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L'envol du faucon

L'envol du faucon

Titel: L'envol du faucon
Autoren: Axel Aylwen
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retard sur son calendrier. Il avait été retenu un temps fou avant d'être autorisé à continuer à remonter le fleuve jusqu'à Ayuthia. Les officiels siamois n'avaient fourni aucune explication particulière pour le retard mais, en dépit de leur courtoisie méticuleuse et de leurs assurances qu'il ne s'agissait que d'un contrôle de routine, il avait eu la nette impression qu'on le faisait attendre à dessein. En tout cas, il avait perdu plus d'une journée. Plus tard, en arrivant à Ayuthia, il n'avait pu résister à l'envie de s'arrêter au séminaire. Ses collègues jésuites n'avaient pas voulu le laisser partir avant d'avoir fêté son retour. Quand, finalement, il avait atteint le palais de Phaulkon, on l'avait informé à la porte extérieure que Son Excellence le Pra Klang serait absent jusqu'au lendemain matin. Il fallait revenir. Aussi Tachard avait-il rebroussé chemin jusqu'au séminaire, perturbé par ces retards, devinant très bien la frustration de La Loubère mais également conscient de ne pouvoir changer grand-chose à la situation.
    Au séminaire, il avait écouté avidement les rapports concernant les progrès de la conversion de Sa Majesté. Il avait appris que le frère Brouet avait été convoqué nombre de fois au palais pour interpréter des passages difficiles de la Bible qui avaient excité la curiosité du roi, mais à part ça rien n'avait changé. Le roi paraissait toujours indécis. Et Phaulkon, qui jouait un rôle clé dans ces progrès, avait indiqué qu'il voulait attendre l'arrivée de la délégation française avant de pousser plus loin les choses.
    Cela faisait maintenant quatre jours que Tachard avait quitté le vaisseau ; il avait hâte de compléter sa mission et de retourner à bord. Il devait présenter les conditions françaises à Phaulkon sans tarder.
    « Son Excellence le Pra Klang va vous recevoir », dit le garde au torse nu, de retour à la porte. Il s'inclina profondément et sourit avec courtoisie en exhibant une rangée de dents rougies par la mastication constante de bétel. Alors que Tachard lui emboîtait le pas le long d'une large allée dallée de pierre et bordée de fleurs, il se rappela la beauté de la race siamoise. Ils étaient en général plus petits que les Européens, bien proportionnés et peu sujets à l'obésité. Leurs yeux sombres étaient moins bridés que ceux des Chinois et leur teint brun foncé, leurs cheveux raides d'un noir de jais semblaient en parfaite harmonie avec les couleurs vives des tropiques. Leurs oreilles étaient d'ordinaire plus grandes, leurs lèvres plus épaisses et leur nez beaucoup plus épaté que ceux des Européens, mais ils avaient le corps agile et souple et un maintien d'une grâce incomparable.
    Tachard soupira et passa une main dans ses cheveux gris qui se raréfiaient. Cela faisait cinq ans qu'il avait quitté le pays, et son voyage pour remonter le Menam Chao Phraya avait réveillé une foule de souvenirs. Les berges étaient bordées des maisons en bois sur pilotis qui lui étaient familières ; des hommes et des femmes torse nu se baignaient dans le fleuve et des enfants sautaient dans l'eau de la terrasse des maisons en poussant des cris joyeux. Des vergers couraient le long des rives, et une myriade de pirogues sillonnaient le fleuve, chargées de den-rées, comme quelque marché flottant dont les batelières vantaient les produits. Les proues altières des barques des mandarins, sculptées en forme d'oiseau et dorées à la feuille, glissaient en brillant de tous leurs ors.
    Tachard était de nouveau sous le charme de ce pays exotique. Il avait anticipé avec un plaisir enfantin chaque nouveau détour du cours d'eau, s'excla-mant chaque fois qu'une flèche d'or ou un toit orangé surgissait soudain entre des bouquets de palmiers et de bananiers. Le temps avait passé sans qu'il s'en rendît compte. Vers la douzième heure, au sortir d'un méandre ponctué d'îlots, il avait revu pour la première fois la majestueuse ligne des toits de la Cité du Paradis, Avuthia.
    Bien que les souvenirs de sa précédente visite fussent encore vifs et qu'il fût préparé mentalement au spectacle, il n'en eut pas moins le souffle coupé. Des rangées de flèches d'or s'élançaient vers le ciel, brillant au soleil comme autant de joyaux, tandis qu'une multitude de couleurs se disputaient son attention : le rouille des murs épais ceignant l'île-cité, les orange, les bruns et les verts des toits des temples, les
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