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Les pièges du désir

Les pièges du désir

Titel: Les pièges du désir
Autoren: Diane Gaston
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House, siège de l’Académie, parmi les œuvres de Lawrence, Fuseli et Turner, dans une salle bondée où déambulaient les visiteurs qui n’avaient pas encore déserté la ville en ce début d’été. 
    Jack n’aimait pas les foules. La rumeur des voix résonnait à ses oreilles comme un grondement lointain de canonnade, réveillant en lui les terribles souvenirs de ce cauchemar qu’avait été la guerre. 
    Un flâneur le bouscula légèrement et, l’espace d’une seconde, Jack faillit réagir en agressé, prêt à se jeter sur l’ennemi qui le provoque. Heureusement, l’homme ne s’aperçut de rien. Jack desserra les poings, mais le bruit dans ses oreilles s’amplifia, il aurait juré entendre gronder les canons. Son cœur se mit à battre plus vite et la pièce parut s’assombrir autour de lui. Ce n’était pas la première fois qu’il éprouvait ces sensations, signes avant-coureurs d’hallucinations. Bientôt, il se croirait revenu au cœur de la bataille, parmi les sons, les remugles et les terreurs de la guerre. 
    Il ferma les yeux et s’immobilisa, dans l’espoir que nul ne devinerait le combat qui se livrait en lui. Lorsqu’il releva les paupières, son regard se dirigea vers le portrait de sa sœur accroché très haut, bien au-dessus de la cimaise. La vue du tableau le fit redescendre sur terre. Il était à Londres, au nom du ciel ! A Somerset House, un lieu où régnait la beauté. Il adressa un sourire de gratitude à l’image chérie. 
    – Quelle est donc l’œuvre qui vous ravit ainsi ? s’enquit tout à coup une douce voix musicale. 
    Une jeune femme se dressait près de lui, jolie à couper le souffle. Etait-elle, elle aussi, un jeu de son imagination ? Sa peau satinée, d’un rose très pâle, contrastait magnifiquement avec la riche nuance de sa chevelure auburn. Ses lèvres carmin brillaient comme si elle venait de les humecter avec la langue. De grands yeux étincelants, aussi verts qu’une prairie en été et frangés de longs cils châtains, rencontrèrent son regard. Il crut y lire une furtive expression de sympathie. 
    – Je suis sûre que c’est la jeune dame, dit-elle en désignant le portrait. 
    Il détourna le regard d’elle un instant pour lever les yeux vers la toile. 
    – Vous l’aimez ? s’enquit-il. 
    – Oh, oui ! 
    Elle plissa les paupières pour mieux examiner le tableau. 
    – Elle est si fraîche et charmante ! Le rendu est extrêmement vivant. Mais il n’y a pas que cela. 
    Elle s’humecta les lèvres pour le plus grand plaisir de Jack, dont le sens artistique ne fut pas seul à s’émouvoir. 
    – Ce portrait a été peint avec amour. 
    – Avec amour ? répéta-t–il. 
    Il considéra de nouveau la toile, pas plus d’une seconde. Il avait trop de mal à détacher les yeux de son interlocutrice. 
    – Mais oui ! 
    Elle s’adressait à lui comme si converser avec un homme qui ne lui avait pas été présenté avait été la chose la plus naturelle du monde. 
    – L’expression du modèle, son attitude, tout dans ce portrait en appelle à l’émotion. On y lit l’ardeur d’une très jeune fille, impatiente de savoir ce que l’avenir lui réserve, et aussi la tendresse que l’artiste a pour elle. Cela la rend encore plus belle. Une peinture absolument remarquable… 
    Jack ne put s’empêcher de rougir de fierté. 
    Son premier objectif en peignant Nancy avait été d’attirer des commanditaires pour d’autres portraits. Mais cela lui avait également donné l’opportunité de renouer connaissance avec cette sœur qui n’était encore qu’une enfant lorsqu’il était parti pour l’Espagne. Nancy avait dix-huit ans à présent et s’était épanouie. En vérité, elle était aussi fraîche et charmante que son portrait. 
    Quant à l’exquise admiratrice du tableau, bien réelle à n’en pas douter, elle ne devait guère être plus âgée. Un an ou deux de plus, peut-être ? Pourtant, s’il avait dû la peindre, il aurait donné d’elle l’image d’une femme qui savait ce qu’elle voulait dans la vie. 
    L’inconnue étouffa un petit rire. 
    – Je ne devrais pas m’attendre à ce qu’un homme comprenne à ce point l’émotion… 
    Elle regarda de nouveau le portrait. 
    – Excepté l’artiste. Il a parfaitement saisi cela. 
    Jack sourit à part lui. Si elle savait ! L’émotion, c’était sa vieille ennemie. Elle avait même failli l’assaillir dans cette
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