Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les Seigneurs du Nord

Les Seigneurs du Nord

Titel: Les Seigneurs du Nord
Autoren: Bernard Cornwell
Vom Netzwerk:
Prologue
    J’avais envie de ténèbres. En cette nuit d’été,
le clair de lune qui ne cessait de glisser entre les nuages me rendait nerveux.
J’avais envie de ténèbres.
    J’avais apporté deux sacs de cuir jusqu’à la
petite crête qui marquait la frontière nord de mon domaine. Mon domaine. Fifhaden,
récompense accordée par le roi Alfred pour mes services à Ethandun où, sur la
longue colline verte, nous avions anéanti une armée danoise. Cela avait été mur
de boucliers contre mur de boucliers, et à la fin Alfred était redevenu roi et
les Danois avaient été défaits. Le Wessex vivait et j’ose dire que j’avais
souffert plus que bien d’autres. Ma femme était morte, ainsi que mon ami ;
j’avais pris une lance dans la cuisse droite, et ma récompense était Fifhaden.
    Cinq peaux [1] . Voilà ce que signifiait ce nom. Cinq peaux ! C’était bien peu
pour faire vivre les quatre familles de serfs qui cultivaient cette terre, tondaient
les moutons et péchaient dans la Kenet. D’autres hommes avaient reçu de vastes
domaines, l’église avait été récompensée en riches forêts et pâturages, mais je
n’avais eu que cinq peaux. Je détestais Alfred. Ce misérable roitelet pieux et
pingre se défiait de moi parce que je n’étais point chrétien, que j’étais du
Nord et que je lui avais rendu son royaume à Ethandun. Et en récompense, je n’avais
eu que Fifhaden. Quel bâtard !
    J’avais donc apporté les deux sacs sur la
crête rasée par les moutons et jonchée d’énormes rocs gris. Je m’accroupis
derrière l’un d’eux, accompagné de Hild.
    C’était désormais ma femme. Elle était nonne à
Cippanhamm, quand les Danes avaient pris la ville et l’avaient violée. À
présent, elle était mienne. Parfois, la nuit, je l’entendais murmurer ses
prières de larmes et de désespoir. Je me doutais qu’elle retournerait auprès de
son dieu un jour, mais pour l’heure j’étais son sauveur.
    — Pourquoi attendons-nous ? demanda-t-elle.
    Je la fis taire d’un doigt sur les lèvres. Elle
me dévisagea. Elle avait un visage tout en longueur, de grands yeux et des
cheveux dorés sous un fichu. C’était un gâchis qu’elle ait été nonne. Mais, bien
sûr, Alfred voulait qu’elle retourne en religion. Voilà pourquoi je la gardais.
Pour l’agacer, ce bâtard.
    J’attendais, afin d’être sûr que nul ne nous
observait. C’était peu probable, car personne ne veut s’aventurer dans la nuit
quand rôdent d’horribles créatures. Hild agrippait son crucifix, mais moi j’étais
à l’aise dans le noir. Dès mon enfance, je m’étais habitué à aimer la nuit. J’étais
un sceadugengan, une ombre qui marche, une créature que redoutent les
autres hommes.
    J’attendis longtemps puis, une fois sûr qu’il
n’y avait personne, je tirai Dard-de-Guêpe, ma courte épée, et découpai un
carré de terre et d’herbe que je déposai sur le côté. Puis je creusai en
entassant la terre dans ma cape. La lame qui ne cessait de heurter pierres et
silex serait ébréchée, mais je continuai, creusant un trou assez grand pour
accueillir la dépouille d’un enfant. Nous y enfouîmes les deux sacs. C’était
mon butin. Mon argent, mon or, ma richesse, et je ne voulais pas m’en encombrer.
Je possédais cinq peaux, deux épées, une cotte de mailles, un bouclier, un
casque, un cheval et une nonne maigrelette, mais je n’avais nul homme pour
protéger mon trésor – je devais donc le cacher. Je ne gardai que quelques
pièces d’argent et confiai le reste à la terre. Après l’avoir bien tassée puis
replacé le carré de terre et d’herbe, j’attendis que la lune reparaisse pour vérifier que la cachette était indécelable ;
alors j’en gravai l’emplacement dans ma mémoire d’après les rochers voisins. Un
jour, quand j’aurai les moyens de protéger mon trésor, je reviendrai le
chercher.
    — Alfred a dit que tu devais rester ici, dit
Hild.
    — Alfred peut se pisser dans la gorge et
j’espère que ce bâtard en mourra étouffé.
    Il trépasserait probablement bientôt, car il
était fort malade. Il n’avait que vingt-neuf ans, huit de plus que moi, mais il
en paraissait cinquante et je ne lui donnais que deux ou trois ans de plus à
vivre. Quand il ne se plaignait pas de ses maux de ventre, c’est qu’il courait
chier ou qu’il avait de la fièvre.
    — Cela veut-il dire que nous revenons au
Wessex ? demanda Hild en effleurant l’herbe.
    — Cela
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher