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Le cri de l'oie blanche

Le cri de l'oie blanche

Titel: Le cri de l'oie blanche
Autoren: Arlette Cousture
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s’inquiéter. Qu’Ovila avait quitté la Belgo parce qu’il détestait avoir un
patron anglais. Qu’Ovila était parti pour l’Abitibi, « voir les possibilités ».
Félicité n’avait pas été dupe. Elle n’avait posé qu’une question à Émilie.
Quand devait-elle le rejoindre ? Émilie avait essayé de ne pas baisser les
yeux. De garder la tête haute avant de répondre qu’elle ne pouvait prendre de
décision avant d’avoir reçu des nouvelles. Félicité avait hoché la tête puis
était allée chercher ses petits-enfants cachés derrière la bergerie.
    Émilie marcha lentement, Rolande endormie lui
pesant lourd. Elle entra dans la cuisine d’été et chercha ses enfants des yeux.
    – Dans l’écurie. Une des juments d’Edmond
est en train d’avoir son poulain.
    Émilie sourit. Elle déposa Rolande sur le lit
de sa belle-mère, faisant autour d’elle une véritable forteresse d’oreillers
pour l’empêcher de tomber. Elle revint aider Félicité et Héléna à ranger la
vaisselle qu’elles avaient déjà lavée. Puis elle se dirigea vers l’écurie pour
voir le nouveau poulain mais surtout retrouver sa Tite. Une vieille jument,
maintenant.

2
     
    Dès le lendemain, Émilie organisa sa
maisonnée. Elle se prit à rêver à l’arrivée imminente d’Ovila. Chaque fois
qu’un train entrait en gare, en provenance de Shawinigan ou de l’Abitibi, elle
sortait de la maison pour regarder entre les wagons dans l’espoir d’entrevoir
la silhouette d’Ovila. Elle alla même jusqu’à se pencher pour regarder les
pieds des quelques rares passagers qui descendaient, certaine qu’elle reconnaîtrait
Ovila à sa démarche ou même à l’allure de ses souliers, fussent-ils neufs. Les
souliers d’Ovila se moulaient à sa démarche : le pied droit d’attaque,
légèrement tourné vers l’extérieur ; le pied gauche moins tourné, un peu
plus traînard. Mais, ce matin-là, ce dernier matin où elle s’était penchée pour
regarder dessous le ventre du train, elle avait vu quelqu’un tituber après
avoir sauté de l’escalier du wagon. Elle avait cru pendant quelques instants
que la personne avait perdu l’équilibre, mais, au deuxième pas, la personne
titubait toujours, et toujours à chacun des pas suivants. Son cœur s’était
serré. Non ! Elle ne voulait pas que ce soit Ovila. Elle ne voulait plus
de cet Ovila. Et la réalité de son émotion lui apparut crûment. Pouvait-elle
vraiment encore vivre ces heures d’attente et d’angoisse ? D’attente,
peut-être. D’angoisse, non. Elle avait suivi les souliers du regard, espérant,
priant tout à coup pour qu’ils appartiennent à un autre homme. Les pas se
dirigeaient maintenant vers le dernier wagon et bientôt elle verrait. Puis elle
vit. Un vieillard gris, rond et rouge. Son soupir mourut lentement et ses rêves
le suivirent. Non. Même l’attente était impossible. Elle ne l’attendrait plus.
Plus jamais.
    De leur côté, les enfants couraient à la
poste, espérant toujours recevoir une lettre de leur père. La lettre n’était
jamais au rendez-vous et Émilie, devant leur mine déconfite, les rassurait en
riant, leur racontant que l’Abitibi était tellement loin que même les lettres
réussissaient à se perdre.
    Au mois de juillet, les enfants rentrèrent de
la poste tout excités. Émilie les entendit venir bien avant qu’elle ne puisse
les voir. Elle sortit et les vit courir tant bien que mal, portant d’énormes
colis plus encombrants que lourds, lui sembla-t-il.
    – Moman, moman ! Venez voir. On a
reçu des paquets de l’Abitibi. Huit paquets.
    Émilie se mordit les lèvres avant de les
forcer à sourire. Enfin des nouvelles. Les enfants entrèrent dans la maison et
Émilie regarda chacun des colis. Ils étaient adressés aux enfants. Il n’y en
avait aucun pour elle. Aucun pour Rolande. Elle prit celui de Blanche dans ses
mains et tenta de lire le cachet de la poste. Il était brouillé et elle ne put
en déchiffrer la provenance. Mais il venait d’Abitibi. Et Ovila avait adressé
les colis.
    – M. Gignac vous aurait pas donné
une lettre, par hasard ?
    – Non. Juste les paquets.
    – Peut-être que pâpâ a mis une lettre
dedans, dit Blanche pour encourager sa mère.
    – Dépêchez-vous d’ouvrir ! J’ai hâte
de voir ce que votre père vous a envoyé.
    Les enfants s’emparèrent d’une paire de
ciseaux et coupèrent les ficelles qu’Émilie récupéra une par une et noua avant d’en
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