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Le Livre D'émeraude : Les Aventures De Cassandra Jamiston

Le Livre D'émeraude : Les Aventures De Cassandra Jamiston

Titel: Le Livre D'émeraude : Les Aventures De Cassandra Jamiston
Autoren: Carolyn Grey
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jambes refusaient de bouger. Le froid s’était
encore accentué, et son souffle se changeait en buée au contact de l’air. Elle
tenta de faire un nouveau pas en avant, mais demeura pétrifiée. Bientôt il ne
resta plus qu’une seule lampe allumée, la plus proche d’elle. La petite bonne
ne pouvait rien voir au-delà ; on eût dit que les murs s’étaient
volatilisés.
    Les
yeux écarquillés, Mary Ann fixa la dernière flamme. Ses lèvres desséchées ne
cessaient de former des prières inaudibles. Comme dans un cauchemar, la flamme
faiblit, expira, et le noir fut total.
    Submergée
par la panique, Mary Ann recouvrit l’usage de ses membres. Elle fit volte-face
pour regagner l’escalier, mais ne vit rien d’autre que la nuit. Le monde avait disparu
dans une odeur de soufre. Mary Ann essaya de courir, mais les ténèbres denses
s’étaient refermées sur elle. Incapable de se mouvoir, elle était à leur merci.
La jeune fille les sentit frôler sa peau, s’infiltrer sous ses vêtements, dans
sa bouche… À chaque goulée d’air qu’elle inspirait, elles s’insinuaient dans
ses poumons, la faisant suffoquer.
    Au
paroxysme de la terreur, Mary Ann voulut appeler à l’aide ; sa gorge ne
parvint qu’à émettre une plainte suraiguë.
    Un
souffle d’air se leva soudain, qui se transforma en une véritable bourrasque.
Puis la lumière revint progressivement dans le couloir. Une à une, les flammes
revinrent à la vie. Eblouie, Mary Ann cligna des yeux. Ses jambes la trahirent
et elle s’effondra à genoux sur le tapis du couloir, la respiration saccadée,
l’esprit en déroute.
    Que
s’était-il passé ? Elle n’aurait su dire combien de temps l’obscurité
avait duré. Des heures ? Quelques secondes ? Mary Ann frissonna de
plus belle en repensant à la façon dont les ténèbres, comme douées d’une
volonté propre, l’avaient enchaînée.
    Mais
tout paraissait normal à présent. Troublée, Mary Ann se demanda si elle n’avait
pas rêvé. Se pouvait-il qu’elle se soit endormie ici, au milieu du
couloir ? D’un revers de manche, elle essuya son front trempé de sueur.
Son regard tomba alors sur la porte du cabinet de travail, et elle se releva
d’un bond. Son maître ! Elle courut vers le bureau, colla son oreille
contre le battant. Aucun bruit ne lui parvint, hormis le grésillement des
lampes dans son dos.
    Mary
Ann frappa, plus fort qu’elle ne l’avait voulu. Pas de réponse. L’angoisse
l’étreignit de nouveau et elle se mit à marteler frénétiquement la porte en
appelant sir Henry d’une voix que la frayeur rendait rauque. Toujours pas de
réponse. N’y tenant plus, elle entra.
    Personne.
    Plongé
dans la pénombre, le bureau n’était éclairé que par la flambée qui brûlait dans
la haute cheminée de marbre. Mary Ann fit quelques pas hésitants dans la pièce,
puis alla instinctivement se placer au centre de la flaque de lumière dorée que
les flammes créaient sur le sol devant l’âtre. Un peu réconfortée par la
chaleur du feu, elle sentit sa tension se relâcher et poussa un léger soupir de
soulagement. Le maître avait probablement regagné sa chambre depuis longtemps.
Son imagination couplée à sa fatigue lui avait joué des tours. Le rouge lui
monta aux joues à la pensée de la sottise dont elle avait fait preuve. Dieu
merci, personne n’avait été témoin de cette scène humiliante.
    Mr.
Hamilton devait s’impatienter à l’office, mais elle ne se sentait pas encore la
force de le rejoindre en bas. Ses jambes étaient toujours faibles, et elle dut
s’agenouiller devant la cheminée.
    Ce
fut alors qu’elle la vit. Une tache sombre, de la taille d’une pièce de
monnaie, sur le coûteux tapis de Bessarabie d’ordinaire immaculé. Mary Ann se
pencha davantage pour scruter le sol. D’autres taches, plus grosses,
souillaient le tapis. Un peu plus loin, sur le parquet, une traînée de gouttes
luisantes semblait se diriger vers le côté opposé de la pièce, noyé dans
l’obscurité. Mary Ann effleura de la main une des gouttes. Elle demeura un
instant immobile à contempler le liquide chaud, épais, poisseux, qui maculait
le bout de ses doigts, respira l’odeur salée, ferreuse, qui en émanait, puis
son souffle s’accéléra et sa tête se mit à tourner. Du sang…
    Affolées,
les pensées de Mary Ann cognaient à l’intérieur de son crâne comme si elles
cherchaient à s’en extraire. Le cœur au bord des lèvres, la jeune fille
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