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L'ennemi de Dieu

L'ennemi de Dieu

Titel: L'ennemi de Dieu
Autoren: Bernard Cornwell
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batailles, l’épée des Bretons, le beau
seigneur des douleurs, le parangon, et toute cette belle réputation, il la
devait à la chanson, et nullement, à ce que j’en savais, à son épée. J’étais
son ennemi, et lui le mien. Mais nous étions tous deux les amis d’Arthur, et
cette amitié imposait à notre inimitié une fâcheuse trêve.
    Arthur savait
mon hostilité. Me touchant le coude, il m’entraîna vers le remblai de morts. « Lancelot
est l’ami de la Dumnonie, insista-t-il, en sorte que si Lancelot dirige la
Silurie, nous n’aurons rien à craindre d’elle. Et si Lancelot épouse Ceinwyn, le
Powys le soutiendra lui aussi. »
    Voilà. C’était
dit, et mon hostilité se hérissait maintenant de colère, mais je me gardai de
dire quoi que ce soit contre le projet d’Arthur. Que pouvais-je dire ? J’étais
le fils d’une esclave saxonne, un jeune guerrier avec une bande d’hommes, mais
sans terre. Et Ceinwyn était une princesse : on l’appelait seren , l’étoile,
et elle brillait sur une terre désolée comme une étincelle de soleil dans la
boue. Elle avait été la fiancée d’Arthur, mais elle l’avait perdu au profit de
Guenièvre, et cette perte avait entraîné la guerre qui venait de s’achever dans
le carnage de Lugg Vale. Maintenant, au nom de la paix, Ceinwyn doit épouser
Lancelot, mon ennemi, tandis que moi, qui ne compte pour rien, je suis amoureux
d’elle. J’ai porté sa broche et son image n’a pas quitté mes pensées. J’avais
même fait le serment de la protéger et elle n’avait pas repoussé mon serment.
Son acceptation m’avait empli du fol espoir que mon amour pour elle n’était pas
vain, mais il l’était. Ceinwyn est une princesse : elle doit épouser un
roi. Moi qui ne suis qu’un lancier né d’une esclave, j’épouserai qui je
pourrai.
    Aussi ne
dis-je mot de mon amour pour Ceinwyn et Arthur, qui disposait de la Bretagne en
cette nuit d’après la victoire, n’en soupçonnait rien. Et comment l’aurait-il
soupçonné ? Si je lui avais confessé que j’étais amoureux de Ceinwyn, il y
aurait vu l’ambition révoltante d’une poule de basse-cour qui voudrait s’accoupler
avec un aigle.
    « Tu
connais Ceinwyn, n’est-ce pas ?
    — Oui,
Seigneur.
    — Et elle
t’aime, ajouta-t-il sur un ton à demi interrogateur.
    — J’ose
le croire », répondis-je franchement, me souvenant de la beauté pâle et
argentée de Ceinwyn, révulsé à la seule idée qu’elle fût promise à ce bellâtre.
    « Elle m’aime
assez, poursuivis-je, pour me confier le peu d’ardeur que lui inspire ce
mariage.
    — Pourquoi
serait-elle enthousiaste ? Elle n’a jamais rencontré Lancelot. Je n’attends
pas d’elle de l’enthousiasme, Derfel, juste de l’obéissance. »
    J’hésitai.
Avant la bataille, quand Tewdric était si impatient de terminer la guerre qui
menaçait de ruiner son pays, je m’étais rendu en mission de paix auprès de
Gorfyddyd. La mission avait échoué, mais j’avais parlé avec Ceinwyn et lui
avais confié l’espoir d’Arthur de la voir épouser Lancelot. Elle n’avait pas
rejeté l’idée, mais ne s’en était pas réjouie non plus. À cette date, naturellement,
nul ne pensait qu’Arthur pourrait vaincre le père de Ceinwyn dans la bataille
et elle m’avait prié de demander une faveur à Arthur s’il gagnait. Elle
désirait ma protection, et quant à moi, j’étais tellement épris d’elle que je
traduisis sa demande comme une supplique : qu’elle ne fût point contrainte
à un mariage dont elle ne voulait pas. Je dis alors à Arthur qu’elle avait
imploré ma protection :
    « Elle n’a
été que trop souvent fiancée, Seigneur, et trop souvent déçue, et je crois qu’elle
voudrait qu’on lui fiche la paix pour un temps.
    — Pour un
temps ! »
    Arthur rit.
    « Elle n’a
pas le temps. Elle a près de vingt ans ! Elle ne peut rester célibataire
comme un chat incapable d’attraper une souris. Et qui d’autre peut-elle épouser ? »
    Il fit
quelques pas.
    « Elle a
ma protection, mais quelle meilleure protection pourrait-elle souhaiter que d’être
mariée à Lancelot et placée sur un trône ? Et toi ? demanda-t-il
soudain.
    — Moi,
Seigneur ? »
    L’espace d’un
instant, je crus qu’il me proposait d’épouser Ceinwyn et mon cœur bondit.
    « Tu as
près de trente ans, reprit-il, et il est temps que tu te maries. Nous y
veillerons quand nous serons de retour en Dumnonie, car
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