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Le Chant des sorcières tome 2

Le Chant des sorcières tome 2

Titel: Le Chant des sorcières tome 2
Autoren: Mireille Calmel
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obéirait aveuglément à ses ordres. Elle ferma les yeux. Elle avait peu de temps. Marthe devait, elle aussi, guetter la naissance de cette chose. Algonde ne devait pas la décevoir. Il fallait lui laisser croire à sa soumission, totale. C'était elle désormais qui menait le jeu. Elle s'accorda quelques minutes encore pour se reprendre tout à fait puis approcha la chandelle de la bassine. Un gros œuf noir baignait dans un liquide sanguinolent. Elle y plongea ses mains pour le récupérer et, sans se laisser distraire par sa texture molle et luisante, le nettoya à l'eau claire. Ensuite de quoi, l'ayant posé à terre, elle rinça scrupuleusement la bassine, puis le sol.
    Lorsqu'elle eut terminé de nettoyer, elle passa dans sa chambre, en fit le tour soigneusement pour s'assurer que nul ne s'y était caché, vérifia le verrou à sa porte, puis ferma le volet intérieur de sa fenêtre. Alors seulement, elle alla chercher dans son coffre une boîte de buis percée en plusieurs endroits. Dans le double fond qu'elle enleva à l'aide d'un stylet se cachait une minuscule fiole de terre cuite. Elle la déversa dans une coupelle puis y fit rouler l'œuf jusqu'à ce qu'il eût tout absorbé. La réaction ne se fit pas attendre. Les contours perdirent de leur régularité, des pointes le distendirent de-ci de-là comme si à l'intérieur deux forces s'opposaient en un combat acharné. Puis tout cessa. L'œuf noir reprit son apparence extérieure. Après l'avoir déposé précautionneusement dans la boîte, Algonde ôta sa chemise souillée pour la rouler en boule à côté. Saisissant la fiole au passage, elle s'allongea, nue, sur son lit et se massa le pubis avec les quelques gouttes qui y restaient encore.
    — Lystalimel oulvilam pactilifis murenam bectamalum.
    Un spasme, un seul sous ses doigts devenus caresse. Un sourire étira ses lèvres. La paix était en elle. Une lumière douce irradia son ventre, gagna ses cuisses, ses seins, puis son corps tout entier. L'esprit d'Algonde se focalisa sur sa source, là, au creux de ses entrailles perverties jusque-là par le mal. Une larme roula sur sa joue. Bonheur indicible. Certitude. Si petite encore et cependant si forte. Sa fille. Sa fille et celle de Mathieu. L'enfant de leur amour. L'enfant des fées.

3
    En un instant, Algonde se retrouva par la pensée cinq mois plus tôt, à Sassenage, dans l'antre de la sorcière baigné comme à l'instant d'une lumière bleutée.
    — Qui êtes-vous ? venait-elle de lui demander.
    — La seule qui sache la vérité. Toute la vérité. Mais puisqu'il faut t'en convaincre…
    Déroulant sous le regard émerveillé d'Algonde sa vieille carcasse voûtée, la sorcière s'était transformée en une dame sans âge à la beauté presque irréelle. Tout en elle respirait la bonté.
    — Présine, avait murmuré Algonde, comme une évidence. La mère de Mélusine…
    — Mais aussi de Plantine et de Mélior. Oui, c'est bien moi, Présine, qui les ai punies toutes trois d'avoir emmuré leur père, le roi Élinas d'Écosse que j'aimais.
    La fée lui avait tendu la main. Algonde l'avait saisie sans crainte et s'était aussitôt retrouvée baignée de sa lumière. Les contours de la chaumière s'étaient émoussés. Un autre décor lui était apparu, celui d'un plateau verdoyant dominé par de hauts sommets enneigés. Algonde avait perçu les parfums des fleurs, le souffle chaud du vent sur sa joue.
    — Est-ce réel ?
    — Autant que nous le sommes, Algonde. Viens.
    Algonde l'avait suivie jusqu'au sommet d'un promontoire rocheux. La beauté du paysage ouvert devant ses yeux lui avait coupé le souffle.
    Au cœur de la vallée qu'irriguaient sept rivières se dressait une ville élancée faite de tours aux formes étranges, tantôt des aiguilles, tantôt des plates-formes reliées entre elles par des passerelles, tantôt des dômes de cristal qui reflétaient la lumière, le tout d'une blancheur argentée qui obligeait à plisser les paupières. C'était de loin la plus belle des choses qu'il lui ait été donné de contempler.
    Cette cité est l'âme des Hautes Terres, Algonde. Chacune de ces rivières magiques que tu en vois sortir était avalée par une porte invisible pour rejaillir dans ton monde. Au tout début, les humains traversèrent ces passages par hasard, égarés dans un brouillard créé par une distorsion temporelle.
    — Distorsion temporelle ? Pardonnez-moi, Présine, mais…
    — Bien sûr, s'était excusée la
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