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Le granit et le feu

Le granit et le feu

Titel: Le granit et le feu
Autoren: Pierre Naudin
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    24 juin 1340.
    Ce jour-là, dans l’estuaire de l’Escaut, un grand combat opposa la flotte anglaise, commandée par Édouard III, aux nefs de France supérieures en nombre et en guerriers. Les chroniques rapportent que les « Goddons » se battirent à un contre trois, sans jamais rompre l’engagement. La Bataille de l’Écluse s’acheva par une défaite qui laissa « tous les françoys durement dolans et esbahys, et les aultres, qui ne les amoient pas, moult joyeux [1]  ». Philippe VI de Valois, absent, avait assemblé quelque 200 « naves » bourrées de marins, mercenaires, piétons et chevaliers. La plupart furent détruites, les autres capturées. Il y eut, dit-on, 30 000 morts dont 22 000 « françoys ».
    La responsabilité de cette infortune incombe au commandement français. Son impéritie, ses carences et ses querelles avaient été dénoncées, avant l’attaque anglaise, par un chevalier cotentinais, seigneur de Gratot, près de Coutances : Godefroy d’Argouges. Victime de son franc-parler, il se vit accuser de trahison par son ennemi juré, Richard de Blainville, substitut du roi depuis quelques années, dans les pires occasions.
    Le château choisi pour le procès bâclé de Godefroy d’Argouges est celui de La Broye, proche de Crécy-en-Ponthieu où, six ans plus tard, devait se produire un second désastre militaire dû, lui aussi, à la balourdise des maréchaux et capitaines au service d’un roi friand de romans chevaleresques et d’ostentation guerrière. Si l’héroïsme de ces prud’hommes paraît certain, leur incurable jactance fut toujours préjudiciable aux lis de France.
    À peine sorti de ses enfances primes, Ogier d’Argouges avait accompagné son père dans cette expédition navale. Sur le pont du Christophe, dans l’anse de l’Écluse, il assiste à la déconfiture des guerriers qu’il admirait. Quelques jours plus tard, le 4 juillet, il est, parmi les survivants du massacre, le spectateur impuissant d’une cérémonie odieuse : son père est exclu de l’ordre de la Chevalerie et les deux lions d’or des armes familiales sont diffamés sur l’écu qui les porte : deux barbouillages de peinture les privent de leur longue queue en panache.
    À l’issue de cette dégradation, Godefroy d’Argouges, sauvé du bourreau par des chevaliers amis, n’est plus rien. Pour soustraire son fils à l’opprobre qui dorénavant sera sien, il en confie l’éducation à son beau-frère, Guillaume de Rechignac, ainsi qu’au sénéchal de celui-ci : Hugues Blanquefort.
    En Périgord, dans le château de son oncle, Ogier, pendant cinq ans, s’entraîne au dur métier des armes. Il a noué une idylle avec une jouvencelle, Anne, et s’est fait détester, dès son arrivée, par trois écuyers dont il affrontera l’un, Didier, dans un combat mortel après le viol de sa cousine Tancrède.
    Tandis que les Anglais font mouvement sur Périgueux, le damoiseau commet une faute : il va lui-même prévenir le père de Didier, Saint-Rémy, des menaces qui se précisent. Ce hobereau vit dans un châtelet fangeux. Une enjambée de trop sur le seuil ; la herse tombe : c’est la capture.
    Jeté dans une porcherie, Ogier, verrouillé, sait qu’il va être mis à mort au petit matin avec un Anglais qui partage son sort. Ce Goddon, c’est Robert Knolles, un routier dont les hordes ont envahi la contrée. Ogier l’aide à se délivrer de ses chaînes. Bientôt, les compagnons de Knolles assaillent victorieusement Saint-Rémy. L’Anglais et Ogier recouvrent la liberté.
    Knolles, reconnaissant, permet à Ogier de regagner le château de son oncle. Mieux encore : il lui accorde d’emmener avec lui les deux écuyers, Renaud et Haguenier, qui avaient contribué à son arrestation.
    Enfin, il laisse la vie à Saint-Rémy et fait don à Ogier d’une jeune ribaude : Adelis.
    À Rechignac on se prépare à soutenir un siège. Les hommes d’armes sont rares, mais les vilains et les manouvriers travaillant dans les murs jurent de sauvegarder cette bastille quasiment neuve, apparemment imprenable. Il y a, parmi les défenseurs, trois armuriers de Tolède qui, venant des Allemagnes, ont demandé asile au châtelain. Ogier a su s’en faire des amis ainsi que sa cousine Claresme, sœur de Tancrède.
    Bientôt, Robert Knolles vient sommer Guillaume de Rechignac de lui ouvrir ses portes. Le vieux guerrier refuse.
    L’angoisse étreint soudain les êtres et les
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