette sonna. Warwick, serrant son heaume au majestueux plumet noir et jaune, avança dans l’obscurité. Chevaliers et écuyers de sa maison l’entourèrent. Un page amena sa monture tandis que les messagers de ses capitaines attendaient les ordres. Sur un signe de sa main gantée, sa suite armée se mit en route. À l’écart du camp, il sauta en selle et passa en revue ses troupes déjà en formation de bataille : rangs d’hommes en armes déployés dans les profondeurs du brouillard. L’armée de Warwick était organisée en trois grandes phalanges : celle de son jeune frère, John Neville, marquis de Montagu, au centre ; celle du duc d’Exeter à gauche ; et celle du comte d’Oxford à droite.
    Une trompette sonna encore, suivie de cris et de railleries. Une petite troupe de cavaliers venait de surgir des ténèbres, galopant vers l’armée de Warwick. Celui-ci repéra la croix de bois que brandissaient les hommes à cheval, et la bannière blanche qui l’entourait. Son regard se porta sur ses archers qui armaient fébrilement leurs arcs.
    — Paix ! cria-t-il. Ce sont des envoyés, ils ne sont pas armés.
    Flanqué de Montagu et d’Exeter, il avança vers la petite troupe de cavaliers yorkistes qui s’étaient regroupés sous leur bannière de paix. Warwick laissa son cheval marcher l’amble. Combien étaient-ils ? Quatre ? Cinq ? Était-ce un piège ? Et si derrière eux d’habiles archers avaient déjà bandé leurs arcs ? Warwick tira sur la bride de son grand destrier, se dressant sur ses étriers.
    — Êtes-vous des messagers ? cria-t-il.
    Le chef du petit groupe cria en retour :
    — Nous venons dans un esprit de paix, sans arme, seulement porteurs d’un message de Sa Majesté le roi.
    — Je ne savais pas que le roi Henri était avec vous, se gaussa Warwick, scrutant l’obscurité au-delà des cavaliers.
    — C’est le roi Edouard IV qui nous envoie, l’Oint du Seigneur, roi d’Angleterre, d’Irlande, d’Ecosse et de France par la grâce de Dieu.
    Warwick avait perçu le léger accent irlandais, et il sourit. Il connaissait l’homme : Colum Murtagh, que le père d’Edouard d’York avait sauvé de la pendaison. Maintenant maréchal de la maison d’York et premier éclaireur et messager du prince Edouard, Murtagh n’était pas un assassin. Warwick éperonna sa superbe monture qui précéda bientôt ses deux généraux. Il s’immobilisa à une longueur de bras de Murtagh et scruta le visage sombre de l’Irlandais, ses cheveux noirs de jais humides sous son casque de mailles et son capuchon brun de protection.
    — Vous allez bien, Irlandais ?
    — Oui, Monseigneur.
    — Quel est votre message ?
    — Les conditions de Sa Majesté, honorables et profitables pour vous, si vous les acceptez.
    Warwick entendit les murmures courroucés de ses compagnons. Ils avaient saisi le sens du message. Autrefois, en des temps plus fastes, Warwick et Édouard d’York avaient été plus liés que David et Jonathan, frères jurés dans une amitié scellée par de solennels serments. À présent, tout avait volé en éclats, mais York espérait encore se rallier Warwick.
    Ce dernier
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