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La Perle de l'empereur

La Perle de l'empereur

Titel: La Perle de l'empereur
Autoren: Juliette Benzoni
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côté d’une petite fontaine en fonte munie d’un robinet…
    — Mon Dieu ! souffla Masha en se signant frénétiquement. Que s’est-il passé ?
    La porte d’un des logements pendait, à demi arrachée. Au-delà c’était l’obscurité totale… Morosini prit la lampe des mains de sa compagne :
    — Laissez-moi entrer le premier ! ordonna-t-il. Qui sait ce qui se cache là-dedans ?
    Mais il ne s’y cachait rien. Le pinceau lumineux révéla un logement modeste sur lequel un cyclone avait dû passer. Tout était par terre, depuis la maigre batterie de cuisine jusqu’aux couvertures du lit. Seule régnait sur ces dégâts une table supportant une lampe à pétrole éteinte qu’Aldo ralluma. Les jambes coupées, la tzigane ramassa l’une des deux chaises et se laissa tomber dessus, ce qui faillit lui être fatal. Elle mâchonnait ce qui devait être des jurons ou des invocations dans sa langue incompréhensible.
    — Si vous essayiez de m’expliquer ce qui a pu se passer ici ? émit doucement Morosini. Et aussi ce que nous venons y faire ? On dirait que nous arrivons après une bataille ?
    — Pas une bataille, monsieur, un enlèvement ! fit une voix timide qui venait de la porte.
    Sur le seuil, se tenait un petit homme gris aux cheveux en désordre serrant autour de ses frêles épaules un châle également gris qui lui servait de robe de chambre car on pouvait voir, dépassant des franges, une chemise de nuit à rayures et des pieds nus dans des pantoufles. Masha bondit littéralement sur lui et faillit l’aplatir :
    — Tu es son voisin d’en face, vieil homme. Qu’est-il arrivé à Piotr Vassilievich ?
    Quasi enlevé de terre par la poigne vigoureuse de la grosse tzigane, le vieux eut un couinement de souris terrifiée. Morosini s’interposa :
    — Vous l’étranglez à moitié. Ce n’est pas le bon moyen d’obtenir une réponse…
    Les pieds du malheureux ne touchaient plus terre. Aldo l’ôta des mains de la tzigane, l’installa sur une chaise où il s’affaissa comme un drap mouillé tandis que Morosini cherchait quelque chose autour de lui. Un peu penaude, la femme devina son intention :
    — Il doit y avoir une bouteille de vodka quelque part. C’est moi qui l’ai donnée à Piotr…
    Enjambant majestueusement les décombres, elle alla au fond de la pièce, trouva une sorte de petit placard dissimulé par le papier de tenture, l’ouvrit et en tira une bouteille à moitié pleine dont elle s’adjugea une rasade avant de l’apporter à Morosini.
    — Charité bien ordonnée commence par soi-même, railla celui-ci.
    — Les émotions ne valent rien à ma voix et j’aime beaucoup cet imbécile de Piotr. C’est… c’est mon frère !
    Revenu de sa terreur et ranimé par l’alcool, le vieil homme expliqua d’une voix enrouée que vers minuit une voiture s’était arrêtée devant la porte. Des hommes étaient entrés dans la maison et ils devaient savoir où ils allaient car ils étaient montés au troisième sans hésiter.
    — Là ils auraient pu se tromper de porte, mais non ils sont allés droit chez mon voisin. L’enfer alors a commencé : un bruit d’apocalypse, des cris de douleur, des voix furieuses posant des questions en russe. De toute évidence mon pauvre voisin passait un mauvais quart d’heure mais je n’ai pas beaucoup de forces et j’avais tellement peur que je n’osais même pas sortir sur le palier…
    — Il fallait appeler la police.
    — Il faut d’abord avoir un téléphone et le plus proche est dans un café de la rue des Abbesses…
    — Et les habitants de la maison ? Ils n’ont pas bougé ?
    — Ils doivent être au fond de leur lit avec la couverture remontée par-dessus la tête. Ce sont de pauvres gens, comme moi. Au rez-de-chaussée il y a un vieil homme avec son petit-fils. Au premier c’est la famille d’un gardien de nuit, qui ne rentre qu’à l’aube. Au second une femme pas bien solide avec trois petits. Elle fait des ménages et c’est la vieille fille d’à côté qui s’occupe des gosses. Alors c’était difficile d’avoir de l’aide…
    — Je comprends, fit Morosini compatissant. Et vous dites que ces hommes ont enlevé votre voisin ?
    — Oui. Au bout d’un moment, ils ont dû entendre un bruit qui m’a échappé car ils sont partis en l’emmenant. J’en ai entendu un qui disait – en français, ce qui m’a étonné – avec un accent faubourien « Filons ! Ici on risque d’se faire
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