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Le chat botté

Le chat botté

Titel: Le chat botté
Autoren: Patrick Rambaud
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quitter, et voilà Letourneur qui remonte son pantalon. Il l’avait ôté, dans le noir, pour ne pas en user le fond.
    • Comme à mon habitude, j’essaie de rester au plus près des témoignages d’époque, en les recoupant si possible. J’ai donc écarté ce qui relève de la fabrication, comme l’histoire de la rencontre avec Joséphine. Reclus à Sainte-Hélène pour y trépasser, « cette île anglaise chiée par le diable au milieu de l’océan », Napoléon a raconté une histoire enjolivée à cet opportuniste de Las Cases, tout en méditant sur la croupe de Madame de Montholon qu’il observait avec sa lorgnette de Waterloo. C'est la fameuse légende de l’épée, composée après coup car les contemporains n’en ont aucun souvenir, qu’on lit et relit partout, de Madelin jusqu’aux Belles Histoires de l’oncle Paul crayonnées par Vic Hubinon, cette bédé hebdomadaire et didactique du Spirou des années cinquante qui a su donner le goût de l’Histoire à une génération entière de marmots, dont moi.
    Voici la fable.
    Les sections parisiennes viennent d’être désarmées par la police de Buonaparte. Fusils, épées, sabres, pistolets, on en a entassé une pleine armurerie à l’hôtel de l’Etat-Major. Le jeune gouverneur militaire de la capitale voit alors arriver dans son bureau un gamin énergique, qui se campe devant lui : « Général, je t’en supplie, rends-moi l’épée de mon père! » Très ému, ce qui est possible car il avait la larme facile, même en public, comme souvent les nerveux, Buonaparte tapote la joue rose du bambin courageux et lui demande :
    — Comment t’appelles-tu ?
    — Eugène de Beauharnais. Mon père a commandé l’armée du Rhin.
    — Beauharnais... Beauharnais...
    C'était le nom d’une amie de Thérésia Tallien qu’il avait dû apercevoir mais dont il se souvenait mal. Laquelle était-ce, parmi cette meute de jolies femmes déshabillées qui fréquentaient la Chaumière et les dîners de Barras ? En tout cas, elle ne devait pas porter le deuil récent de son mari. « Lemarois ! » L'ordonnance apparut. « Lemarois, va chercher l’épée du général Beauharnais et rends-la à cet enfant. » On imagine la tête de ce malheureux Lemarois : comment diable allait-il pouvoir dénicher une épée dans le fatras des armes saisies ? Et puis Eugène ne ressemblait plus à un enfant. Napoléon, dans son récit du Mémorial , le rajeunit pour attendrir le lecteur, car Eugène avait déjà quatorze ans à l’automne 1795. Dans ses propres Mémoires , Eugène déniaise un peu le récit impérial : il ne serait pas venu réclamer l’épée, mais l’autorisation de la conserver. Soit. Qui voulait la prendre? Les rafles étaient achevées. Si les soldats n’étaient pas venus fouiller chez la vicomtesse de Beauharnais, ils n’avaient plus aucune chance de le faire. Et puis la troupe aurait-elle osé ouvrir les placards des amis de Barras et de Tallien? Un proche de la future Joséphine, Monsieur Bailleul, dira : « Je n’ai point entendu parler de cette anecdote dans le temps. »

REPÈRES BIBLIOGRAPHIQUES
    Certains noms de rues ont changé. La rue de la Loi, par exemple, est notre actuelle rue de Richelieu. La rue des Fossés-Montmartre (brièvement rue des Fossés-Montmarat) s’appelle aujourd’hui rue d’Aboukir, et l’hôtel où logea Bonaparte porte le n° 11. La villa de Joséphine, 6, rue Chantereine, se trouvait à l’emplacement du 44, rue de Châteaudun. Le couvent des Filles-Saint-Thomas recouvrait notre place de la Bourse. Pour le reste, on disait alors selon ses convictions ou ses goûts les anciens noms et les noms nouveaux, faubourg Saint-Antoine ou faubourg Antoine, rue Saint-Honoré ou rue Honoré, Palais-Egalité ou Palais-Royal. Notons que le café de Chartres est devenu le restaurant Véfour et que la Chaumière de Madame Tallien se trouverait aujourd’hui avenue Montaigne.
    Pour reconstituer le Paris de 1795, j’ai eu recours aux livres très fouillés de G. Lenotre, notamment Les Tuileries ou Paris révolutionnaire , ainsi qu’aux tomes volumineux du Dictionnaire historique des rues de Paris de Hillairet, constamment réédité par les éditions de Minuit.
    Puis bien d’autres ouvrages précis sur l’époque où j’ai placé ce roman. En voici les principaux.
    •  A. Aulard, Paris pendant la réaction thermidorienne et sous le Directoire , tome I (1898) et tome II (1899) publié à Paris chez Cerf, Noblet et
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