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Le vétéran

Le vétéran

Titel: Le vétéran
Autoren: Frederick Forsyth
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s'installèrent cent mètres plus loin. Personne n'avait compté passer la nuit aussi haut sur le plateau, et ils n'avaient emporté ni vivres ni sacs de couchage. Assis autour du feu sur les tapis de selle, ils mangèrent des barres chocolatées, le dos calé contre leur selle. Le shérif Lewis contemplait les flammes.
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    - qu'est-ce que tu penses faire demain matin, Paul ? s'enquit Tom Barrow.
    - M'avancer tout seul dans la montagne. Sans armes. Je vais agiter le drapeau blanc et me servir d'un porte-voix. J'essaierai de le convaincre de redescendre avec la fille.
    - C'est peut-être risqué, intervint le garde. Ce gamin est incontrôlable et dangereux.
    - Il aurait pu tuer trois hommes aujourd'hui, répondit pensivement le shérif. Il aurait pu, mais il ne l'a pas fait. Il doit être bien conscient qu'en cas de siège, il n'est pas en mesure de protéger la jeune fille.
    J'imagine qu'il n'ira pas abattre un policier qui s'avance avec un drapeau blanc. Il m'écoutera d'abord. «a vaut la peine d'essayer.
    Des ténèbres glacées enveloppaient les montagnes. Tirant, entraînant et remorquant sa jument à grand renfort d'exhortations et de prières, Ben Craig fit parcourir à Rosebud le restant du chemin et atteignit la corniche rocheuse o˘ s'ouvrait la grotte. L'oil vitreux, le cheval tremblait sur ses pattes tandis que son maître aidait la jeune fille à descendre. Craig fit signe à Whispe-ring Wind d'avancer vers la grotte aux ours, détacha la peau de buffle et la déroula pour qu'elle puisse s'étendre. Il déchargea également le carquois et les deux flèches restantes, décrocha l'arc de son dos et les posa côte à côte. H prit ensuite le fusil dans son étui et coucha l'arme près de son arc. Enfin, il desserra la sangle et ôta la selle et les deux sacoches. Soulagée de tout ce poids, la jument esquissa quelques pas vers les arbustes rabougris et les feuillages desséchés. Ses pattes antérieures cédèrent et elle s'affaissa sur la croupe. Les pattes de devant fléchirent à leur tour et elle roula sur le flanc.
    Craig s'agenouilla et lui prit la tête pour lui caresser les naseaux. Elle hennit doucement en sentant le contact de ses doigts, puis son cour valeureux cessa de battre. Le jeune homme aussi était recru de fatigue. Il n'avait pas dormi depuis deux jours et deux nuits, et il venait de couvrir cent miles à pied et à cheval sans presque rien manger. Pourtant, il lui restait encore des choses à faire et il s'éloigna de quelques pas.
    Depuis l'extrémité de la corniche, il distingua au nord les feux de camp jumeaux de ses poursuivants. Là o˘ le vieillard lui était apparu autrefois, il coupa des branches et des arbrisseaux pour 345
    faire un feu. Les flammes illuminèrent la corniche, la grotte et la silhouette vêtue de soie blanche de son seul et unique amour.
    H ouvrit ses sacoches et prépara la nourriture qu'il avait prise au fort.

    Assis côte à côte sur le tapis de selle, ils partagèrent le seul repas qu'ils devaient jamais prendre ensemble. Maintenant que le cheval était mort, il savait qu'il ne pourrait presque plus chasser. Mais le vieillard visionnaire lui avait juré que cette femme serait son épouse, et qu'il en avait été décidé ainsi par le Grand Manitou.
    En bas dans la plaine, les hommes épuisés avaient peu à peu interrompu leurs conversations. Assis en silence, ils contemplaient le feu, le visage éclairé par les flammes dansantes. Dans l'atmosphère raréfiée des hauteurs, le silence était total. Le léger zéphyr descendu des sommets ne le troublait même pas. Tout à coup un bruit se fit entendre.
    Il traversa l'obscurité, porté jusqu'à eux par le vent léger venu des montagnes. C'était un cri net et prolongé, un cri de femme. H ne contenait ni douleur ni désarroi : c'était un cri vibrant qui allait decrescendo, exprimant une extase si parfaite qu'elle ne saurait être nommée ni reproduite.
    Les adjoints du shérif baissèrent la tête, et Lewis vit leurs épaules s'agiter de soubresauts. Cent mètres plus loin, Braddock se dressa près du feu de camp et ses hommes évitèrent de croiser son regard. Il fixait les montagnes, un masque de haine et de fureur sur le visage.
    ¿ minuit, la température commença à baisser. Au début, tout le monde pensa que c'était le froid de la nuit qui s'intensifiait, en raison de l'altitude et de l'atmosphère raréfiée. Tout frissonnants, les hommes se serrèrent plus étroitement dans leur veste en peau
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