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Les Amazones de la République

Les Amazones de la République

Titel: Les Amazones de la République
Autoren: Renaud REVEL
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Un jour à Toulouse…
    C’était un jour de mai 1984 à Toulouse, cette ville toute de rose laquée, dont un soleil de plomb vient souvent délaver le ciel bleu et étouffer les ocres de ses maisons. Or cette cité, orgueilleuse et jalouse de ses voisines, qui exige de ses habitants un mariage monogame, déroulait ce jour-là ses plus beaux atours pour celui qu’une foule compacte applaudissait. Sous les lambris de l’hôtel de ville, un président de la République en visite s’avançait lentement vers le perron, de port très altier et un brin de hauteur désabusée dans la démarche : François Mitterrand.
    Se frayant un chemin parmi une meute en génuflexion, implorant l’aumône – un geste, un mot… –, l’homme aimantait les regards. Cette foule de courtisans n’était que limaille pour celui dont l’œil s’était soudainement arrêté sur une jeune et jolie femme noyée dans la cohue : un visage qu’il connaissait et dont il avait alors immédiatement verrouillé la silhouette. Tel un missile sa cible. Sur le qui-vive guerrier, François Mitterrand, qui en oublia le reste, lui adressa de la tête un discret signe de bienvenue. Un geste qu’elle lui rendit dans un léger sourire empreint de componction. Touchée !
    Comme de coutume, le protocole imposé de ce type de marathon présidentiel avait été réglé au cordeau par la machine élyséenne. Et François Mitterrand ne dissimulait pas son agacement : 9 heures, allocution à la préfecture ; 10 heures, visite des ateliers d’Airbus ; 11 heures, rencontre avec une délégation de la FNSEA, le syndicat paysan. À midi, vin d’honneur et déjeuner protocolaire à l’hôtel de ville en compagnie d’une armée de notables endimanchés, prêts à s’immoler pour l’approcher.
    Mais Mitterrand, dont le visage marmoréen s’était irradié, n’avait plus d’yeux que pour « Elle ». Tendant son cou pour mieux l’apercevoir, tel le héron au-dessus d’une rangée de roseaux, il respirait au-delà de cette marée humaine les embruns de celle qui venait de remarquer son manège.
    La chasse était lancée. Cette apparition fit l’effet chez le locataire de l’Élysée d’un ouragan de fraîcheur dans cette chaleur que dégageait cet embouteillage de chairs. Que d’obligations et de salamalecs, pestait-il intérieurement ! Or, François Mitterrand, convaincu que le fruit était mûr, poussait un peu plus son art. Certains parmi ses plus intimes compagnons de route, qui escaladaient à ses côtés le caillou de Solutré, l’ont souvent entendu raconter, lors de cette ascension, quand le temps s’écoule lentement, le plaisir qu’il trouvait dans ces joutes à distance. Quand tout n’est plus que jeu de séduction et quitte ou double.
    Elle, ici ? Quoi de plus normal. Journaliste politique à TF1, Florence Schaal avait été dépêchée le matin même par sa direction pour suivre le déplacement de celui qu’elle avait été amenée à rencontrer à quelques reprises dans le cadre de ses activités, depuis son accession à l’Élysée, trois ans plus tôt.
    Et Florence se sentait déshabillée de la tête aux pieds. Comme la jeune fille que le paysan regarde danser, guettant les effluves d’un parfum qu’il semble deviner de loin. Plus que quelques minutes de patience et il irait lui inoculer, dans un grand tourbillon de mots, quelques compliments ourlés qui la feraient immanquablement chavirer.
    Comment était-elle vêtue ? Une veste claire, un chemisier légèrement décolleté, un jean, des escarpins. Des boucles d’oreilles, une bague, peut-être… Imperceptiblement, François Mitterrand s’était écarté de quelques pas pour se rapprocher de la journaliste, elle-même entourée d’une grappe de confrères à l’affût. Chacun savait que c’est dans ces moments-là que le président de la République, qui gérait comme personne ces situations, distillait, en aparté, quelques confidences. En l’occurrence, ce jour-là, une charge au vitriol contre le parti communiste…
    L’estocade ne
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