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Les porteuses d'espoir

Les porteuses d'espoir

Titel: Les porteuses d'espoir
Autoren: Anne Tremblay
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des
     animaux jusqu’à la fin du mois. Monsieur Côté était reparti, heureux du
     dénouement de sa démarche et Georges était retourné se bercer, les yeux dans le
     vide, coupé du monde, enfermé dans son deuil. Tôt ou tard, François-Xavier
     devrait parler de l’avenir avec son ami d’enfance. Lui et Elzéar ne pourraient
     demeurer indéfiniment avec eux. François-Xavier était prêt à bien des sacrifices
     pour leur venir en aide, mais cette cohabitation commençait à lui peser. Georges
     buvait beaucoup trop. Son ami s’était réfugié dans l’alcool. Pour le moment,
     valait mieux laisser passer encore un peu de temps. Mais bientôt, bientôt, il
     devrait trouver le courage d’aborder la question. À l’heure présente, son
     beau-frère devait encore être à se morfondre dans la chaise berçante de la
     cuisine. Quelles paroles de réconfort peuvent se dire à la suite d’une telle
     tragédie : « Voyons Ti-Georges, t’as perdu ta seconde épouse pis sept enfants,
     tu vas t’en remettre ! » ou des idioties comme : « Le temps va tout guérir, tu
     vas oublier » ? Du coin del’œil, François-Xavier observa son
     neveu grimper à ses côtés dans la carriole. Il était temps de s’en retourner
     déjeuner. L’adolescent, de la stature d’un homme, avait une attitude
     incompréhensible. Il affichait un air détaché, presque serein, et
     François-Xavier l’avait même surpris en train de siffloter tout en ramassant le
     fumier des vaches. Et puis, pourquoi pas ? Peut-être était-ce la bonne façon de
     tourner la page ? Pourtant, jamais, lui, ne parviendrait à siffler une note
     gaie...

    — Je n’arrive pas trop tôt, j’espère ?
    — Mais non, mon cher ami, répondit chaleureusement le curé Duchaine en
     accueillant son visiteur. Vous pouvez vous joindre à nous pour déjeuner !
     poursuivit-il en invitant l’abbé Victor Tremblay à s’asseoir.
    L’abbé accepta avec joie.
    Quand le curé Duchaine présenta Pierre, l’abbé Tremblay fronça les
     sourcils.
    — Mais je connais ton père, s’exclama-t-il en faisant le lien entre le nom de
     famille et les cheveux roux.
    — Vous connaissez François-Xavier ? s’étonna le curé Duchaine.
    L’abbé Tremblay raconta l’histoire de la construction du barrage, du
     rehaussement des eaux du lac Saint-Jean pour servir de réservoir, et les
     conséquences de l’inondation et l’expropriation sur les cultivateurs de la
     région.
    — Monsieur l’abbé est professeur d’histoire au séminaire de Chicoutimi. C’est
     la personne la mieux renseignée sur toute la région ! expliqua le curé
     Duchaine.
    — Surtout que c’est mon propre père, Onésime Tremblay, qui était à la tête du
     comité de défense des cultivateurs lésés.
    — Ah ! je ne savais pas, rétorqua le curé.
    — Oui, mon père s’était même rendu défendre la cause devant le
     premier ministre du Québec !
    L’abbé Tremblay replongea dans ses souvenirs. Le comité de défense, la lutte,
     les avocats, la compagnie.
    — Toutes ces expropriations, ces injustices… Un jour, je devrai raconter cette
     histoire.
    Le visage du curé Duchaine s’assombrit.
    — Pauvre monsieur Gagné, subir autant d’épreuves dans une vie, soupira-t-il en
     ajoutant : « C’est l’homme qui est passé au feu en janvier dernier. Pierre y
     était et s’en est sorti. »
    — C’est le garçon qui a sauvé le bébé ?
    L’abbé Victor avait entendu parler de ce drame, bien entendu. Il resta un
     instant silencieux, dévisageant Pierre. Il retira ses petites lunettes cerclées,
     sortit son mouchoir et se mit à les nettoyer en silence. Il secoua la tête,
     réajusta sa monture sur son nez et dit, en désignant le drapeau :
    — Mais nous avons des jours meilleurs devant nous, des jours de fête ! Et voici
     ce qui sera la fierté de notre centenaire...

    Julianna sécha ses larmes et installa Laura à la table.
    — Z’aime pas le gruau.
    — Tais-toi pis mange pareil, vous allez encore être en retard à l’école,
     répondit-elle d’un ton las.
    Calmé, Léo s’était à moitié affaissé dans sa chaise. Julianna le reprit dans
     ses bras.
    À ce moment, on frappa à la porte. Qui pouvait bien venir à cette heure
     matinale ?
    Avec curiosité, elle alla ouvrir.
    Deux inconnus se tenaient sur le pas de la porte. Le plus jeune prit la parole.
     Il avait un fort accent.
    — Nous nous excusons de vous
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